A travers Champs N°67

Dimanche 27 décembre 2015

De l’humilité

Pour être témoin d’un événement, trois conditions simultanées sont nécessaires : être dans le champ d’observation de l’événement (condition spatiale), être au moment de l’événement (condition temporelle), être en mesure de capter l’existence de l’événement (condition technico-sensorielle).

Ainsi, tous les événements survenant avant ou après mon observation, ou qui ont lieu hors de mon champ d’observation, ou qui échappent à mes moyens d’investigation, ne me sont pas perceptibles.

Je peux concevoir en conséquence que l’observateur que je suis ayant surgi à un moment donné (succession d’instants) dans un volume donné de l’espace (succession de lieux, puisque étant mobile) avec les moyens technico-sensoriels dont je dispose à un instant T (mes sens prolongés par les appareillages techniques existant à l’instant T), accède à la connaissance d’un certain nombre fini d’observations directes. Celles-ci sont regroupées dans une sphère d’observation, ou plus précisément, un ensemble de sphères successives d’observations ayant pour centre l’observateur que je suis et de rayons de dimensions différentes.

Restent en dehors de ces sphères d’observation : tous les événements dont les éléments d’observation me restent imperceptibles, soit qu’ils aient lieu avant ou après mon observation, soit qu’ils aient lieu en un lieu échappant à mes investigations, soit qu’ils échappent à mes moyens de connaître leur existence. Ces sphères ne sont pas infinies. Certes j’en suis le centre. Mais elles ont des rayons de perception de portées différentes : ce que je puis goûter ou toucher est d’une portée inférieure à ce que je puis sentir, sphère inférieure de portée à celle de ce que je puis entendre, elle-même inférieure à celle de ce que je puis voir…Il en est de même pour les différents appareillages techniques dont le spectre d’investigation diffère de l’un à l’autre : ainsi le télescope et le radiotélescope, etc…, récoltant des informations liées à des longueurs d’ondes du spectre électromagnétique spécifiques pour chacun d’entre eux. Mais ces appareils ne font que traduire à nos sens ce que nos sens ne perçoivent pas directement eux-mêmes ; ils ne sont en quelque sorte que des appendices, prolongateurs de nos capteurs.

S’il existait – il existe a priori – d’autres événements que ni nos sens ni nos appareils ne puissent capter, nous n’en pouvons prendre connaissance, ce qui ne signifie pas qu’ils n’existent pas. Nous sommes simplement dans l’incapacité à les percevoir, ce qui revient à dire qu’en l’état actuel de nos techniques d’investigation, nous en sommes réduits à concevoir un monde partiel : ceci explique sans doute quelques incohérences dans ce que nous percevons, autrement dit, des observations dont nous ne pouvons expliquer la cause. Car si de telles entités échappant à nos pouvoirs de détection existent, étant elles-mêmes partie de ce monde, elles interfèrent sur lui, et nous en observerions alors les conséquences sans savoir les expliquer. Si nous construisions des appareillages aptes à les détecter, nous élargirions du coup les sphères de nos connaissances du monde environnant et lointain.

Il y a gros à parier qu’alors une immense partie de ce monde nous échapperait encore.

Je nous imagine, humains, accrochés comme des poux à notre minuscule vaisseau spatial, au destin aléatoire, tête d’épingle dans un univers infini en tous sens…Me vient conséquemment cette vision de notre boule porteuse, cette merveilleuse bulle de lumière et de vie, perle dans le cosmos, ayant accouché de la vie, si belle et miraculeuse, et de la pensée, à nous humains attribuée : et qu’en faisons-nous ?...Nous nous déchirons ! Nous nous acharnons à détruire tout ce qui fait le miracle absolu de ce microcosme qu’est la Terre, au lieu de nous appliquer à la sagesse et à l’humilité !...

A travers Champs N° 66

8 juin 2015

 

Soyez optimistes !

 

Bon. Ça devait arriver. Des scientifiques (une équipe Chinoise : décidément, vous allez penser que j’en veux à ce peuple, puisque je viens de vous parler d’eux dans mon compte-rendu du livre Le dernier loup – cf Ma bibliothèque), des scientifiques disais-je, viennent de parvenir à manipuler des gênes d’embryon humain. En gros, cela signifie que l’on est désormais en mesure de programmer aisément un être humain selon ses désidératas. Vous voyez les risques ?...Remarquez, il n’y a pas besoin de ça pour manipuler et asservir toute une société : il suffit d’observer ce qu’il se passe en Corée du Nord, …ou ailleurs, plus près de chez nous, dans un autre genre : là, si vous ne voyez pas à qui je pense, ne cherchez pas, ce n’est pas grave…

J’observe que certains individus (ce sont le plus souvent des dirigeants de grandes entreprises, mais pas que…) chez nous en France, persistent dans cette étrange pratique de s’enrichir éhontément au détriment de la masse des travailleurs (voulez-vous des noms ?...) ; que – c’est là ce que me disait une personne bien humble ce matin - nos grands serviteurs de la République continuent de percevoir leurs salaires après le départ de leur fonction…Non ?...Mais si !…alors qu’on demande au menu peuple de se serrer la ceinture ! Vous voyez, ils montrent l’exemple…Faites ce que l’on vous dit, mais ne faites pas ce que nous faisons. Nous sommes d’un autre monde, nous les politiciens et vos dirigeants. Faites-nous confiance…pour vous gruger et vous tondre…

[Sur ce sujet, la première chanson du dernier CD de Cabrel est parfaitement pertinente]

 

Ne polluez pas, cessez vos feux de bois ! nous dit-on.

Et vos avions, à vous gens riches, ils ne polluent pas, peut-être ?...Et ces saignées dans la campagne pour installer vos LGV, gens fortunés ? Croyez-vous que nous, pauvres gens qui vous voyons saccager notre environnement, nous en profiterons ? D’ailleurs, pourquoi êtes-vous si pressés, gens riches ? Vous avez tant besoin de vous déplacer à 200 à l’heure ? Pauvres aveugles et sourds ! Que voyez-vous de la nature dans vos sièges capitonnés qui vous emmènent à toute allure vers des objectifs absurdes…

 

J’écoutais cette femme rencontrée à un salon hier : Colombienne, elle m’expliquait qu’après le violent séisme de 19…(je ne sais plus la date), le pays avait reçu une aide internationale considérable afin d’aider la population à se reconstruire : celle-ci n’a pas vu la couleur de cette manne. Oh ! Sans doute ne fut-elle pas perdue pour tout le monde…

 

Je voulais aussi vous parler de cette sacro-sainte liberté, dont je me sens quotidiennement privé (en effet, ni moi ni vous ne sommes libres de rouler comme bon nous semble : n’est-il pas stupide de traverser à 30 km/h, en pleine nuit, des villages déserts ?...).

 

Je voulais parler de la monstrueuse ineptie des administrations : qui n’a jamais fait la douloureuse expérience de notre bureaucratie bornée ? C’est le plus souvent kafkaïen (il est un album d’Astérix qui dépeint fort bien l’angoisse que génèrent parfois certaines démarches obligées au sein de celles-ci…).

 

Je pourrais aussi évoquer cette nature étranglée, saignée, détruite par nous, humains. Ces espaces naturels rétrécis comme peau de chagrin, ces espèces « protégées » (dérisoire ! navrant !). Ces climats emballés…Ces mers polluées…Cet air vicié qui tue…

 

Dois-je continuer ainsi la litanie de ces tristes constats ? Tant de stupidité et d’injustice me révulse. Aussi, je confiais à cette femme croisée ce matin au supermarché que, finalement, si la mort venait demain frapper à ma porte, je me livrerais à elle sans regrets, tant le spectacle de ce monde absurde m’écœure. Je ne sens autour de moi aucun optimisme, aucune raison de l’être non plus. Nous sommes un peuple devenu triste et résigné, un peuple de consommateurs asservis, indifférents, incapable de se débarrasser des parasites qui le gangrènent. Un peuple égoïste, qui a peur du regard même de l’autre.

A mon grand étonnement, sa réponse fut la suivante : « Je vais vous surprendre : c’est exactement la réflexion que je me faisais ce matin… »

Ben voilà.

Qui me redonnera de l’optimisme ?...

Ouais ! Je vous entends d’ici : « Qu’attends-tu des autres, toi ? Commence par te redresser toi-même. Sois optimiste d’abord, ça aidera les autres à le devenir… »

L’ennui, c’est que je ne trouve plus nulle part de raisons d’être optimiste…

À travers Champs N° 65

6 mai 2015

Ainsi va le monde

 

J’apprends, comme tout le monde, que la France est fière et heureuse : réjouissons-nous, mes frères ! Alléluia ! Hosanna !

« La France a vendu des escadrilles de Rafales ! »

Le Rafale étant, comme vous le savez, le nom d’un avion de chasse high tec, paraît-il, de la dernière sophistication.

 

D’abord à qui profite le crime ?...A M. Dassault. Ah ! Ferrat ! Si tu revenais !...Tu nous en ferais bien une chansonnette…Mais, au final, assez peu de voix s’indignent de cette info.

Les médias, semble-t-il, vont dans le sens général : c’est une excellente nouvelle.

Evidemment, pour lutter contre le chômage. Les usines Dassault et celles de leurs sous-traitants vont pouvoir tourner à plein régime, et embaucher de la main d’œuvre. Oh ! Soyez sans crainte, les salaires des ouvriers n’équivaudront pas ceux de M. Dassault et sa bande. Mais que dis-je ? Je m’égare.

Je préfère ne pas penser aux sommes d’argent qui vont transiter d’une banque à l’autre pour faire naître et acquérir ces flottilles de tueurs volants. Justement, le mot est lâché : tueurs. Car enfin, ces avions ne sont pas destinés à la promenade. Ce sont des machines redoutablement efficaces pour tuer.

Comment ne pas s’attrister, pour ne pas dire s’alarmer, de ce vent de folie qui enfle sur la planète ? Les plus riches s’arment (pour lutter contre Daesh, dit-on pudiquement du bout des lèvres). C’est soudainement la course à l’armement. Et voici que mon beau pays vogue en tête des vendeurs d’armes de la planète ! Mais oui, Monsieur le Président, vous avez de quoi parader : vous parrainez ces coquins de fabricants d’armes. Que retirez-vous personnellement de ces ventes ? Moins, assurément, que le fabricant, je présume. Votre ego pourra se flatter d’avoir contribué à la paix dans le monde, non ?

Et moi j’assiste, impuissant, à la ronde des chasseurs dans le ciel. Bon. Me voici rassuré : les bombes ou les missiles, ce n’est pas pur nous, Français. Ouf ! Je respire.

Finalement, je suis bien stupide de jouer les trouble-fêtes (oh ! je sais bien que je ne troublerai pas leur fête, ni vous d’ailleurs).

« Frères humains qui après nous vivrez, N’ayez contre nous les cœurs endurcis… »

« Gordes, aurons-nous point la paix ?... »

Je ne puis m’empêcher de me remémorer ces vers de poètes anciens…

Rien n’a changé, doivent-ils songer du haut du ciel (s’ils s’y trouvent encore, depuis le temps…).

Non. Rien n’a changé.

Pourquoi, d’ailleurs, cela changerait-il un jour ?

Non. Rien ne changera sur ce monde en dérive…

 

Juste un mot encore sur un tout autre sujet.

Voici qu’ils (des scientifiques, bien sûr) ont trouvé le moyen d’intervenir de façon à modifier les gènes humains à volonté, grâce à l’invention d’un « couteau génétique » hyper précis. Ne m’en demandez pas trop : je ne suis absolument pas compétent en ce domaine. N’empêche que la communauté scientifique s’inquiète, essaie de faire barrage,…Mais qui stoppera la folie des hommes ?... Où s’arrêteront-ils ? Dans quel monde vivons-nous ?...

Je ne l’ai pas choisi. Et je suis impuissant à modifier le cours des choses.

N’y a-t-il pas de multiples raisons de désespérer de notre engeance ?...Pourtant, je m’accroche encore : espère, pessimiste ! Espère…

Oui : il faut garder l’espoir…mais de quoi ?...

 

 

 

À travers Champs N° 64

03 février 2015

Vive la science !

 

Quel beau titre, n’est-ce pas ? Comment le prendre ? Je vais préciser ma pensée.

(Réf : in S & A N° 816 de ce mois)

Un canon électrique pour gagner en puissance.

Simple. Une équipe franco-allemande de chercheurs travaille sur la mise au point d’un canon hyper performant. Le « railgun » - c’est le nom de cette invention - fonctionne très bien. Quelques chiffres : portée : 200 à 400 km (contre 100 pour un canon « classique », à poudre) ; 70 km d’altitude pour le projectile ; 2,98 km/sec, la vitesse du projectile lancé par Pegasus (le fameux canon), soit 8 fois la vitesse du son. Lors de l’essai auquel a assisté le journaliste, le projectile, petit cube de tungstène, s’est pulvérisé contre un empilement d’épaisses plaques d’acier, dont la première a été transpercée. Forcément, à la vitesse de mach 8 !…

Du coup, rencardés les vieux canons de l’artillerie à poudre. Une ère nouvelle s’ouvre. Cette arme d’un nouveau genre, à l’image de celles que l’on découvre dans les jeux vidéo ou les films de SF, a tous les atouts pour déclasser les armes à poudre conventionnelles que l’humain avait pourtant portées à la perfection, depuis l’arquebuse et le mousquet : plus rapide, plus performante, plus puissante, et elle utilise l’énergie électrique.

Le principe est un peu technique : en gros, on crée un champ magnétique qui repousse le projectile le long de deux rails alimentés en fort courant électrique[1].

Les Américains semblent en avance sur l’équipe Franco-Allemande sur le même type de prototype. Ce canon permettrait d’atteindre avec un grand succès tout aéronef intempestif, du drone au missile en passant par les avions. Mais, pour compléter l’efficacité de cette arme redoutable, ils ont concocté un autre canon, laser, celui-là, qui permet de toucher en vol, au sol ou en mer rapidement et avec précision toute cible ennemie indésirable ; en cas d’attaque par une flottille de bateaux de guerre, ce genre de truc est parfait pour nettoyer le terrain.

On n’arrêtera pas le progrès, mes enfants !

L’article ne précise pas le coût de ces recherches…Dommage ! Avec la crise actuelle, on aurait peut-être pu aider les pauvres gens, les « sans-dents », les femmes obligées de se prostituer pour nourrir leurs enfants, les malades atteints d’Ebola, que sais-je ?...

Au fait, je viens d’apprendre que notre Ministre de l’Economie touche un salaire mensuel de 9 000 € environ. Ce qui semble, paraît-il, modeste, si l’on considère d’autres privilégiés de ce genre. Notez qu’en accédant à ce poste, il a dû renoncer à des appointements beaucoup plus considérables (j’ai oublié le chiffre, mais vous trouverez ça dans sa déclaration de revenus et de biens, ouverte à tous, désormais…).

 

La souris qui rajeunit.

Voici quelque chose de plus réjouissant, braves gens. Quand je vous dis que nous vivons une époque merveilleuse, pourquoi refusez-vous de me croire ?...

Je vous expliquais dans un précédent À travers champs[2], que l’on progresse sur la piste du rajeunissement de nos cellules. L’article développé sous ce titre confirme que l’on est presque parvenu à trouver l’élixir de jouvence. Vraiment.

Je vous emmène au cœur de la cellule. Il existe au sein de chaque cellule des organites nommés mitochondries : jeunes et saines, elles génèrent la jeunesse et la santé pour l’organisme. Leur santé semble liée à une molécule particulière, une co-enzyme. À l’inverse, des mitochondries de piètre qualité conduisent à des symptômes liés à l’âge. Je vais faire simple. En administrant durant une semaine cette molécule très spécifique à une souris en fin de vie, ils ont constaté un rajeunissement général chez le rongeur : raffermissement des muscles de l’animal, augmentation de la résistance aux inflammations, amélioration des performances cognitives…Ce neuroscientifique américain semble avoir mis le doigt sur le mécanisme de la longévité. Retenez bien son nom :Tony Wyss-Coray. Tant que vous y êtes, retenez aussi celui de cette molécule : le NAD. Voilà, vous savez tout. Dans quelques années, vous pourrez vous acheter des ampoules injectables ou des gélules de ce produit miracle, pour effacer vos rides, retrouver votre vigueur de vingt ans…Ce dont tant d’êtres humains ont rêvé depuis l’aube de l’humanité et dont nous rêvons tous : l’éternelle jeunesse !...

Je sens que ça vous laisse pantois. Oui, vous vous attendez sans doute à mon commentaire acerbe ?...Le voici : ne rêvez pas, vous qui me lisez : vous ne serez jamais assez riche pour vous offrir ce luxe. En effet, vous ne voudriez tout de même pas que tout le monde en profite ? Ce serait invivable. Comment nourrir chaque jour une humanité privée de la mort ? Où logerions-nous tout ce monde ? Car l’on continuerait à procréer, comme des lapins, mais nul ne mourrait plus. Vous voyez le chantier ? Du coup, pour mettre bon ordre à ce chaos, seuls les hommes importants auront le droit de se régénérer de la sorte. Une élite, en somme. De gens fortunés. N’est-ce pas là la plus belle invention humaine ? Ouais ! Dommage qu’on ait inventé des canons-laser et des « railguns », ou plutôt…tant mieux, au fond, non ?...

Et dire qu’il fut un temps heureux où les bergers antiques passaient des mois dans la solitude des prairies en compagnie de leurs troupeaux ...jusqu’à vieillir paisiblement, puis s’éteindre sereinement !…

C’était du temps où l’on n’avait pas encore inventé la guerre et la science…Je ne m’en souviens plus…

 

Amères, mes pensées ce soir, direz-vous ?...Sans doute…Qu’y puis-je, au spectacle de ce monde en folie, il devient de plus en plus difficile de ne pas l’être un peu, amer…

 

[1] Force de Lorentz

[2] À travers Champs N° 48

 

Mardi 11 novembre 2014

À travers Champs N° 62

11 novembre 2014

Je rêve

 

Le monde tourne…pas rond, peut-être, mais il tourne. Puisque ce matin, à la nuit a succédé le jour. Indéniable. Une révélation ! Du coup, pour fêter ça, j’ai allumé la radio.

Mon Dieu ! Une voix, toujours la même depuis des lustres, déroulait, imperturbable, la litanie des infos, toutes les mêmes depuis des années…

 

« Nigeria : un kamikaze déguisé en écolier tue 47 collégiens

Un attentat-suicide a fait lundi au moins 47 morts et 79 blessés parmi les élèves d'un collège du nord-est du Nigeria, a indiqué la police, qui a accusé le groupe islamiste armé Boko Haram…

Israël : la police en alerte après la mort d’un Arabe israélien, abattu par un officier

Un nouveau degré a été franchi en Israël dans le cycle de violences qui fait planer la menace d'une nouvelle Intifada…

Affaire Jouyet-Fillon : qui est Antoine Gosset-Grainville, le 3e homme

Le troisième homme présent au déjeuner entre François Fillon et Jean-Pierre Jouyet en juin dernier, au cours duquel l'ex-Premier ministre aurait demandé à l'Elysée de "taper fort" sur Nicolas Sarkozy livre, ce mardi, sa version des faits…

Ebola : l'épidémie régresse…pour le moment

Des progrès ont été accomplis dans la lutte contre la fièvre hémorragique. Mais c'est encore loin d'être la fin de l'épidémie. La lutte contre le virus Ebola commence à porter ses fruits…

Les guerres françaises mettent du plomb dans l'aile du budget

Mali, Centrafrique et Irak, les opérations militaires extérieures de la France coûtent cher. Elles sont la première cause d'un dérapage budgétaire que le gouvernement entend compenser par des mesures d'économies supplémentaires, dévoilées ce mercredi ...

L'OSCE met en garde contre une escalade militaire en Ukraine

L'ambassadeur ukrainien à l'ONU a assuré que la Russie prévoyait une «une invasion à grande échelle». «Je pense que l'ONU devrait être informée que la Russie projette une invasion à grande échelle en Ukraine», a écrit le diplomate, Yuriy Sergeyev, sur Twitter…

A Kobané, des dizaines de jihadistes tués par les Kurdes et les frappes de la coalition

Les jihadistes tentent depuis plusieurs jours d’asphyxier encore davantage Kobané, plus d'un mois après le début le 16 septembre de leur offensive, qui a poussé à la fuite plus de 300.000 personnes, dont plus de 200.000 en Turquie. Des centaines de personnes sont encore bloquées dans la ville, pilonnée par les jihadistes et les frappes de la coalition. »

 

Le monde tourne, sans doute, ainsi depuis que l’espèce humaine existe sur cette terre. Toujours la guerre, la violence. Et je vous ai épargné tant d’autres de ces infos qui parviennent quotidiennement jusqu’au cœur de nos demeures.

Mais quand donc cesseront ces crimes, ces oppressions, ce carnage, cette stupidité, cette absurdité ?

Je ne supporte plus d’entendre toujours ces horreurs. Je ne puis imaginer qu’on dépense autant d’énergie et d’argent à fabriquer des chars, des armes pour tuer, et qu’on ne cesse jamais de faire perdurer ces conflits insanes. Pourquoi faut-il que les Russes envahissent l’Ukraine ? Pourquoi les Israéliens continuent-ils d’implanter des colonies sur les territoires palestiniens ? Pourquoi les gens de Boko Haram s’en prennent-ils à des jeunes innocents ? Pourquoi n’a-t-on pas cherché à protéger les populations africaines du virus Ebola plus tôt ?...Pourquoi ces jihadistes se comportent-ils comme des fous ?

Tous ces gens qui commettent ces attentats terribles, qui coupent impunément les têtes d’innocents (et, de surcroît, filment d’une manière éhontée ces décollations puis diffusent ces vidéos), ceux qui sont à l’origine de ces conflits (Poutine, et tous ces dirigeants stupides et sanguinaires), tous ces gens sont des monstres. Je ne trouve pas d’autre terme pour désigner ces dégénérés de l’espèce humaine. Ils sont inhumains, ne sont pas même des bêtes (elles ne commettent pas de telles horreurs).

Mais quand verra-t-on la paix sur cette terre ?

 

Hélas ! Il faudrait, je le crains, un second déluge, afin d’éradiquer notre espèce de la planète, et ainsi éliminer le mal qui l’habite. Notre espèce est maudite. Elle ne génère que des choses néfastes, la plupart du temps. La haine, l’envie, le lucre sont les ferments qu’elle transmet de génération en génération à ses semblables. L’égoïsme règne partout en maître.

On a oublié les paroles du Christ : amour, désintéressement, fraternité…Lui qui prônait, qui promettait un monde de paix et d’amour…Je sens bien que rien que d’évoquer son nom et ces mots, je suis complètement en dehors du coup. L’on peut rire de moi, je préfèrerais sans conditions ce monde promis au nôtre…Désolé, mais je ne me ferai jamais à la violence, à l’injustice, à la bêtise, à la laideur…car ce monde est laid, je vous le dis, nous l’enlaidissons chaque jour un peu plus. Nous ternissons tout, étouffons tout, détruisons tout…Ce cadeau de Dieu, cette fragile boule, notre canot de sauvetage, qu’en avons-nous fait ?...Nous sommes un cancer détestable et absurde.

Franchement, le spectacle de nos politiciens, ceux qui nous gouvernent, ne vous écœure-t-il pas ?... N’êtes-vous pas écœurés par cette information :

800.000 euros par an de "retraite chapeau" pour le patron de GDF Suez

"Nous considérons donc qu'elle [la retraite chapeau] est acquise, même si le gouvernement désapprouve ce type de rémunération", précise néanmoins le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron.

Comment peut-on ne pas être révoltés par cela ? Jusqu’où ira-t-on ? Ce n’est pas seulement scandaleux ou révoltant, c’est criminel.

Comment pouvez-vous rester insensibles au chaos qui nous entoure ?

 

Pour ma part, je suis profondément attristé, révolté, abattu, par le spectacle lamentable de cette humanité qui va à la dérive, vers le néant…

Nous pouvions cultiver cette planète-oasis avec intelligence et amour, et nous la réduisons en cendres.

Pouvez-vous imaginer la Terre vue de l’espace ? Voyez-vous ces millions d’individus qui s’gitent comme des fourmis, et qui ne sont préoccupés que de leurs petits intérêts personnels, ou de massacrer leurs voisins ?...

Moi, je rêve d’une planète bleue et verte, et douce, où il ferait bon vivre, où le souvenir même des guerres, des violences, des injustices serait aboli…

Je rêve…

À travers Champs N° 61

24 octobre 2014

23 millions !...une bagatelle, voyons…

 

Il semble que nous (vous et moi, simples gens du peuple) ne vivions pas dans le même monde que toute une catégorie de la population française.

Cela fait longtemps que je le subodorais, mais là, cette fois, j’en suis sûr.

Voilà un homme qui va partir en retraite avec une pension tout à fait confortable jusqu’au restant de ses jours, si j’en crois cet article du Figaro de ce jour :

 

« En plus de sa retraite complémentaire, Gérard Mestrallet touche une retraite de base de 90.469 euros. Soit un total d'un peu plus 922.000 euros, c'est-à-dire environ 77.000 par mois. Une somme qui passe mal auprès des syndicats, et notamment de la CGT, alors que GDF Suez a enregistré des pertes record de près de dix milliards d'euros en 2013 et prévoirait d'engager un plan d'économies de l'ordre de 4,5 milliards. »

 

Pour ma part, j’ai peine à appréhender le détail de ces versements. La seule chose que je comprends, c’est qu’on parle de sommes si considérables que j’ai peine à croire cela.

 

Comment est-ce possible qu’un seul homme perçoive une telle richesse, quand la plupart des français, des travailleurs, des retraités ont peine à vivre ! En pleine période de vaches maigres (nous dit-on…).

 

J’ai rencontré en dédicaces il n’y a pas si longtemps une vieille dame charmante qui, désirant m’acheter mon livre Âneries, qui vaut 15 €, soupirait, fort triste : « J’adore la lecture, Monsieur, mais vous savez, nous sommes en retraite, des petites retraites, et, quand on a payé les charges, il ne nous reste pas grand-chose pour vivre. Alors, cette semaine, si je vous achète votre livre, qui me tente vraiment, il faudra se priver du beefsteak. »

Son mari est arrivé sur ces entrefaites.

« Vois-tu, mon chéri, j’ai acheté ce livre : nous n’aurons pas de viande cette semaine. »

Il a eu un sourire merveilleux, a secoué la tête.

 

J’en aurais pleuré. Etant dans un magasin, je n’étais plus libre de modifier mon prix de vente. En salon, libre donc de fixer le prix que je veux, j’aurais évidemment proposé cet ouvrage à prix réduit. Ne l’aurais-je pas blessée ? Cela m’est déjà arrivé.

 

Alors là, de tels revenus ! Quelle honte ! Quel scandale ! Comment est-ce possible ? Ces gens sont des criminels. Oui, je dis bien des criminels.

 

Savent-ils la misère de certaines personnes en France, leur détresse ? J’ai travaillé à la Banque Alimentaire, dans des épiceries sociales, chez Emmaüs : je sais de quoi je parle. Comment laisse-t-on faire de telles horreurs ? Ma parole, nous voici de retour au temps des grands seigneurs. Aucune vergogne. Ils se foutent totalement du peuple des travailleurs, des petites gens.

 

Il y avait débat, comme chaque soir sur France Info. « Que pensez-vous de cette retraite de Monsieur Mestrallet ? » a demandé l’animateur à ses invités (des journalistes, un écrivain, que sais-je encore ?).

Pas un ne sembla scandalisé. Mieux, l’une de ces invités estima qu’en effet, il serait judicieux qu’il y ait une explication publique pur clarifier les choses. Les gens ont besoin qu’on leur explique. Alors ils peuvent admettre les choses si elles sont fondées, ils peuvent comprendre… »

Comprendre quoi ? Il n’y a rien à comprendre. Non, Madame. Vous avez tout faux. Il n’y a aucune explication qui tienne : c’est inadmissible, un point, c’est tout.

J’aimerais vous voir dans la misère, venir faire la queue à l’épicerie sociale ou aux restos du cœur, vous qui tenez ces discours insultants pour les pauvres.

 

Mais quand cesserons-nous de courber le dos ? Depuis des siècles, pauvres gens, vous êtes traités comme du bétail, et c’est de pire en pire. Il n’y aura pas de limite à l’appétit de ces vampires. Et qu’on ne vienne pas me dire que Monsieur Mestrallet mérite ces sommes faramineuses, par ses talents ou je ne sais quelle connerie.

Cela suffit !

Vous ne méritez qu’une chose, Monsieur : qu’on vous retire toutes vos richesses et vos biens afin que tout cela soit redistribué aux pauvres travailleurs, et que vous soyez obligés de prendre la pelle et la pioche par tous les temps, en pleine cagna comme au grand froid de l’hiver, pour tourner la bétonnière, porter les sacs de ciment, vous casser le dos et vous crevasser les doigts. Qu’en suite de quoi, vous n’ayez que la panade pour toute pitance, comme c’est le cas pour tant de pauvres gens en ce moment.

On a le culot de nous parler d’austérité, de crise, d’augmenter nos impôts, de tout faire payer très cher, sans pour autant augmenter les salaires et les retraites, et Monsieur s’offre pour lui tout seul ces sommes vertigineuses ! Mais si encore il était le seul ! Mais ils sont tous comme ça, ces messieurs de l’élite financière.

Quant à vos députés, Mesdames et Messieurs du Peuple, je vous le dis, ils ne valent pas mieux. Vous ne les élisez que pour les engraisser à ne rien faire. Pardon, ils votent des lois. Oui, en effet, ils se votent des lois, pour eux. C’est ainsi que ces porcs s’engraissent sur votre dos : renseignez-vous : qu’est-ce que la « réserve parlementaire » ? De l’argent donné à ces messieurs par l’Etat (non imposable, s’entend), sans aucune contrepartie, pour s’acheter des résidences secondaires ou tout autre bien.

Ah ! Il fait bon être député ou grand patron en ce moment. Ou footballeur. Oui, je considère en effet particulièrement insultant pour un travailleur qui peine pour gagner à peine de quoi vivre, que l’on gagne autant pour taper dans un ballon et amuser les foules. Panem et circences…

 

C’est vrai : ces hauts personnages sont respectables, ils ont des tâches tellement compliquées, des responsabilités si lourdes…vous comprenez, il n’est pas possible de faire autrement.

 

Chaque maire vient de recevoir pour aller voter aux sénatoriales, une indemnité modeste, certes, variant de 50 € à 100 € selon l’éloignement du centre de vote. Faites les comptes.

 

Maintenant, essayez de monter votre entreprise. Artisans et commerçants, faites votre bilan. Je ne vous apprends rien. Entre le RSI, les taxes professionnelles et les impôts, le comptable et tout le tintouin, ne vous posez-vous jamais la question : mais pour qui je travaille ?...Que vous reste-t-il de votre argent durement gagné par votre travail honnête ?

Une chose m’étonne : comment n’y a-t-il pas encore eu la révolution ?

Moutons, réveillez-vous ! On vous égorge, on vous tond, on vous saigne.

De quel droit impose-t-on de telles injustices ? C’est tout simplement malhonnête, criminel, et inacceptable.

Peu importe ce que l’on pensera, ou ce qu’il pourra m’advenir (je suppose qu’on saura museler ma vindicte) : je suis dans le vrai, et vous le savez tous, vous qui constatez ces injustices comme moi : jusqu’à quand cela durera-t-il ? Jusqu’où iront-ils ?...

Et moi je vous dis que ma révolte est fondée.

Je suis ulcéré de tout ce gâchis. La Crise, la Crise, pour qui ?...Rassurez-vous, elle n’est pas pour tous, la Crise, et elle a bon dos…

23 000 000 €…

Souvenez-vous : 23 millions d’euros : et vous trouvez cela normal, vous qui me lisez en ce moment ?...

Pas moi.

À travers Champs N° 60

25 septembre 2014

Etonnante nature !

 

 

Je lisais pour vous – du moins celles et ceux d’entre vous qui ne lisent pas la revue scientifique Sciences & Avenir , c’est-à-dire tout au plus une petite poignée d’irréductibles…- une série d’articles sur les champignons. Bien sûr, c’est le moment d’en parler. Mais ce n’est pas du cèpe ou de la truffe dont je veux vous entretenir ce soir, mais d’un champignon aux mœurs que vous trouverez certainement barbares.

Ophiocordyceps unilateralis est son nom. Barbare, déjà. Il vit dans les forêts du Brésil et en Thaïlande.

Des fourmis charpentières (Campontus leonardi) y vivent également.

 

 

« Les champignons poussent sur la face inférieure des feuilles. Leurs spores contaminent les fourmis lorsqu’elles les traversent en cherchant leur nourriture » (sic D. P. Hugues, entomologiste américain qui les a observées et étudiées).

« Alors, la fourmi adopte un comportement des plus étranges : elle quitte la canopée et descend jusqu’à un endroit du tronc très précis, un peu au-dessus du sol, là où l’humidité atteint 94 ou 95 % et la température entre 20 et 30° C. Elle mord dans une feuille…et s’effondre, morte. Le champignon a pris le contrôle de son système nerveux pour la conduire là où les conditions lui permettent de fructifier : il produit alors des filaments autour du cadavre, puis un pédoncule pousse à l’arrière de la tête, qui va disséminer les spores. »

 

 

Que penser de Dame Nature, qui a créé des êtres qui ne sont – on le sait maintenant – ni des animaux, ni des végétaux, mais qui sont bel et bien un genre à part, capables de pirater le cerveau d’un animal pour le piloter là où ils pourront se reproduire ? Quelle cruauté, n’est-ce pas ?

Certes. Si l’on juge de notre regard d’humain. Vous savez que ce parasitage est assez courant chez les insectes. Chez les végétaux également. Eh bien, chez les champignons aussi.

Je ne veux pas donner ici un cours de mycologie (j’en suis incapable, je n’y connais rien, et je n’en ai nulle envie), mais simplement réfléchir à ce phénomène extraordinaire, en apparence, du moins.

Voici des êtres privés quasiment de tout ce que nous possédons et qui fait notre « supériorité » sur les autres êtres vivants de la planète : les sens, l’intelligence (qu’est-ce au juste que l’intelligence, au regard de certains phénomènes de ce type, finalement ?...). Et voilà qu’ils montrent des comportements qui paraissent découler d’une volonté, d’une détermination implacables, totalement dénuée de pitié (pour cela, encore faudrait-il qu’ils aient une âme…). Voici donc de quoi remettre en cause nos notions fondamentales, non ?

 

 

J’admire au passage qu’on puisse faire de telles découvertes : quelle patience, sans doute, que d’ingéniosité a dû être éployée de la part de ces savants pour en arriver à ces constats effrayants et riches d’enseignements !

 

 

Je ne résiste pas à vous livrer cette autre scène d’épouvante.

Certains d’entre nous ont une sainte horreur des araignées. Sachez que la tarentule qui vous paraît peut-être si cruelle, peut à son tour succomber aux attaques de Cordyceps ignota, une espèce tropicale de champignons. Ses spores percent l’exosquelette de la tarentule, le mycélium envahit peu à peu les parties internes de son hôte jusqu’à sa mort. Il peut alors fructifier : de spectaculaires appendices poussent sur le cadavre de l’araignée.

Vous savez aussi bien que moi que nous aussi, humains, sommes parfois colonisés par des champignons…Faites de beaux rêves !

 

 

Ce hors-série sur les champignons est passionnant.

 

 

Imaginez maintenant que vous ayez un champignon dans le cerveau. Il pourrait peut-être vous amener à des conduites ou des actes complètement aberrants. À votre insu, bien entendu.

Ces êtres sont manifestement très étranges. Non, rassurez-vous, ce ne sont pas des envahisseurs venus de l’espace. Quoique…Qui sait ?...

En fait, nous sommes chacun un univers qui véhicule des quantités incroyables de microorganismes parasites. Il y a également sur ce sujet dans ce HS un article sur le paresseux (l’aï, ou bradype) qui est des plus surprenants : il cache en sa fourrure tout un monde d’algues, de bactéries, et de champignons. Tout ce monde vit en symbiose, chacun y trouvant son profit, l’aï lui-même profitant des services que lui rendent certains de ceux-ci.

 

 

Le monde du vivant, sur notre planète, n’a pas fini de nous étonner. Nous n’en connaissons finalement qu’une infime partie. Nous en détruisons quotidiennement des quantités qui demeureront à jamais inconnues de nous. Et nous en sommes déjà à explorer la vie que l’on devra fatalement découvrir dans les exo planètes que les moyens techniques récents permettent à peine d’appréhender !

Décidément, que l’humain est déconcertant ! Toutes ces découvertes, tout ce que nous ignorions il y a encore quelques décennies !…Et toute cette barbarie qui explose au sein de nos sociétés humaines ! Que de contrastes, je trouve. Quelle étrange créature que l’homme !...

 

 

Il semble que le rythme et le nombre de ces découvertes croissent à vitesse exponentielle : c’est proprement vertigineux !

Je suis, à la vérité, entre admiration et stupeur. Ce monde n’a plus grand-chose à voir avec celui de mon enfance, je le vois bien, et c’est normal. Mais enfin, cette masse gigantesque de connaissances qui ne cesse de croître à la façon de certains champignons, en tous sens et envahissant tous les secteurs de notre société, ce mouvement à l’évolution anarchique et chaotique, comme un gigantesque maelström, où nous mène-t-il ?...

 

 

Je finirai sur une note plus humoristique. Le numéro de S&A de ce mois, qui n’a rien à voir avec le HS sorti en même temps dont je viens de parler, porte le titre suivant : « On peut prévenir Heilzheimer ».

Et moi, sottement, lisant cela, j’ai pensé : « …mais de quoi ?... »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À travers Champs N° 58

05 septembre 2014

…et pendant ce temps-là…

 

Oui. Je vous parlais ce matin de ce livre pondu par l’ex-première dame de France. J’ai dû me laisser entraîner quelque peu dans des digressions inopportunes. Pardonnez-m’en. En vérité, je regrette de m’être laissé accrocher par cette actualité brûlante. Car je réalise que depuis quelque temps, quelque chose me tracasse. Je vous le confie. C’est peut-être moins important que l’actualité d’hier et d’aujourd’hui qui fait la une de tous les journaux et l’affaire des éditeurs et des libraires, mais tout de même, parlons-en un peu, car il me semble que cela mérite aussi qu’on s’y attarde.

 

Je veux parler du reste de l’actualité, tout aussi importante.

Le mercato de football. Quoi ! Vous me croyez devenu fou ? Mais pas du tout. Je suis sérieux. Il faut aussi parler du mercato. C’est important, de savoir quel joueur a quitté quel club et pour quel autre club. Surtout de connaître le montant de la transaction. Vous comprenez, c’est une marchandise ultra précieuse, un joueur de haut niveau. Et plus un cheval est rare, plus il est cher. Oui, je sais, ce n’est pas la même bidoche. Mais enfin, il a un prix, non ? D’ailleurs, ce prix ne vous fait-il pas rêver ? Avouez-le, vous ne gagnerez jamais de quoi vous le payer. Ni même autant que ce qu’on lui donne pour son salaire. Moi je rêve. Et si je rechaussais les crampons ? Hein ? Qu’est-ce que j’entends ? Je suis trop vieux ?...Ah ! Ça se peut bien. Alors, tant pis pour moi. Mon beau rêve s’écroule. Non, je rigole. Je m’en bats l’œil du foot et de ses trafics, et des millions de fans agglutinés comme des mouches sur leurs écrans, les pieds dans leurs charentaises.

 

Non. Je voulais juste faire remarquer qu’un certain humoriste de couleur (remarquez que je ne dis pas de quelle couleur, comme ça je ne heurte personne) vient de commenter une vidéo des coupeurs de têtes de l’Etat islamique : « la décapitation symbolise le progrès, l'accès à la civilisation», a-t-il dit. Ben oui, quoi. Il fallait oser. Oui, en effet, désormais on peut tout penser, tout dire.

Comme, je l’espère, 99.9% des gens « civilisés », j’ai découvert avec stupéfaction et horreur que, de nos jours, on pouvait encore décoller les chefs de sang froid. Et, comble de l’horreur, filmer ces scènes de barbarie que je croyais depuis longtemps révolues. Il est vrai que la guillotine a fonctionné à tour de bras sous la Terreur en France, et, tout bien réfléchi, c’est encore proche. La sinistre invention du Docteur Guillotin ne cessa en fait de fonctionner qu’en 1977.

 

Nous voici donc de retour aux temps barbares. J’ai peine à comprendre les motivations des hommes (méritent-ils encore ce titre ?) qui passent à l’acte aussi froidement, en imprimant délibérément à leur main le mouvement et la force propres à trancher la gorge d’un autre homme, qui plus est, un innocent. Que l’idéologie peut être dangereuse ! Où mènent ces excès de religion ? Je ne puis m’empêcher de penser sans frémir à toutes les guerres de religion que la litanie de l’histoire nous apprend, et que je vous épargnerai ici ce soir.

 

Pendant que l’on s’agite autant autour du brûlot de Madame TW, des mômes continuent de se tuer à la kalachnikov dans nos banlieues. Après tout, me direz-vous, ce ne sont que des dealers. Ce n’est pas mon avis. Déjà, je m’inquiète de voir à quel point on en est rendu dans ces zones à part. Est-ce normal ? Comment en est-on arrivés là ? N’y a-t-il donc rien à faire pour que ces jeunes retrouvent une vie « normale » ?...Mais c’est quoi, de nos jours, une vie normale ?...

 

Pendant ce temps-là, en Syrie, on continue d’assassiner à tour de bras, sans que cela ne dérange outre mesure les nations (au fait, ce n’est pas une affaire de religion, cette fois ?...).

 

Pendant ce temps-là, un malade s’approprie des territoires par la force, au mépris de tout respect des lois internationales, comme au temps des tsars : ne rêverait-il pas, au fait, de devenir l’Empereur de toutes les Russies, comme dans un « glorieux » passé ?...

 

Pendant ce temps-là, des américains débiles décident de se rebeller contre les empêcheurs de polluer en rond, et s’ingénient à ajouter au carburant des ingrédients des plus toxiques, pour faire sortir des pots d’échappement de leurs énormes pick-ups une fumée la plus noire et la plus polluante possible. Si si. C’est vrai. Notez qu’à côté du reste, c’est une rigolade.

 

Pendant ce temps-là, mais on n’en parle que pour se donner bonne conscience, nos journalistes énumèrent quotidiennement le nombre croissant des victimes du virus Ebola. C’est en Afrique ? Ah bon ! C’est loin, l’Afrique. D’ailleurs, on ne risque pas d’avoir ça chez nous : on a bouclé les frontières. Il n’y a plus qu’à attendre la fin de l’épidémie. Ah ! cher ami, cher Docteur ! Si vous pouviez lire ces lignes, je sais ce que vous me diriez, vous, membre actif de Médecins sans Frontières, à qui l’on interdit désormais de partir là-bas soigner les enfants qui meurent de faim et de maladie…puisque les risques d’enlèvement des humanitaires sont si grands…

 

Pendant ce temps-là…

Mais à qui bon, n’est-ce pas ? Si ça se trouve, je vous dérange ? Je comprends. Retournez à vos supermarchés, votre foot, et vos idoles de carton-pâte.

Panem et circenses[1]…Vous n’avez rien inventé, dirigeants de ce monde qui, dans l’ombre, tirez les ficelles.

XXIème siècle. Plus de deux mille ans après le Christ, je considère notre monde…Il va bien…

Pendant ce temps-là, on découvre que très longtemps avant l’apparition de l’humain sur son petit canot de survie au milieu du cosmos, une planète trois fois grosse comme Mars, que nos scientifiques nomment Théïa,  vint à percuter ce caillou de plein fouet, donnant naissance à la Lune.

C’est pas beau, ça ? Pendant que certains s’amusent, que d’autres s’entretuent, il en est pour poursuivre des recherches afin d’assouvir une curiosité sans pareille. Au moins, ceux-là ne font-ils de mal à personne.

Mais à quoi bon, au fond ?...

A quoi bon ce chaos, ces contrastes, ces abysses entre le Bien et le Mal ?...

A quoi bon ma révolte ?...

A quoi bon ?...

Je vous livre ma réponse : c’est absurde, irrémédiablement absurde…

 

 

[1] Du pain et des jeux : devise des empereurs romains ; si vous ne connaissiez pas, je vous invite à découvrir l’explication sur wikipedia….ou le dictionnaire papier…

 

 

À travers Champs N° 58

05 septembre 2014

« Merci pour ce roman »…

 

Voici venue l’heure des règlements de comptes.

Evoquer ce torchon de cette journaliste ex-première dame de France ne pourrait que pousser mes lectrices et mes lecteurs, qui sont certes moins nombreux que les siens - j’en pâlis de jalousie, évidemment… - vers l’achat de ce qu’il faut bien nommer un livre : son livre. Mais elle en ternit le symbole. Pour moi, le Livre a toujours été lié à quelque chose de noble. Ici, on en est loin. Autant, sincèrement, je n’ai cure de ce couple et de ses démêlées intimes, autant me répugne la démarche. Mais ce qui me répugne davantage encore, c’est, après la complicité sournoise des médias, la réaction de masse des gens : cette ruée sur ce brûlot a quelque chose d’écœurant. Ne vivons-nous donc plus que pour les « peoples » ? Pour la gourmandise des photos intimes volées par les paparazzis ? Pour les croustillantes révélations sexuelles des couples célèbres ?...Dans quel monde sommes-nous ?

J’imagine qu’à l’heure où paraissait hier cet ouvrage (qui n’a rien d’un ouvrage d’art), bien de véritables auteurs devaient être révulsés, ou atterrés. Déjà, le business du livre est cruel : il ne retient dans son tamis aux mailles fines que les meilleurs (et c’est bien normal), disons, pour être plus exact, qu’il ne retient que ce qui se vendra bien, et qu’on galvanisera à coups de pub tapageuse (« les nuances de … » en est un exemple flagrant : on vous vend de la crotte, mais puisque  l’on vous dit que c’est excellent…), que ce qui est labellisé et qui a fait ses preuves commerciales. Déjà l’innombrable cohorte des obscurs romanciers qui galèrent dans le noir (sans assertion particulière) et qui ne perceront jamais se désole de n’avoir aucune visibilité, mais il se confirme que les réseaux sont saturés : les éditeurs qui ont pignon sur rue n’ouvrent leurs bras qu’aux célébrités, pseudo-écrivains, ratés de la télé en mal de gloire. Je pense à certains présentateurs vedettes du petit écran, à certains sportifs à la retraite (ou pas, d’ailleurs), certaines stars éphémères d’émissions de télé-réalité,…qui, le plus souvent dédicacent sans vergogne des livres qu’ils sont incapables d’écrire eux-mêmes, et que d’obscurs « nègres » - j’en connais – leur ont pondu. Je n’ai grief contre ces derniers, qui doivent bien gagner leurs picaillons…mais contre ce système pourri. Voir des colonnes d’admiratrices et -eurs béats piétiner des heures durant pour obtenir la signature de leur idole en exergue d’un livre qu’ils ou elles ne liront sans doute jamais, au nez et à la barbe de l’assemblée silencieuse et médusée des « petits » auteurs, dont je suis, me sidère. Combien de fois ai-je assisté à cet affligeant spectacle, au salon de Montmorillon ou de St Cyr sur Loire, ou ailleurs ! Pourtant, je sais, pour les avoir découvertes, les pépites qui se cachent dans les rangs de ces obscurs acharnés du clavier (il y a belle lurette que la plume, et c’est tant mieux pour les oiseaux, est remplacée par le stylo, lui-même détrôné par le clavier numérique).

Vous penserez que je me range dans ces rangs ?...Pas du tout. Je veux simplement dire que j’ai découvert en fouinant dans le fouillis de la profusion de mes consœurs et confrères de salons littéraires quelques rares livres dignes d’être élevés au pinacle.

J’en cite quelques-uns dans ces pages : cherchez, vous trouverez.

Mais vous n’y trouverez pas les usurpatrices et –eurs, pas les faussaires, les champions du « copier-coller »…pas les peoples reconvertis en pseudo-auteur(e)s.

 

J’aurais trop honte, à leur place. Ne leur suffisait-il pas d’avoir été ce qu’ils sont ?...de piètres personnages, bien falots, bien inintéressants ? (Je les côtoie parfois dans ces salons : je puis vous assurer, et les personnels des librairies qui les reçoivent vous le confirmeront, qu’ils ne sont guère corrects, souvent fort désagréables, prétentieux, exigeants, autoritaires, et méprisants). Certes, il est des exceptions. Plutôt rares, à vrai dire.

C’est l’époque, m’allèguerez-vous ? Sans doute, mais de tous temps il en a été de même. Souvenez-vous de l’âne qui emporta le premier prix dans un grand salon de peinture. Les gens ayant de la peine à juger d’eux-mêmes de ce qui est bon ou pas écoutent, les yeux ronds, les prêtres de l’Art qui, eux, savent. Ils ont besoin d’être guidés, par le bout du nez, et qu’on leur dise : voyez, ça, c’est beau, ça, c’est sublime…Incapables, pensent-ils, de juger par eux-mêmes, ils suivent et répètent sottement : »J’ai lu ça, c’est super ! Tu devrais le lire… »

Et moi je prétends que tout un chacun(e) est en mesure de décider de ce qui lui convient ou pas : il lui suffit d’écouter son cœur, sa raison. Ne sent-on pas dès l’abord si l’auteur(e) est sincère ou pas, intéressant ou pas, si elle ou il vous touche ou pas ?...Il n’est pas d’autre guide.

 

Enfin, tout éditeur est coupable de publier des torchons, de publier des tapuscrits entachés de fautes d’orthographe, de syntaxe ou de vocabulaire : il dessert notre belle langue. Par contre, croyez-moi, il s’enrichit. Savez-vous qu’il ne revient, dans le meilleur des cas, qu’entre 5 à 7 % du produit de la vente d’un livre à son auteur ? Bien sûr, me répondra-t-on, il y a la « chaîne du livre » : le correcteur ( !!!...), l’éditeur, qui, normalement, prend le risque d’éditer l’auteur – mais il ne prend guère de risque, de nos jours -, l’imprimeur, le distributeur, le libraire (et encore, j’en passe : j’ai simplifié ; si vous saviez par où doit passer l’auteur(e) afin de voir son « manuscrit » accepté dans une maison d’édition de renom : on lui change son titre, certaines expressions, etc, etc… ; il faut bien payer ces gens qui vous infligent ces sentences)…

Voilà aussi pourquoi j’ai décidé d’éliminer les intermédiaires, et que je me déplace sans cesse pour faire connaître mes œuvres seul.

Oui, je suis seul, comme beaucoup d’autres. Seul pour écrire mes textes (sans copiage ni copillage et sans nègre, mais là, je n’ai pas les moyens de m’en payer, ni le goût, ni l’intérêt, ni le besoin…) ; seul pour la mise en page ; pas seul pour la correction (je me paie un vrai correcteur en chair et en os et pas un logiciel de crotte) ; pas seul pour l’impression, puisque je fais travailler un artisan français de mon département, une entreprise pas chinoise ni italienne ou espagnole. Seul pour trouver des lieux de vente (là aussi ce n’est pas triste ; il faut savoir avaler des couleuvres ; le ton de mépris qu’on adopte souvent avec moi a de quoi vous décourager définitivement de publier, que ce soit dans les librairies ou dans ces grands temples silencieux et vides que sont les médiathèques et bibliothèques des grandes métropoles,…ou des moins grandes mais qui se la pètent…)

Mais j’assume : la mévente comme le relatif succès de mes Âneries, les fautes, quand il en reste, et ne puis m’en prendre qu’à moi-même.

Lectrice, lecteur avisé, applique ton discernement !...

 

 

À travers Champs N° 57

28 juillet 2014

De la guerre à l’amour…

 

Je veux ce soir vous rendre compte du discours de Benyamin Netanyahou, 1er ministre de l’état d’Israël, qu’il donna ce jour. Enfin, je veux dire, pas celui qu’il a prononcé pour de vrai sur les ondes, l’autre…

 

« …et c’est pour ça que je déclare la guerre entre Israël et l’Etat de Palestine enterrée à ce jour. Nos avions ne bombarderont plus jamais votre territoire. Nos chars ne feront plus jamais d’incursions sur votre territoire. Nos soldats ne tourneront plus leurs armes vers vous. Car nous, Peuple d’Israël, vous considérons désormais comme nos frères. N’avons-nous pas le même Dieu ? Priez-Le selon vos rites, et nous Le prierons selon les nôtres. N’a-t-Il pas voulu la paix entre les êtres humains ?

 

Des siècles durant, nous avons été l’objet d’ostracisme, de haine, et l’on nous a persécutés : gardons-nous d’avoir la mémoire courte. Nous possédons désormais un territoire : ayez le vôtre. Ce n’est que justice. Que gagnerions-nous à prolonger indéfiniment cette guerre entre nos peuples ? À compter d’aujourd’hui, nous vous restituons toutes les terres indûment colonisées. Que celles et ceux d’entre vous qui souhaitent vivre sur nos terres soient les bienvenus, et acceptez aussi que les nôtres qui le désirent s’en aillent vivre chez vous. Que les filles de votre peuple qui le désirent se lient par les liens du mariage à nos fils. Que vos fils qui le désirent s’unissent par les liens du mariage à nos filles.

Je ne dis là que les paroles que m’a inspirées Dieu, le nôtre, qui est aussi le vôtre, et qui s’exprime ainsi par ma bouche.

Que s’élèvent des deux côtés de la frontière des lieux de prière pour votre peuple et pour le nôtre.

Que vous puissiez compter sur notre aide pour faire prospérer votre pays, comme nous pourrions compter sur la vôtre le cas échéant. Soyons dans le partage, et non dans le déchirement.

Vivons en paix, mes frères. Que le bruit des armes cesse sur-le-champ et à tout jamais. Souvenons-nous de nos souffrances pour ne plus jamais faire souffrir les frères que nous sommes et unissons nous.

 

Sans doute plus d’un, à l’écoute de ce discours, sera-t-il ébahi. Mais cette nuit, j’ai eu la vision d’un monde déchiré par la haine et la fureur de tuer son prochain. C’était un monde de chaos, une vision apocalyptique où ne régnaient que la violence et l’appât du gain. Un monde de souffrance, de pleurs, de cris, qui menait à la disparition de l’espèce humaine.

Alors une seconde vision s’est superposée à celle-ci, qui montrait un monde heureux, de paix, de sérénité, où les humains s’aimaient et partageaient, dans la concorde. Et cette vision m’a réjoui le cœur, et je veux être le premier contributeur à la construction de ce monde de lumière.

Souvenez-vous d’Averroès et de Cordoue. Vers l’an mil, cohabitaient en cette cité, en parfaite harmonie, nos trois grandes religions monothéistes. Quant à cet immense savant, il fit le lien entre le monde arabe et le monde occidental : nous en sommes tous les héritiers. Quels magnifiques exemples pour l’humanité !

Mes frères, œuvrons tous ensemble désormais pour construire un monde meilleur, où les enfants ne mourront pas sous les bombes.

 

À compter d’aujourd’hui, que soit une ère nouvelle, de concorde et de paix sur toute la planète. Que les sommes d’argent investies dans nos armées et nos armes soient mises à disposition de tous pour bâtir des hôpitaux et des écoles, et des logements dignes pour tous. La tâche est immense, mais exaltante.

Pardonnez-nous nos erreurs, comme nous pardonnons les vôtres. Et soyons dans le partage désormais. Faisons taire nos egos. N’est-ce pas plutôt cela que Dieu attend de nous ?... »

 

Bon, d’accord, ce n’est pas tout à fait ce que j’ai entendu, mais bien plutôt ce que j’aurais aimé entendre…comme tant d’autres sur cette Terre ! Hélas, non ! Benyamin Netanyahou n’a pas été touché par la grâce.

Extrémistes de tout poil, antisémites, islamophobes, vous allez me condamner, sans doute, pour ce discours, n’est-ce pas ?...Que m’importe ? De plus en plus de voix s’élèvent contre vos pensées racistes qui ne mènent qu’à la destruction, à la violence, au chaos. L’avenir de l’humanité réside en sa capacité à faire taire les ego, à répartir équitablement les richesses, à aplanir les injustices et les privilèges…Il faudra bien qu’elle y parvienne, sous peine de disparition définitive.

 

« Un jour, un jour viendra, couleur d’orange… »

 

Je rêve, oui, assurément. C’est le propre des poètes, de rêver, non ? Mais sachez que le rêve nourrit l’humanité et c’est lui qui la fait évoluer. Sans lui, que sommes-nous ? Le rêve m’est autant nécessaire que l’air que je respire, que l’eau que je bois, ou que l’amour…

Voilà, le mot est lâché : l’Amour…

À travers Champs N° 56

7 juillet 2014

Des rapports entre l’humain et l’animal

 

Je me suis posé la question : « Pourrait-on essayer d’établir un bilan des rapports de l’humain avec l’animal ? »

Vaste question.

Je voudrais tenter d’y voir clair.

 

À l’origine, l’humain, plus près de la bête que de l’homo sapiens, vivait en prise directe avec la nature : chasseur, pêcheur, cueilleur.

On sait qu’il dut sa survie aux animaux : il se nourrit de sa chair, il se couvrit de ses pelisses. Alimentant ainsi son corps en énergie, il évitait de la perdre par le froid. Il semble donc naturel de penser qu’il considéra très tôt exclusivement l’animal comme une proie. Tout au long de son évolution, ces deux sortes de prélèvements sont devenus naturels. Cela ne s’est pas perdu : nous chassons et nous pêchons toujours pour nous nourrir, et nous utilisons les fibres animales pour nous protéger du froid (duvet, laine,…).

 

Au cours de l’évolution, l’humain a découvert l’élevage. Ainsi, au lieu de suivre les troupeaux dans leurs déplacements, il devint sédentaire (soit dit en passant, l’on touche là aux origines du sens de la propriété foncière, avec la notion de territoire, et la possession de troupeaux. De bonnes raisons de se battre, pour défendre son territoire et ses biens…).

Il découvrit également tout le profit qu’on peut tirer de la force animale (domestication du cheval et du bœuf), ou de ses qualités naturelles dans le domaine de la chasse (chien, faucon…). Ainsi apparaissent les animaux domestiques et familiers.

Enfin, parmi ceux-ci, notons qu’il en est qu’il apprivoisa pour son plaisir (chats, entre autres).

Il n’est pas niable que le chat ou le chien apportent un réconfort à leurs maîtres. Pour l’enfant, de tous temps, ces rapports affectueux l’ont aidé dans ses apprentissages et ses consolations. En Égypte ancienne, déjà, les chats étaient présents auprès des hommes, les faucons aussi. Au Moyen-Âge, c’étaient les genettes qui avaient droit de cité au château.

Je serais incomplet si je ne parlais pas de la zoophilie. La Bible la condamnait, donc ces pratiques existent depuis la nuit des temps.

 

Mais l’aspect qui m’intéresse ici, c’est plus précisément le rapport entretenu par l’homme à la souffrance de l’animal.

Car, dès le début, pour se nourrir, il fallut tuer : cela n’a pas changé. Nos lointains ancêtres avaient-ils des états d’âme ? A priori, on serait tenté de répondre : non. Il n’y avait guère de place pour le sentiment, dans un monde cruel et sans pitié, où la mort était le quotidien : celle que l’on devait donner, et celle qui rôdait, prête à frapper à tous les instants, sous la forme du tigre à dents de sabre, ou de n’importe quelle bête fauve. Et il n’en manquait pas. Tuer ou être tué : ce devait être la préoccupation constante de nos ancêtres. Il ne devait donc rester que peu de place pour la sensiblerie.

 

Je me souviens, étant enfant de la campagne, que l’on tuait couramment de la volaille pour se nourrir (on me dit d’ailleurs que cela a toujours cours). C’était usuel, et là encore, il restait peu de place pour les scrupules, encore moins pour les remords. Idem pour le cochon.

Si l’on n’était pas acteur des meurtres, du moins ces spectacles fréquents d’assassinat animal n’échappaient pas aux spectateurs que nous étions. Cette familiarisation avec la mort donnée couramment pour se nourrir la rendait banale, naturelle. Évidemment, certaines personnes plus sensibles répugnaient à passer à l’acte. Il me souvient d’un temps pas si éloigné où l’on devait éliminer les chatons, sous peine d’être envahis par une nuée de chats (ça arrive encore…). Cela aussi était banal. Pas pour moi, cependant : Dieu ! Que j’ai été malade de devoir accomplir cette sinistre besogne ! Surtout la première fois ! Je n’y ai jamais pris plaisir et ne me suis jamais insensibilisé au fil du temps.

Notons que si donner la mort à un animal peut paraître cruel à bien des égards, la nécessité fait loi. Il n’en demeure pas moins, hélas ! qu’il est des gens sadiques, qui prennent plaisir à faire souffrir les bêtes et que les contingences de l’élevage intensif nous amènent à imposer aux animaux destinés à être mangés (ou promus aux essais de laboratoire…) des conditions de vie ou de fin de vie cruelles.

 

Les mentalités évoluent. De nos jours, généralement, on répugne de plus en plus à tuer ou à faire souffrir l’animal, et c’est tant mieux.

Pourtant, ne soyons pas si hypocrites. Ignorez-vous les massacres perpétrés chaque jour dans le plus grand silence ? Vous ne voyez pas ce à quoi je veux faire allusion ?

Alors, venez avec moi au supermarché. Rayon boucherie, volailles, poissonnerie, si vous voulez bien.

Vous aimez le canard ? Délicieuse, cette chair saignante sous la peau bien grasse. Je vous rappelle qu’il existe des abattoirs où l’on exécute ces pauvres bêtes en série. J’en ai visité un un jour : édifiant. La chaîne. Pour rentabiliser l’opération. Des crochets qui avancent. On tue, on plume, on vide, on découpe à longueur de journée, dans l’indifférence générale[1]. Le foie gras aussi est excellent : savez-vous le supplice infligé aux volatiles pour le gavage ?...Renseignez-vous un peu. Je peux aussi vous parler des élevages industriels, où les poulets vivent serrés dans une promiscuité atroce, à la lumière des lampes électriques, dans des stress intenses permanents. Je pourrais aussi évoquer les stabulations libres, où les veaux ne connaîtront jamais l’herbage des prairies. Des élevages intensifs de truite…Je n’évoquerai même pas le problème de leur nourriture, ni celui des antibiotiques dont on les gave.

 

C’est vrai : si encore ils connaissaient des conditions de vie normales, ce serait plus acceptable.

Mais, vous avez compris : nous mangeons, comme nos ancêtres, de la chair animale pour nous nourrir. A ce point de ma réflexion, je ne fais pas de différence entre un chasseur et un tueur d’abattoir. Au moins, la chasse semble être un héritage génétique et culturel du passé. Bien que, à l’origine, l’humain n’avait pas l’usage des fusils.

Au fond, le souci, c’est que nous devons manger de la viande. Quoique…Bon nombre de personnes s’en passent sans que cela ne les rende malades. Bon nombre d’entre nous ne mangent pas de la viande tous les jours, car son prix est discriminant. Mais, vu le nombre de bouches à nourrir, les bêtes n’ont pas fini de nous être asservies. Avec les corollaires qui apparaissent : pollution, coût de production, etc…

 

Pour tenter de contourner le problème, on envisage sérieusement de nous faire bouffer des asticots. Pour les vers de terre, c’est déjà courant (dans les steacks hachés de chez Mc Do, paraît-il ; mais ne hurlez pas, c’est très sain). Finalement, ce n’est qu’une question de culture. Je ne développe pas ce point-là (songez à toutes ces bêtes que certains mangent, et dont les autres répugnent : escargots, cuisses de grenouille, chien, cochon d’Inde, sauterelles, etc…).

On cherche aussi à fabriquer de la fibre musculaire en laboratoires…Si si ! Et le plus fort, c’est que ça fonctionne !

Et puisque j’évoque les laboratoires, je ne puis omettre d’évoquer les conditions de vie de ces milliers d’animaux encagés pour servir la science (voyez la photo).. Je ne résiste pas à la tentation de vous citer quelques extraits d’un article scientifique (tiré, toujours, bien sûr, de S & A).

 

« À Strasbourg, une usine à souris produit à la demande des animaux génétiquement modifiés afin d’étudier le stress, le cancer ou le diabète…Réparti sur quatre niveaux et 6000 m2 de locaux, il se divise en trois départements : animalerie, création de nouveaux modèes et phénotypage[2]…Cent dix personnes y travaillent. Au plus fort de l’activité, l’effectif atteint les 50 000 souris.

" Chaque année, nous créons entre 70 et 80 modèles".

La palette des modifications génétiques s'avère pratiquement sans limites…Tout récemment, des chercheurs japonais ont même développé des souris fluorescentes qui se mettent à briller dès qu'elles sont soumises à un stress… »

 

Ainsi, pour l’amélioration de nos conditions de vie, nous ne pouvons nous priver de ces animaux destinés à l’expérimentation. C’est pour la bonne cause.

Dans les zoos (enfin les parcs animaliers), les animaux sont privés de liberté[3], parfois derrière des barreaux.

Quant aux animaux « sauvages » (il y en a encore un peu), on les parque dans des réserves. Au fond, il ne reste d’autre choix à la faune sauvage que de survivre confinée dans des réserves ou de s’adapter à l’environnement que l’homme a façonné sur la planète. Un peu tristounet, n’est-ce pas ?

 

Du coup, les oiseaux se sont adaptés, pour certaines espèces ; on trouve des faucons crécerelles en ville, paraît-il. Je ne veux pas entamer le recensement des espèces sauvages encore existantes et de leurs adaptations. Je voulais juste attirer votre attention sur ces points.

 

À penser seul, on risque d’oublier des éléments propres à alimenter son propos. C’est dommage. En cela la discussion est supérieure au soliloque Elle permet d’être plus complet, de ne pas trop dire de bêtises (c’est ce que je fais en ce moment, je crois…). Mais au fond, quoi de grave à dire des bêtises ? C’est-à-dire des choses dignes des bêtes, au sens étymologique du terme ?…Des âneries, en quelque sorte ?... La bête en nous n’est jamais très loin …

 

À propos d’âneries, vous qui me connaissez désormais un peu, vous savez quels rapports de tendresse nous unissent, mon âne et moi ? Mon bouc aussi a fini par m’apprivoiser. Quant à ma chienne, qui me suit comme mon ombre depuis des années, inutile de vous expliquer les liens qui nous attachent. Les exemples de ces rapports exceptionnels de tendresse, d’intelligence, de connivence, avec les bêtes fourmillent à travers l’histoire de l’humanité.

De cela et de ce qu’ils préfèrent les caresses aux coups de bâton, je conclus que les animaux ne sont pas insensibles, non plus au plaisir qu’à la douleur…De là à penser qu’ils ont une âme, il n’y a qu’un pas. Alors, s’ils ont une âme, j’imagine que le jour où nous leur donnerons la parole (nos savants y travaillent et ça avance bien), nous risquons d’être grandement étonnés de ce qu’ils auront à nous dire, particulièrement sur notre cruauté…

Je vous laisse…

 

[1]  Ce n’est pas tout à fait exact : nombre d’employés de ces entreprises d’abattage souffrent de dépression, parfois grave

 

[2] Là où sont évaluées et testées les souris mises au point.

[3] A la vérité, je me demande bien si les animaux vivant encore à l’état naturel sont si libres que ça : beaucoup voient leurs territoires rapetisser comme peau de chagrin, ou leurs ressources vitales s’épuiser ou disparaître, par la raréfaction de la variété des espèces végétales  que l’humain impose à son environnement…

À travers Champs N° 54

Mardi 3 juin 2014

 

Du monde du livre

 

« Allô ! Bonjour Monsieur. Je suis auteur. Je vous appelle afin de vous proposer une animation dans votre rayon livres, je pourrais éventuellement dédicacer mes ouvrages dans votre magasin, si cela vous intéresse… 

÷ Qu’écrivez-vous, Monsieur ?

÷ De la poésie, des contes, des nouvelles…

÷ Ah ! Je suis désolé, Monsieur. Mais je crains que nous n’ayons pas de clientèle pour ça… »

 

Surréaliste ? Non. Habituel. Deux fois sur cinq, c’est la réponse que j’obtiens à ma proposition.

 

Et moi je pense que…

Premièrement, mon interlocuteur a probablement raison, hélas ! dans les grandes lignes : la poésie n’attire pas grand-monde à l’heure actuelle. Il serait intéressant d’en rechercher toutes les causes, mais là n’est pas mon propos. Par contre, je prétends que si l’on n’offre jamais de poésie à l’ensemble de la population, évidemment, il n’y aura jamais d’amateurs de poésie, et l’on ne vendra pas de poésie dans le milieu du livre.

Deuxièmement, il est faux de dire qu’il n’y a pas de clientèle pour la poésie. Elle existe, mais il est vrai qu’elle n’est pas développée. Est-ce une raison pour la priver de toute nourriture ?

 

Enfin, je postule que si l’on changeait un peu les mentalités, les choses évolueraient dans un sens différent. Ainsi, donner de plus en plus à entendre ou à lire de la poésie devrait pouvoir élargir ce secteur de littérature. Encore faut-il que ladite poésie soit accessible au plus grand nombre, et non réservée à une élite d’initiés. Qu’elle ne soit pas absconse. Encore faut-il accompagner ce mouvement.

Je constate, suite aux nombreuses discussions que j’ai eues jusqu’à ce jour au cours des salons ou des séances de dédicaces avec des personnes de rencontre, que beaucoup d’entre elles sont sensibles à la poésie, mais que la plupart en sont découragées par l’hermétisme de celle-ci, qui semble être de mise de nos jours.

Je ne dis pas qu’il faut combattre l’hermétisme en poésie. Je dis qu’il faut aussi que toute forme de poésie puisse s’exprimer librement. Quand le plus grand nombre sera touché de celle-ci, rien n’empêche de mettre en place des actions d’ouverture vers l’abstrus ou l’intellectualisme, de sorte que toutes les formes de la poésie demeurent accessibles à toutes et à tous, et non une petite partie seulement.

J’œuvre donc tout naturellement vers la promotion d’une poésie simple, écrite avec des mots et une syntaxe accessibles de tous, dans un premier temps, pour réhabiliter l’idée même de la poésie.

 

Je suis frappé de voir comme les gens sont touchés à la fin d’un de mes récitals (je sais, c’est pompeux, mais je n’ai pas vraiment d’autre terme sous la main). Certes, c’est une manifestation de l’émotion née de l’atmosphère qui se dégage de ma poésie. Rien d’intellectuel là-dedans. Mais chacun s’y reconnaît, retrouve dans mes poèmes des situations qu’il a vécues, des sentiments qu’il a ressentis, des émotions qu’il a perçues, sans jamais pouvoir les exprimer. Et il semble que ce partage de l’émotion, des sentiments, des expériences vécues, nous rapprochent dans notre humanité.

 

J’ai lu un recueil d’un célèbre poète contemporain pris parmi d’autres, dont je tairai le nom, bien sûr : je n’y ai rien compris, et n’ai guère été touché. Je ne suis pas très intelligent, je le confesse, mais à ce compte-là, j’aimerais qu’on me dise combien de ses lecteurs ont accédé à ses messages (s’il y en a…), et je doute qu’il en ait fait florès. Les mots se suivent, arrangés en quatrains, sans rime – mais cela ne me choque pas, la rime n’est absolument pas, à mes yeux, une étape obligée - sans syntaxe, sans queue ni tête, et on cherche en vain un sens à ces textes. Parfois, au détour d’un assemblage de mots, des images surgissent, évocatrices, qui peuvent toucher mon cœur, mais si peu. C’est un peu comme si l’on s’ingéniait à se cacher derrière les mots : mais l’écriture n’est-elle pas avant tout communication, délivrance d’un message vers l’autre ?...Même si ce message n’a d’autre but que d’émouvoir, ou de faire comprendre quelque idée simple ?...Désolé, Messieurs les Poètes, mais je ne vous comprends pas et vous ne me touchez pas.

A quoi sert de publier un livre totalement incompréhensible au grand public et qui ne sera pas lu ?

Alors, est-ce moi qui suis dans le faux ?...Sans doute. Quelque chose m’échappe et je n’ai pas compris les règles du jeu.

Soit. Voilà ce qui m’a totalement consterné lors d’un salon de la poésie auquel on m’avait demandé de participer. Seules deux personnes, fort humbles d’ailleurs, ont su trouver le chemin de mon cœur : ce qu’elles avaient écrit et qu’elles offraient timidement au public – fort rare au demeurant – était beau, lumineux, simple, émouvant…Et elles n’affichaient pas outrageusement leur titre de poétesse, à l’instar de la plupart des Poètes patentés rassemblés ce jour-là…

Je suis poète par accident, si je puis dire. Je n’ai pas acheté ma carte de Poète. Je n’ai aucune prétention en la matière. Je suis moi, j’écris moi, voilà tout, sans ambition autre que celle de partager mes joies et mes peines avec mes frères et mes sœurs humains. Combien de fois m’a-t-on dit : « C’est beau, ce que vous écrivez ! Vous rendez-vous compte de la chance que vous avez de pouvoir écrire ainsi ?... »

Non. Je ne savais pas que c’était beau, ce que j’écrivais. L’est-ce vraiment d’ailleurs ? Ce que les uns peuvent trouver beau, d’autres ne le jugeront pas ainsi. Evidemment. Et c’est normal. Non, je n’avais pas réalisé la chance que j’avais de pouvoir écrire ainsi ce que je ressens, mes détresses et mes peines. Maintenant, je commence à comprendre un peu. Mais cela ne me monte pas à la tête : j’ai conscience de demeurer un piètre écrivain, un va-nu-pieds de la poésie, et je ne prétends à rien.

 

Au fond, quelle importance ? Je m’en suis détaché, je vous le dis. Que certains soient touchés de mes poèmes ou de mes chansons, tant mieux. Que d’autres n’y soient pas sensibles ne me choque pas : c’est dans l’ordre des choses. Mais pour en revenir à ma conversation téléphonique du début, comment en vouloir à ce chef de rayon d’une grande surface commerciale ? Ces cadres sont formés au management, à la vente…Ce qui compte ici c’est de vendre. Une autre réponse qui me fut faite un jour fut la suivante : « Vous êtes de la région ? Non ? Alors, désolée, mais cela ne nous intéresse pas. Nous ne vendons que des best-sellers et du régionalisme. » C’est vrai. C’est édifiant. Le rouleau compresseur de la culture…

 

Je voudrais ajouter un mot.

Afin de créer l’animation, les grandes surfaces du livre ou les organisateurs de salon invitent à tout coup un ou des « peoples ». Ainsi, ils sont sûrs de déplacer des foules. Oui. Business is business. Au fait, ce n’est pas forcément Musso ou Nothomb qu’ils vont inviter. Ce peut être aussi bien Poulidor, que Claveau (vous savez, « L’amour et dans le pré… »), ou Candéloro. Mais ces gens devant qui les files d’attente se font interminables pour obtenir une dédicace, ils n’ont pas écrit leur livre. Ils ont d’autres qualités, mais pas celle d’écrivain.

C’est quoi ce cirque ?...

 

Reste donc une seule solution : frapper à la porte des plus grands éditeurs afin de connaître un jour la Célébrité. Je dis bien célébrité, car, dans le monde de l’édition, un succès n’est pas forcément un gage de qualité… Sachez aussi que les droits d’auteurs sont plus près des 5% que des 10%, pour ces écrivains célèbres, comme pour les autres, qu’on leur impose souvent le titre de leur bouquin, qu’on leur fait modifier des paragraphes, quand on ne leur demande pas de réécrire leur manuscrit, afin qu’il soit plus « vendeur[1] ». Bref. Je refuse de me prostituer, comme je refuse qu’on mange la laine sur mon dos. Voilà pourquoi je m’édite moi-même. Notez que vous ne devriez cependant pas trouver trop de fautes (vocabulaire, orthographe, conjugaison, etc…) dans mes bouquins. Je vous le dois. Car j’ai le respect de mes lectrices et lecteurs. C’est normal. Par contre, c’est évident, je vends peu et ne serai jamais célèbre : deux objectifs qui me sont étrangers.

 

Quant à ma démarche d’aller vers le public des supermarchés, elle tient en peu de mots : je veux toucher les gens de ma poésie, afin de les ouvrir à la poésie en général. Je veux rendre la poésie accessible au plus grand nombre. Montrer que tout un chacun peut être touché par la beauté, qui n’est pas réservée qu’aux riches…. Dans ce monde de brutes, cela ne me paraît pas si absurde. Si tant est que quelque chose, en ce bas monde, ne soit pas absurde…

Utopique, bien sûr…Marginal, bien sûr…

Raison de plus.

 

 

[1] Relisez la fable de La Fontaine : Le loup et le chien, j’y aime beaucoup le cou du chien « pelé »…

 

 

À travers Champs N° 53

Mardi 27 mai 2014

 

De l’urgence

 

Sans doute avez-vous observé comme moi comme nous vivons dans l’urgence. Je dis « nous », peuples occidentaux…

Il semble qu’avec le temps, nos civilisations évoluent vers de plus en plus de complexité (ne serait-ce pas une loi de la nature ?...) et …d’urgence. On n’y gagne guère en sérénité, non plus qu’en sagesse, ce me semble.

Je suis « en retraite », belle expression galvaudée. Néanmoins, je suis en retraite aux deux sens du mot. Vivant seul (je veux dire, non comme un ermite mais sans autre être en partage en ma demeure que ma chienne), j’ai souvent l’impression d’être « en retrait » de la société des hommes et du bruit du monde. D’ailleurs, inutile désormais à celui-ci, on ne me sollicite guère, et je le lui rends bien.

 

Ainsi, tel ces nobles Burkinabés assis sous les nérés, méditatifs et dignes, immobiles et songeant, palabrant, observant leur coin de monde avec philosophie, j’observe le lent fleuve des événements humains, le cours des choses et celui des bourses (de Paris à Tokyo, il paraît de la plus grande importance de tenir informé en temps réel le monde des humains vivants de ce que le cours du dollar ou du yen a chuté ou pas), l’évolution silencieuse et sournoise de la société humaine sous son fracas et ses trépidations quotidiens.

 

Agitation. Frénésie. Urgence. Ainsi, semble-t-il, ces dieux régissent ce monde de folie, emporté dans un maelström vertigineux qui l’emporte assurément à sa perte, aurais-je envie de dire. C’est idiot. Depuis toujours le monde court, mais pourquoi à sa perte ? Car, à chaque monde succède insensiblement un autre monde. Celui de la préhistoire a passé, laissant place à celui des sédentaires primitifs, qui a lui-même expiré insensiblement pour laisser la place à un autre…et ça n’en finit pas. Ainsi, d’une certaine façon, le monde ne cesse de mourir et de perdurer. Donc, les pages se tournent. Je lis, par conséquent, le livre de l’humanité, et je ne crois pas que je sois parvenu aux dernières pages.

Voici d’ailleurs qui incite à plus de langueur, de lenteur.

 

J’ai souvent la vision d’un berger seul dans l’immensité des paysages. Quelle urgence le presserait ?...Aucune. Quelle perception du temps qui coule est la sienne ? Quelle perception du monde est la sienne ? Privé d’informations sur un monde plus lointain que ses horizons perceptibles, que peut-il savoir des autres ? Quels tracas occupent ses pensées ? Il n’a sans doute d’autre choix que de contempler ce qui l’entoure, et d’y méditer. Je me sens parfois dans cette position. Entouré des champs et des nuages, des arbres et des étoiles, de mes bêtes, du vent et de la pluie, j’oublie l’urgence. Que puis-je, en fin de compte, à l’urgence du monde ? Ne devons-nous pas mourir un jour, tous ? N’y aurait-il pas urgence à cesser de courir en tous sens vers des buts insignifiants le plus souvent pour laisser pénétrer en soi les visions des ciels changeants, la course des nuages, les effluves marines, les arcs-en-ciel, le bruit des ressacs ?...

 

Il est de toute première urgence de freiner cette course imbécile vers toujours plus de technologie, de confort, d’assistanat technique, de robotisation, de consommation, de lobotomisation des cervelles, bref, faisons l’éloge de la lenteur (je ne suis pas le premier à le proclamer, bien sûr).

Ce que bon nombre d’entre nous, devenus maintenant des « anciens », des « aînés », dit-on pudiquement par hypocrisie (il ne faut blesser personne : pourquoi ne pas appeler un chat un chat ?), des vieux, ce que nous constatons, c’est un dérèglement général, une cacophonie, un chaos qui semble organisé, mais qui va comme ça peut…La vie, humaine ou autre, semble à de certains endroits ou de certains moments, totalement sans valeur, à d’autres, elle prend soudain des dimensions inouïes. En bon nombre d’endroits on met en œuvre des dispositifs onéreux pour sauver d’insignifiantes bestioles (ne sommes-nous pas exactement aussi insignifiants, au fait ?...) alors qu’en tant d’autres on assiste indifférents aux massacres des peuples…Tel « grand » patron va disposer d’une richesse énorme (et bien inutile) quand il ne donnera qu’à peine de quoi survivre aux esclaves qui l’enrichissent…Je pourrais multiplier les exemples : il suffit de relever chaque jour la litanie des informations, n’est-ce pas, mais de changer son mode d’écoute.

 

J’ai visité un jour le peuple du Burkina Faso, un des plus déshérités de la planète (accès à l’eau potable compliqué, pas d’énergie électrique, pas de richesse, pas d’accès à la santé et bien peu de nourriture …). J’y ai trouvé des gens curieusement sereins. Philosophes. En paix avec eux-mêmes. J’y ai trouvé aussi, c’est évident, une avidité à la richesse chez la plupart, mais cette envie est naturelle. Si tu ne côtoies que des semblables, tu ne peux rêver d’acquérir des biens supérieurs, en ignorant l’existence ; mais si soudain tu prends conscience que non loin de toi d’autres vivent « mieux », tu mets tout en œuvre pour, à ton tour, accéder à ce niveau de vie, en toute justice.

 

Or, cette course vers l’amélioration du niveau de vie, vers le progrès technique, vers la consommation, vous semble-t-elle bénéfique, au fond ?...

 

Au moment où je vous écris, j’entends l’appel si singulier d’une huppe…ce très bel oiseau…

 

Il est urgent de freiner la croissance. Il est urgent de freiner les politiques. De quoi ce monde a-t-il besoin ? D’humanité, c’est-à-dire de respect de l’autre, c’est-à-dire du respect de la huppe, de son frère, de l’arbre ou du papillon…C’est une urgence : quand nous aurons tout détruit, que nous soyons de gauche ou de droite, ce sera le parti de la bêtise qui aura triomphé. Il n’y a, je le crains, plus que celui-ci, qui règne partout en maître sur cette terre…

 

 

Un des deux dolmens de Fontenille

À travers Champs N° 52

Dimanche 11 mai 2014

 

Des mégalithes

 

Je suis allé, en compagnie d’un ami passionné de dolmens, de menhirs et de tumuli[1], à la rencontre des mégalithes plantés dans les champs alentour de Mansle.

Il faisait beau. Les blés sont verts en ce moment. Cette randonnée dans la campagne mansloise fut très agréable.

 

Je ne vous apprendrai rien en vous expliquant le sens de mégalithe : du grec méga, très grand, et lithos, pierre. Le trait commun de ces vestiges de pierre est leur taille impressionnante.

 

La première d’entre celles que nous avons visitées est celle de Charmé : le dolmen de la Pierre blanche.

Généralement, un dolmen comporte une énorme pierre posée horizontalement (la « table ») sur trois ou quatre pierres plus petites fichées verticalement dans le sol, comme vous pouvez voir sur la photo.

À Charmé, la « table » est oblique : il semble qu’il manque un ou deux piliers de support. Mon ami prétend qu’il ressent en lui des signes à l’entour des dolmens ou des menhirs. Moi je ne ressens rien. Du moins, jusque là. Il m’a expliqué que ces constructions frustres sont érigées à des points stratégiques, et non semées au hasard : à des « nœuds », des intersections de lignes telluriques ou de cours d’eau souterrains.

Je n’ai nulle envie de me moquer de cette croyance de mon ami. Il dit que les appareillages scientifiques actuels peuvent confirmer ses dires. Là n’est pas le propos : chacun est libre de croire en ce qu’il veut. Certains croient bien en Dieu. Je respecte profondément cela. En outre, il me paraît évident que chacun(e) d’entre nous a ses propres perceptions du monde. Ce n’est donc pas parce que moi je ne perçois pas telle ou telle manifestation physique qui m’entoure, qu’elle n’existe pas, ni que mon voisin ne doive pas la percevoir. Pour preuve : la perception d’un daltonien diffère de la mienne, moi qui ne suis pas daltonien. Tant qu’il n’est pas confronté à la prise de conscience de cette particularité de sa vision, le daltonien pensera que sa vision est conforme à celle de ses congénères : il en déduira que tout le monde autour de lui a la même perception du monde qui nous entoure. On peut étendre ce constat à chaque être humain : rien ne nous dit que nous percevons par nos yeux exactement la même chose que les autres. Rien ne serait plus faux : il existe assez de troubles de la vision pour prétendre que chaque individu voit son environnement différemment des autres. Chacun d’entre nous a donc une perception singulière, pas forcément très éloignée de celle qu’un(e) autre en aura, mais en théorie légèrement différente, cela paraît logique.

On appliquera le même raisonnement pour chacun de nos cinq sens.

On aboutit ainsi à une notion qui m’est chère : celle de la singularité des individus. Tous semblables, certes, mais si singuliers, considérés dans notre individualité.

Partant de là, j’ai admis que mon ami était sincère et qu’il ressentait quelque chose à de certains endroits de ces pierres particulières. En essayant de faire le vide mentalement, de me vidanger des pensées matérielles qui hantent habituellement nos esprits, j’ai voulu recevoir, moi aussi, ces signaux qui viendraient du sol. Après tout, l’électricité n’est perceptible que par ses manifestations, sinon, vous pouvez l’ignorer, ce qui, du reste, est un danger.

J’ai réellement ressenti quelque chose à proximité de certains mégalithes, en effet. Mais rien à la visite du premier, la Pierre blanche.

Les deux suivants auprès desquels nous nous sommes arrêtés sont ceux de Fontenille. Je les nomme ainsi, parce que cette commune semble la plus proche, mais je ne saurais dire, pour l’instant, sur le territoire de quelle commune ils se trouvent. Je n’ai pas encore pris le temps de me renseigner.

De ces deux-là, l’un semble bien conservé : mais j’ai l’impression qu’on a bricolé les supports de pierre sur lesquels il repose parfaitement à plat. L’autre est un peu affaissé à une extrémité. De nombreux « pieds » de pierre le soutiennent encore. On peut pénétrer sous la table car, à un endroit, le sol a été creusé. Il semble d’ailleurs qu’il s’agisse du dernier vestige en place d’une « allée funéraire » (ces allées funéraires étaient le plus souvent enfouies sous des buttes de cailloux et de terre, les tumuli).

J’ai sincèrement éprouvé une impression de froid intérieur autour de ce vestige-là, un malaise bien réel. Je ne m’y suis pas attardé. Son compagnon modèle, à une portée d’arc de là, si parfaitement positionné, quant à lui, ne m’a nullement occasionné quelque perception que ce soit.

Nous l’avons escaladé (n’était-ce pas sacrilège ?...), et sa surface, à peu près plane, était en certains endroits grêlée de trous, en d’autres de cavités peu profondes au contour assez régulier évoquant peut-être l’empreinte d’une patte de dinosaure : cela reste à vérifier.

Bien sûr j’ai observé l’orientation de celui-ci : grosso modo nord-sud.

Le hasard qui avait si bien placé ce jour-là ces deux vestiges sur notre route voulut qu’il en plaçât un troisième : un tumulus.

 

Il fallut quitter le chemin vicinal pour un chemin caillouteux qui escalade rudement la colline. Peu d’arbres aux abords, sauf immédiats : le tertre sommital est coiffé d’un petit bois, de chênes, si je me souviens bien. Végétation rase, semée d’orchis en fleurs, de lotiers corniculés et de marguerites, et d’une herbe rougeâtre, témoin, à mon sens, de la minceur de la couche d’humus en cet endroit.

Il reste en bon état fort peu de choses de cette sépulture : un chemin entre deux rangs de pierres à demi-ensevelies par la végétation herbacée, une chambre rectangulaire prolongée en son extrémité par une autre pièce de même forme, mais de dimensions plus modestes, qui lui est accolée. Le plus surprenant, pour moi, a été d’observer une porte parfaitement taillée, polie même, peut-on dire, dans un fort bloc de pierre. Je dis porte, car, à un angle supérieur de ce panneau vertical très épais se dresse un fort mamelon, un téton ou ergot taillé dans le bloc, qui fait immanquablement penser à une porte. Mais manœuvrer un tel vantail de pierre devait requérir une force surprenante. Voilà ce qui m’a le plus étonné sur ce site.

Autre chose : j’y ai perçu des ondes très fortes, ce qui m’a troublé intérieurement. C’était à la fois très triste et très doux, comme une plainte intérieure. Vous me permettrez de garder pour moi ce qui s’est alors imposé à mon esprit, qui n’est pas du domaine du quantifiable.

Cette dernière visite m’a ému, je l’avoue. J’en suis reparti serein et attristé, je ne saurais définir mieux mes impressions.

Je n’ai pas pu m’empêcher, à un certain moment, de faire part à mon compagnon de mon questionnement : « Ce qui m’interpelle, lui ai-je dit, vois-tu, c’est : pourquoi et comment ?… »

Lui ne semblait pas intéressé par cet aspect des choses, mais paraissait plus troublé par les forces qu’il ressentait, et intéressé par les traces figées dans la pierre qu’il avait décelées.

 

J’ai longtemps poursuivi un monologue intérieur, essayant de ressentir, d’imaginer – mais c’est impossible – ce monde enfoui dans un si lointain passé.

 

J’ai posé comme postulat qu’il ne nous était pas possible d’avoir une idée précise de la mentalité des humains qui sont à l’origine de ces érections mégalithiques. Nous ne possédons pas assez d’éléments pour en déduire comment ils fonctionnaient dans leur tête. Quelle était leur culture ?...Quelles formes de pensées au quotidien ?...Quelles règles de vie commune ?...Quel langage ?...Quels comportements ?...

Quand on sait que certaines tribus de cette civilisation antique étaient cannibales, on ne peut s’empêcher, non pas de juger, mais justement de s’interroger. Il ne pouvait y avoir en eux cette vision du monde qui est la nôtre, impossible.

Essayons de nous projeter dans leur univers, du haut de cette colline : la forêt, la plaine, le ciel et ses nuages, le soleil, comme aujourd’hui, mais pas, dans les lointains, les clochers des villages, les toits des maisons, les silhouettes fines et mouvantes des éoliennes, pas les voitures, pas les routes, pas les avions qui vrombissent au-dessus de nos têtes ou qui laissent au ciel une traînée de vapeur blanche rectiligne…Des bois. L’étendue moutonneuse et verte de la forêt vue du sommet de cette colline. Quelques plaines, peut-être ?...Encore eût-il fallu qu’il y ait en ce lieu une clairière pour obtenir une vision panoramique jusqu’aux lointains…

 

Quels bruits pour troubler le silence ?...Celui du vent dans les branchages, le cri de la buse ou d’un oiseau qui fuse, le rugissement lointain d’un fauve…

Quelles préoccupations, quelles occupations ?...La peur, sans doute, que le cri de ce fauve a suscitée chez la plupart d’entre les membres de cette communauté d’êtres hirsutes, à moitié nus, aux chevelures sauvages…

Ils ne possèdent pas l’acier, le cuivre, le bronze. Aucun métal. Pas même l’or ou l’argent. Pas de préoccupations liées à ces métaux précieux donc.

La peur, sans doute, oui, d’être attaqués, devait être quasi permanente. La nécessité de manger. Car comment survivre sans manger ? Sans se défendre ? La vie doit être, à cette époque, une question de survie de chaque instant. Des sens exacerbés, je pense : une vue acérée, une ouïe développée, un odorat sans doute bien supérieur au nôtre. Des qualités physiques hors par : rapidité, agilité, souplesse, force…Pas seulement : capacité à observer et à déduire, à mémoriser…Socialisation indispensable : que peut faire un être humain seul dans un monde sans merci ?...Esprit de mutualisation, de solidarité, d’entraide…Hiérarchisation, ou, du moins, spécialisation…

Un chef ?...Un chaman ?...Des cueilleurs, des chasseurs, des pêcheurs…Je ne préjuge pas du sexe de ces spécialisations, si spécialisation il y avait, bien sûr : chacun ou chacune devait être en mesure de tout faire : piéger un animal, discerner les plantes toxiques des comestibles, dépecer un animal…Il est vrai que certaines de ces tâches, exécutées au couteau ou à la hache de silex, requéraient probablement une force et une adresse oubliées de nos jours…Mais pister un animal ne réclame pas ces qualités-là.

En dehors de boire, de manger, d’éliminer, de satisfaire à l’instinct de reproduction, de se protéger et de se défendre des bêtes sauvages pour lesquelles les hommes représentaient des proies, quelle occupations ?

A priori, on peut imaginer qu’il leur restait un peu de temps pour observer la nature autour d’eux et y réfléchir. Or, qu’y avait-il à observer autour d’eux ?

 

Les plantes, les animaux, bien sûr, qui étaient liés d’une façon ou d’une autre à la survie, les minéraux, …le ciel, bien sûr, toujours changeant, au-dessus de leur tête. Le jour, la nuit. Les étoiles, la lune : comment y rester insensible, quand on n’a que cela à contempler la nuit. Comment ne pas se questionner alors ?...Comment ne pas y poser des repères (points cardinaux, équinoxes, solstices…) ?...

Et les préoccupations religieuses ?...Selon moi, il ne devait pas exister de croyance en un (ou des) Dieu(x), au sens que nous donnons, nous humains du 21ème siècle, à ce concept. Car ils devaient manquer d’éléments culturels pour nourrir une telle foi.

Par contre, si l’on observe comment la magie a disparu progressivement de nos civilisations et comment elle a peu à peu été remplacée par les religions – qui, au demeurant, ont utilisé cette magie, si l’on en croit la Bible et les vestiges du passé -, on peut en déduire qu’il existait bel et bien des rituels magiques. La magie met en œuvre des forces, des pouvoirs, bien oubliés de nos jours. Certains possèdent plus que d’autres la capacité à éveiller des forces dites surnaturelles. Toujours mon concept de singularité. Ainsi, il est loisible de penser que dans chaque tribu, il pouvait y avoir un être qui se consacrait à la tâche de communiquer avec le monde des esprits : pour protéger le groupe ; lui apporter la nourriture indispensable ; combattre ou éloigner les maladies ; invoquer les esprits afin que la tribu prospère…Ce rôle était fondamental : à la fois bouclier protecteur et force d’attaque et de combat. Sans intelligence, peu de chances d’assurer la survie de la horde. Sans connaissances de cet univers hostile, comment perdurer ? Le chaman devait apporter ses connaissances en médecine, en astronomie (mêmes rudimentaires), en magie, ce qui en faisait sans doute un être craint et respecté, écouté, à tout le moins.

 

C’est ainsi que j’explique, pour ma part, le déplacement de ces mégalithes : par le recours à la magie. J’ai eu l’occasion, dans ces pages[2], de m’en expliquer.

Mais ce mystère élucidé, si je puis dire, il en reste encore assez à résoudre.

 

D’abord, d’où provenaient ces pierres ? A-t-il fallu les découper dans les strates du socle rocheux ?...Si oui, comment ?...Avec quels outils ?... En a-t-on retrouvé trace ?...Sinon, comme il semble impossible d’imaginer qu’ils aient pu fabriquer ces pierres, comment s’y sont-ils pris ?...Ne connaissant pas le métal on voit mal comment ils auraient pu découper de tels blocs. Pour le transport, on peut encore avoir recours à la magie (lévitation par intervention de force électromagnétique développée par le pouvoir du chaman).

Mais pourquoi ces pierres géantes ? On n’a pas retrouvé d’ossements de personnages de grande taille, au contraire, ces gens semblaient être un peu moins grands que nous. Qu’est-ce qui a bien pu les pousser à imaginer de positionner en équilibre sur des assises rocheuses de tels blocs de plusieurs centaines de tonnes ? Pour le plaisir ?...Pour jouer ?...Soyons sérieux : il a dû y avoir une raison majeure qui a présidé à ces érections généralisées dans toute l’Europe. On a dit que c’étaient des monuments funéraires : certes, on a parfois retrouvé des ossements sous ces blocs. Certes on sait qu’ils enterraient leurs morts. Mais alors, on devrait retrouver beaucoup plus de ces tombes. Non. Cela ne tient pas la route. Reste le culte, à qui ?...difficile à dire. Aux divinités de la nature : celles qui amènent le tonnerre par exemple ?…Pourquoi pas ? Mais quel besoin de positionner des blocs aussi importants ?

Autre question : si leur façonnage est brut, en général, il existe, toutefois : dans quel but ?...

Dans la forêt de Maine de Boixe (16) il est une grande pierre posée à même le sol : elle est dite « Pierre du sacrifice » car, en son milieu, une saignée, étroite rigole en « v », la partage en deux selon un segment parallèle aux petites dimensions. Rien ne dit qu’on y pratiquait des sacrifices, humains ou autres…

Pourquoi la forme rectangulaire ? Pourquoi une telle épaisseur ? Les formes et dimensions des différents dolmens ne diffèrent pas tant que cela. Je ne pense pas qu’il y en ait eu des rondes, ou en forme de polygones ou de triangles[3].

Pourquoi les avoir surélevés ?

Enfin, je note que ces dolmens sont souvent situés sur des élévations de terrain : collines ou tertres. Il devait y avoir la forêt tout autour. À quel usage destinait-on ces gros cailloux ? Est-ce que seuls les chamans avaient droit d’accès ? Etaient-ce des lieux sacrés ?

 

On le voit, il est plus de questions que de réponses. Ce qui me fascine, c’est de tenter d’imaginer ces gens : leur mode de vie, leur sensibilité, leurs émotions, leurs pensées, leur culture. Comment se manifestait chez les femmes « l’instinct maternel » ? A quelles activités se livraient-ils au fil des jours, en dehors des tâches de chasse, de cueillette ou de pêche ? Au repos, sans doute, qui est propice à la fermentation des idées. Tailler des pierres semble avoir été une des occupations majeures de ces gens. Il doit donc exister un lien étroit entre les pierres de leurs outils et de leurs armes et celles qu’ils ont semées un peu partout.

Pourquoi amasser des collines de cailloux par-dessus une allée funéraire ?...Voilà qui doit faire appel à une certaine conception de la mort et de ce qui peut exister après. Cela aussi est un leitmotiv chez l’humain : savoir que l’on est mortel l’a toujours conduit à des questionnements existentiels : l’âme, sa survivance…

 

Bien sûr, je n’ai pas apporté ma pierre, si je puis dire, à la résolution de ces énigmes. Je me suis permis de vous faire partager mes rêveries sur un sujet qui nous concerne tous : car, avez-vous remarqué comme on éprouve le besoin de connaître ses racines ?

Il n’y a donc guère de conclusions à mes divagations chimériques. Si je vous ai porté à un peu de rêverie, sachez que le sujet n’étant pas épuisé, vous pouvez encore y consacrer de longues heures de délire. Il n’est pas interdit de rêver. Et il y a là, pour des années encore assurément, matière à gamberger…

Faites de beaux rêves !



[1] Un tumulus, des tumuli : un fort beau gisement de ces édifices se visite à Bougon (79)

[2] Voir « A travers champs » N° 10 : Stonehenge and co

[3] Il a cependant été découvert je ne sais plus où des vestiges au sol (mais pas des dolmens) d’un site préhistorique en forme d’œuf, matérialisé par des pieux enfoncés dans le sol, leurs traces en tout cas…[si cela vous intéresse, je puis retrouver l’article complet]

À travers Champs N° 51

Mardi 6 mai 2014

 

Le monde change

 

En fait, au travers de ces rubriques, je passe en revue les évolutions de notre monde. C’est du moins, même si ce n’était pas mon dessein, un peu ce qui se dessine au travers d’elles.

 

Exemple.

Je vous ai parlé des drones. J’apprends ce jour que la Chambre d’Agriculture de la Somme vient de se doter d’un drone afin de mieux surveiller la croissance des plantes, l’efficacité des intrants, etc…Assurément, ce sera un plus dans la recherche de rendement. On peut se demander à juste titre si, dans un avenir proche, chaque exploitation agricole ne possèdera pas son drone. Celui-ci, téléguidé avec adresse, pourra pulvériser sans danger pour l’agriculteur tous les produits chimiques indispensables à la croissance des plantes vivrières que nous dévorons. Economie, efficacité, rapidité, précision…Que des avantages !

 

Mon Dieu ! Je me revois enfant emmener mes vaches aux champs par les routes poudreuses et désertes, entre les ombrages tièdes des haies, parmi les champs de blé mûrissant au soleil, escortés de leurs cohortes de coquelicots et de tant d’autres fleurs champêtres…Toutes ces plantes non agréées par l’homme auront disparu, parce que considérées comme parasites. C’est déjà le cas.

 

À noter que, déjà, des engins entièrement robotisés et guidés par satellite interviennent dans la plupart des opérations de l’exploitation agricole. C’est la Bourse, la Météo, et d’autres paramètres financiers et informatiques qui décident des moments opportuns pour les labours, les semailles, l’épandage des engrais, etc…

 

Et moi je revois mon oncle derrière le cheval, pesant sur les mancherons de la charrue qu’il tire. Il s’arrête à l’ombre d’un arbre en plein champ, ou d’un bosquet, roulant une cigarette, le temps de laisser souffler sa carcasse et celle de la bête. Prenant le temps de vivre et de discuter avec un voisin qui passe, humant l’air, flairant la pluie et le beau temps…

Que penserait-i si un drone venait à passer semant un nuage toxique pour désherber ses betteraves ? …

 

Le monde change…

 

Certes, en ce temps-là, on ne prenait pas sa douche tous les jours. On se lavait cependant. Sans doute étions-nous moins dérangés par les odeurs de la nature ? Je vois que de nos jours on frise le nez sur les remugles des bêtes : mon âne sent fort, c’est vrai, et son crottin a de l’odeur : je vois bien qu’on en a perdu l’habitude. On lui préfère les fragrances subtiles des produits chimiques volatiles et délicats, totalement allergisants par ailleurs….

On aseptise un maximum, on hygiénise à outrance. Sans faire l’apologie du laisser-aller, je voudrais signaler que les scientifiques viennent de découvrir que trop d’hygiène fragilise. Le corps n’ayant plus à se défendre contre les bactéries, il devient davantage vulnérable aux innombrables microorganismes qui le pénètrent en permanence. Ainsi s’explique en partie l’augmentation asymptotique des allergies. La pollution aérienne explique aussi ce phénomène. Il semble qu’autrefois, vivre à proximité des bêtes immunisait contre pas mal de maladies. Surprenant, n’est-ce pas ?...

 

Le monde change…

 

De plus en plus, on voudrait un monde parfait, des gens parfaits, des réussites et pas d’échecs ! Noble aspiration ! On voudrait des dirigeants parfaits, meilleurs que nous. On voudrait les autres meilleurs que nous…et on ne supporte pas d’attendre deux minutes si un véhicule s’immobilise devant vous pour laisser descendre une personne âgée ou un enfant…

Mais par essence, la perfection n’est pas de ce monde, et on voit bien que plus on tend vers un monde parfait, plus le bonheur s’éloigne.

 

Le monde change…

 

En ces temps d’aspiration à l’absolu, à la pureté, au sans tache, à la lumière –aspiration bien naturelle au fond – on rejette ceux d’entre nous qui présentent des comportements non formatés, qui ne semblent pas dans la norme : « Comment ! Tu n’as pas la télé !...Tu n’utilises pas internet !...Tu ne t’intéresses pas au foot !... »

Ils abondent ces mécanismes de rejet de celles et ceux qui ne vivent pas selon la norme. Notre norme. Celle sur laquelle notre société nous apprend à nous modeler. Les moules. Nous sortons tous des mêmes moules de pensée. De plus grands que moi le disaient déjà quand j’avais vingt ans. Or, les modes changent, les normes aussi…

 

Observez comme nombre d’entre nous sont rejetés tels des parias, qu’on retrouve sur les trottoirs de nos villes, et comme on les regarde…Tout porteur d’une anomalie nous renvoie une image trouble de nous-mêmes et nous montre l’abîme qui sommeille en chacun de nous. La frontière est mince entre la norme et l’anomalie, et ça fait peur. À tout moment, on peut se trouver soi-même à la rue, ou pire encore…Voilà l’origine des discriminations. De la xénophobie, de l’homophobie, du racisme. La peur des différences. D’être celui qu’on ne veut pas voir.

Alors il faut des exutoires, des exorcismes, des boucs émissaires. C’est pratique. On cristallise le refoulé en sacrifiant les marginaux. On traque les anomalies, on les détecte dès la naissance, pour mieux les maîtriser, les étouffer…On dilue sa personnalité dans celle du groupe, on dilue sa responsabilité dans celle du groupe en la fractionnant pour la minimiser. C’est ainsi qu’on explique les viols collectifs et, en partie, l’holocauste. Voilà où peut mener l’excès de pureté…

 

Le monde change…

 

Les relations entre les hommes ont évolué. Jadis, la parole donnée faisait force. Pas besoin de papiers pour entériner le marché. De nos jours, la confiance est si ténue qu’on multiplie les alinéas et les avenants aux contrats, qu’on multiplie les contrats et les règles de sécurité…On n’a curieusement jamais autant ressenti d’insécurité. On n’a pourtant jamais été aussi bien surveillés et fliqués ! Comme du bétail, et non comme des êtres humains doués de raison et de sensibilité, de liberté…

 

Les patrons de grandes entreprises grugent de façon éhontée leurs employés, sans vergogne, dans des disproportions incroyables…pour s’enrichir scandaleusement. C’est ignoble. Mais cela est.

 

Je dois arrêter de déverser en vrac toutes ces observations banales, c’est une évidence : le monde change…

 

Pour toutes celles et ceux de ma génération, c’est l’effarement : ces modifications flagrantes des conditions climatiques, ces excès inopinés dans les manifestations météorologiques, ces pollutions croissantes, ces modifications des comportement humains au sein de la société, cet appât du gain partout, le triomphe de la futilité, l’abêtissement généralisé des masses, ces fanatismes qui explosent et s’installent partout, ce mépris croissant de la vie humaine, de la vie, en général, l’intolérance, les autoritarismes, la violence qui se généralise…

Je sais. Je déverse pêle-mêle, dans un grand sac, tout ce qui ne va pas, sans même tenter de faire un inventaire à la Prévert. Je sais : je suis un vieux c…qui radote. Comme les vieux, du temps que j’étais jeune…

N’empêche. Eux, ils n’avaient pas des charrettes et des tombereaux de déchets nucléaires aux fesses, de centrales nucléaires qui risquaient de leur péter au nez, pas de voitures et de camions pour les polluer, etc… etc…

Avec moi, celles et ceux de ma génération se terrent, consternés, et se taisent, se demandant où ils ont péché…et culpabilisent, en songeant au monde qu’ils vont laisser à leurs petits-enfants…

La responsabilité est partagée.

 

Pouvons-nous seulement nous rendre responsables de l’évolution de la société ?...En partie, sans doute, mais ce sont surtout nos dirigeants qui portent la responsabilité. Un exemple entre mille. Dans les années 60, notre ministre de l’agriculture décide la fameuse opération du remembrement agraire. Ce fut une catastrophe écologique. Il le reconnut des dizaines d’années plus tard. Mais, comme il le confessait, « j’ai écouté les techniciens qui me conseillaient… ». Oui, on se sent moins responsable, quand on partage la responsabilité. C’était pourtant, à mes yeux de naïf jeune homme de dix-sept ans qui n’y connaissait rien, un crime de lèse-majesté, un arrache-cœur, une évidente folie…On a manqué m’égorger pour ces propos, à l’époque…

Je suis désolé, mais j’avais raison. Qu’ai-je fait pour m’opposer à cette immense bêtise ? J’ai composé une chanson et je suis allé la chanter. Risible !

 

Il est trop tard pour faire machine arrière. Nous sommes dans le mur.

Il est trop tard pour arrêter le nucléaire : le mal est fait.

Trop tard pour moins consommer : le mal est fait.

Trop tard pour éviter le chaos : il est déjà dans les têtes et autour de nous, partout…

Trop tard pour toucher le cœur des hommes : c’est une carte bancaire qui bat dans leur poitrine.

Le monde a changé…

 

Dites-moi que je ne suis qu’un oiseau de mauvais augure, et que ma désespérance est infondée. Oh ! Dites-le moi !...

 

À travers Champs N° 50

Mercredi 9 avril 2014

 

De l’avenir de notre humanité

 

J’ai fait un rêve. Plutôt un cauchemar.

« C’était dans les années 2100. Certes, les mégapoles étaient un peu embrumées, engrisaillées. Certes, les camions et les autos, les trains et les avions s’étaient multipliés, et ça fourmillait comme dans une fourmilière, et les humains fourmillaient autant que des fourmis, vus du ciel. Un ciel gris. Il régnait un tel brouillard que tous portaient un masque. La plupart des couples étaient formés de gens de même sexe. Rares étaient les hommes à s’afficher au bras d’une femme (et viciée de Versailles, comme aurait dit Pierre Dac). À cette époque, l’homosexualité était devenue la règle sur la planète. Dans ces conditions, les couples hétéros étaient fort mal vus. Souvent agressés, conspués, persécutés, ils avaient toutes les peines à survivre, obligés de cacher leur tare à la société.

Inutile de dire que si l’on n’avait eu recours à la procréation artificielle, la société humaine aurait disparu depuis belle lurette. Ainsi, lorsqu’un couple souhaitait un enfant, il le commandait par internet à l’un des nombreux centres de procréation disséminés dans les villes. Il suffisait de répondre à un questionnaire.

 

L’enfant souhaité sera de sexe …(rayer les mentions inutiles).

Il aura les yeux …(veuillez préciser clairement votre choix : le rouge et jaune ne sont pas admis).

Chevelure : blonde, brune, auburn-noire, autre (préciser).

Taille : …(les nains sont refusés, les grandes tailles également : choix entre 1,69 m et 1,96 m).

Couleur de peau :…(cette année, le noir n’est pas admis[1])

Morphologie : choisissez selon les types qui vous sont proposés (voir annexe IV bis).

Descendance de célébrité : (consultez la liste des peoples en annexe VI ter). Veuillez noter que Sinatra, Holiday et Sarkozy sont épuisés. Ce ne sont pas les seuls. Pour la mise à jour, voir annexe 0007.

Intelligence : cochez la case correspondant au QI choisi.[2] Nous attirons votre attention sur le fait que ce choix n’est pas forcément compatible avec la rubrique précédente.

Caractère : vous ne pouvez pas choisir, ce paramètre n’est pas encore totalement maîtrisé.

Suggestions ou autres souhaits : …Vous pouvez préciser ici différentes attentes qui n’apparaissent pas dans ce questionnaire, mais nous ne pouvons garantir qu’il en sera tenu compte. Cela dépendra des derniers progrès de la Recherche.

Consultez nos tarifs en annexe 10010110 bis. Dégressif pour les jumeaux, triplés, etc…[3]

La livraison à domicile est tarifée selon l’éloignement et le jour de la semaine (consultez l’annexe 130XV245).

Toute demande particulière est soumise à une augmentation fixée par décret.

Vous n’êtes pas obligé d’opter pour la rubrique « Descendance de célébrité ». C’est d’ailleurs dans ces options que les prix varient le plus. En effet, les banques du sperme sont souvent en grève, et nous avons de plus en plus de mal à trouver du personnel sérieux. Nous garantissons cependant l’authenticité des gamètes.



[1] NB : veuillez noter qu’on alterne ; cette année, c’est l’année du blanc [que mes amis de couleur de 2014 ne voient là aucune allusion raciste : simplement, la parade, justement, contre le racisme, aura été trouvée]

[2] Entre 90 et 195 (QI : quotient intellectuel)

[3] La loi a fixé cette année  la limite aux sextuplés

 

L’inscription à la crèche automatique est optionnel.

En cas d’insatisfaction, nous n’assurons pas la reprise des rejetons.

Il vous appartient de vous mettre en règle au regard des lois en vigueur (déclaration, puçage[1] électronique…)

Veuillez vérifier dans la liste autorisée des prénoms que celui que vous avez choisi commence par bien par la lettre de l’année en cours.

Le sexe peut changer au dernier moment, en fonction des ratios.



[1] Remarque : ne pas confondre avec « pucelage » : il s’agit de l’inscription au GFE ( Grand Fichier Electronique)

 



[1] Remarque : ne pas confondre avec « pucelage » : il s’agit de l’inscription au GFE ( Grand Fichier Electronique)

Les gens ne mangeaient que des vers de terre, des cloportes, des asticots, des criquets, des mouches et des guêpes lyophilisés, déshydratés, en poudre ou en steack. Les plus démunis faisaient la chasse aux cafards.

Tous étaient en short, torse nu, en raison de la température qui oscillait jour et nuit entre quarante et quarante-cinq degrés. Quelques-uns, plus fortunés, étaient vêtus d’une sorte de combinaison de protection thermique blanche, parfois élégamment décorée de motifs abstraits.

Tous étaient armés : les agressions étaient monnaie courante. Les plus riches ne sortaient qu’escortés de leur garde personnelle. Seuls les quartiers résidentiels rutilaient, d’une propreté étincelante.

À part ces îlots de verdure, le reste de la ville croulait sous la crasse, les déchets de tous genres, les déjections. Des nuages de mouches bourdonnaient en permanence au-dessus de ces bourbiers amoncelés au fond des ruelles ou au bas des murs. Même au travers des masques, la puanteur parvenait aux narines. Les gens y étaient devenus insensibles. Beaucoup avançaient comme des zombies. Ils titubaient, trébuchaient, s‘écroulaient sur le bitume dans l’indifférence générale. La plupart avaient le regard trouble et hagard des hallucinés : les drogues de toutes sortes circulaient aux coins des rues librement… »

L’envie d’uriner m’a réveillé, fort heureusement, et tiré in extremis de ce monde où j’étouffais. J’ai revu en pensée mon âne dans son pré, mon bouc, ma chienne se roulant dans les pâquerettes…les corbeaux s’envolant lourdement du noyer…les pies et les palombes dans leur vol circulaire…les ciels de printemps sous la brise odorante…les arcs-en-ciel…les ruisseaux de mon enfance…

Après tout, me dis-je, tu as de la chance, au fond…



[1] NB : veuillez noter qu’on alterne ; cette année, c’est l’année du blanc [que mes amis de couleur de 2014 ne voient là aucune allusion raciste : simplement, la parade, justement, contre le racisme, aura été trouvée]

[2] Entre 90 et 195 (QI : quotient intellectuel)

[3] La loi a fixé cette année  la limite aux sextuplés

[4] Remarque : ne pas confondre avec « pucelage » : il s’agit de l’inscription au GFE ( Grand Fichier Electronique)

 

À travers Champs N°49

Lundi 17 mars 2014

 

Des puces…

 

Aujourd’hui, je découvre qu’une équipe scientifique vient d’inventer un truc génial. C’est fou, en fait, tout ce qui s’invente chaque jour dans le monde. Il faut dire que c’est fou le nombre d’équipes de chercheurs qui cherchent (eh oui !...) dans tous les domaines : la médecine, la physique, la robotique, etc…Il y a tant de branches à l’arbre de la science, de nos jours…et tant de feuilles aux branches, et l’arbre ne cesse de croître !...

 

Ce nouveau truc, c’est en quelque sorte un système basé sur l’émetteur-récepteur d’ondes.

Vous roulez tranquillement dans votre auto, en ville, longeant des véhicules en stationnement. Soudain, un gamin débouche de derrière deux véhicules en stationnement. Vous n’avez pas eu le temps de réaliser : déjà votre véhicule a pilé, seul, avant même que vous n’ayez vu le môme déboucher des voitures en stationnement. Non, ce n’est pas une caméra qui interagit avec l’automobile : la caméra n’aurait perçu l’enfant que lorsqu’il aurait surgi dans son champ, c’est-à-dire trop tard.

C’est un appareil embarqué qui a repéré l’enfant piéton sur le trottoir, le long duquel sont garées les voitures. Car le piéton est muni d’un système réfléchissant, en quelque sorte, les ondes émises par l’appareil embarqué à bord de l’auto. Les obstacles matériels n’arrêtent pas ces ondes. Dès lors que celui-ci enregistre une réponse dans son environnement, obstacles ou pas, il analyse la distance à la cible, et, couplé à un calculateur, en fonction de la vitesse des mobiles et de leur direction, il anticipe la collision, et déclenche le freinage automatique.

Magnifique !

On envisage déjà d’équiper tous les véhicules, en série, et les vêtements des écoliers, de ce système, afin de prévenir les accidents.

Rien à dire, c’est du beau travail.

Mais qui nous dit qu’on ne nous glissera pas bientôt une puce électronique sous la peau dès la naissance, qui interagira avec les automates qui jalonnent notre vie quotidienne, afin de nous protéger de la circulation routière ?...pour délivrer de la monnaie au distributeur de billets de banque, par exemple, ou pour régler nos achats à la caisse du supermarché, sur internet, ou pour faire du carburant ?...Plus de souci du style : « Mais où ai-je fourré ma carte ?... ».

Itou pour  le métro ou le train : plus besoin de payer, ce sera prélevé directement – si le compte est approvisionné, mais cela, l’appareil le saura illico, pas moyen de filouter.

Le mari jaloux n’aura qu’à se connecter au réseau – moyennant finance, évidemment – pour filer, sans risque d’être découvert, son épouse infidèle. L’ennui, c’est qu’avec cette invention, le métier de détective disparaîtra. On pourra même élaguer dans les rangs des policiers. Pour les écoliers, plus moyen de faire l’école buissonnière (il est vrai qu’il n’y a plus guère de buissons pour les accueillir)…

Les données de type médical seront communiquées en quasi permanence : température du corps, tension, cholestérol. Un bipeur vous alertera immédiatement : « Attention ! Votre température s’élève anormalement, votre cœur bat trop vite, ralentissez votre activité…Préparez vos tampons, vous allez avoir vos menstrues… ». Pour peu que vous soyez tombé(e) amoureux(se), ça pourrait vous calmer et prévenir ainsi les infarctus…D’ailleurs, sachez-le, avec un tel système, vous ne pourriez pas passer inaperçu(e) : toujours possible de vous fliquer : il suffit de placer discrètement (ou pas, au fond) des bornes en relais pour couvrir tout le territoire, et l’on saura exactement où vous êtes à tout moment, dans quels déplacements vous vous engagez…

 

Mieux encore ! Et là, c’est très fort.

Vous le savez, de nombreuses équipes de chercheurs planchent sur les drones : ils ont le vent en poupe, si je puis dire, en ce moment. Il en est de fort gros, capables de transporter du matériel militaire, par exemple (eh oui, ce sont  souvent les Ministères des Armées qui financent ces recherches, bien sûr…), mais la tendance est à la miniaturisation. A peine plus gros qu’une mouche, ces engins imitent le vol des insectes, se déplacent de façon furtive, passent partout, espionnent tout partout, rendant ainsi de fiers services en cas d’incendie, de prise d’otage, etc…Très utiles !

Mais là où c’est encore plus fort, c’est qu’une équipe américaine plus maline que les autres, ne s’est même pas donné la peine de s’inspirer du monde des insectes pour envoyer ses espions le plus discrètement possible chez l’ennemi, non, tout simplement, elle a inventé le drone vivant : elle manipule les insectes ! Comment ?

Après avoir implanté des électrodes dans le corps d’un scarabée (pas d’or, évidemment, celui-là…) et l’avoir bourré d’électronique, nos amis techniciens magiciens téléguident le pauvre scarabée vers les lignes ennemies. Quoi de plus anodin qu’un scarabée ? Ainsi manipulé, télécommandé aussi aisément qu’une maquette ou qu’un jouet, la pauvre bête n’a d’autre choix que d’obéir : impossible pour elle de faire autrement. L’arme parfaite !

J’entends d’ici les âmes sensibles : « Oh ! C’est horrible ! La pauvre bestiole ! Mais l’éthique, alors ?...On ne respecte plus rien ?...Quoique…après tout, ce n’est qu’un insecte insignifiant. Cela ne souffre pas, sans doute, un insecte, cela n’a pas de conscience, n’est-ce pas ? Du coup, on peut tout se permettre, en effet… »

 

Mais vous m’avez mal compris.

Avec votre puce implantée dans le crâne ou ailleurs dans votre organisme, le jour n’est pas loin où vous serez manipulé(e) aussi sûrement que ce pauvre scarabée. Vous ne vaudrez guère mieux qu’un hanneton. Fascinant, quand on y pense, non  ?...

Au fait, ne sommes-nous pas déjà un peu manipulés ?...Non, sûrement pas, voyons, n’ayez pas peur, braves gens !...

 

Après tout, grattez-vous où ça vous démange…ou achetez une lotion anti-puces.

À travers Champs N°48

Vendredi 28 février 2014

 

Du sang neuf pour les vieux

 

Pas de provocation dans ce titre, ni rien de péjoratif. Je sais : de nos jours, on n’ose plus appeler un chat un chat. La mode est aux périphrases ou aux synonymes contournés : les Anciens, les Aînés…Baste ! Assez d’hypocrisie ! Je suis vieux, et c’est la vérité. J’ai été jeune, avant. Voilà tout. Bref, ce n’est pas là mon propos ce soir.

Je voudrais évoquer une manipulation scientifique (encore ! direz-vous, avec raison : mais justement, parlons raison ce soir, puisque, paraît-il, science sans conscience n’est que ruine de l’âme…, je dirais même plus : de l’humanité).

Où est la raison en toutes ces diverses manipulations ? Sans doute nos acrobates de l’éprouvette travaillent-ils pour notre intérêt, croit-on savoir. Encore que, parfois, certaines expérimentations, semblant partir d’un bon sentiment, pourraient bien avoir des conséquences imprévues, voire catastrophiques.

J’ai eu l’occasion d’en parler précédemment.

Donc, j’apprends que des scientifiques ont découvert les bienfaits d’un sang neuf injecté dans un vieil organisme. Chez les souris, je me dois de doucher votre enthousiasme[1]. Transfuser du sang de souriceaux (tout jeunes et qui n’avaient rien vu[2]…) dans l’organisme de vieilles souris ratatinées au cerveau ramolli a augmenté de façon significative le nombre de connexions entre les neurones chez les sujets frappés de péremption (façon de parler ; retraité, j’ai cependant souvent la désagréable sensation d’être périmé, dans cette société française du vingt et unième siècle). Demandez-vous comment on a découvert cela : il a fallu disséquer les cerveaux des rongeurs pour compter les connexions. Barbare ? Allons ! C’est pour le bien de l’humanité. Et puis, vous traquez bien ces petits monstres avec vos tapettes ou vos appâts à l’arsenic, n’est-ce pas ?...

Ainsi, les résultats des rongeurs âgés à qui on avait injecté du plasma[3] d’animaux jeunes virent leurs performances de mémoire et d’orientation nettement améliorées. De là à imaginer que l’on a trouvé l’élixir de jouvence, il n’y a qu’un pas[4]. Depuis le temps que tant de générations de chercheurs affamés d’éternité œuvraient en ce sens, nous y sommes presque. Ils avaient raison, les Gilles de Rais[5] et compagnie…Mais pas d’emballement. Le service juridique du New Scientist s’est cru obligé de préciser, après la publication de ces résultats, que « ceux-ci ne doivent pas encourager à boire du sang humain ». À la bonne heure ! Nous voici rassurés ! Somme toute, si vous n’y aviez pas pensé …

Imaginez un instant que ces travaux aboutissent à retarder la date de péremption de nos vieillards : primo, seuls les plus riches pourront se payer le privilège de pomper du sang jeune ; secundo, le nombre de défunts va diminuer, contribuant ainsi à l’augmentation de la population mondiale. Mais heureusement, il est des éléments régulateurs, j’ai déjà eu l’occasion d’en parler un peu plus avant (maladies, guerres, misère, famine…).

Je demeure perplexe devant ces avancées.

J’entendais que notre Président se rendait au Nigéria. Peu de temps auparavant, j’apprenais qu’en ce pays on venait d’arrêter une bande de malfrats : ce réseau allait à la chasse, non pas aux papillons, mais aux humains, afin de les ramener à leur cuistot, qui les préparait dans la cuisine de son restaurant, pour les amateurs de viande humaine.

Évidemment, je n’ai aucun moyen de vérifier l’exactitude de ces informations, données par les médias – mais cela aussi, je l’ai évoqué dans une précédente rubrique d'À travers champs.

Allez ! Une bonne nouvelle, pour rétablir l’équilibre : « Un vaccin a démontré son efficacité sur trois des quatre formes du virus de la dengue, lors d’un essai clinique sur quatre mille enfants thaïlandais[6]. »

Le paludisme résiste encore aux chercheurs. Je souhaite de tout cœur qu’ils triomphent rapidement, quand je songe à tous ces Burkinabés, jeunes ou vieux, que j’ai vus tremblants de fièvre, m’implorant de leur donner de l’aspirine…

 

Ainsi va l’humanité : « Eh bien, maintenant rien ne sera irréalisable pour eux, de ce qu’ils peuvent se proposer de faire. »[Gén.11], s’exclamait Dieu (paraît-il), voyant les hommes à l’œuvre à leur fameuse tour de Babel[7]. Il semble en effet que ce soit le cas. Pour le meilleur et pour le pire. Mais Dieu semble curieusement absent…



[1] S & A Déc 12, p 40

[2] La Fontaine…

[3] Plasma : sang débarrassé des globules et des plaquettes

[4] En attendant, on pense par ce moyen soigner la maladie d’Alzheimer

[5] Il s’est dit que ce criminel hors pair cherchait, outre le secret de la pierre philosophale, celui de l’éternelle jeunesse : il aurait tué « plus de cent quarante enfants » [Bataille et Klossowski 1985]

[6] Ibidem : cf note N°1

[7] À travers champs N°45

À travers Champs N°47

Vendredi 14 février 2014

 

Saint Valentin

 

Ce n’est pas à dessein que j’ai choisi ce jour de la fête des amoureux pour traiter de la barbarie. Pourtant, Valentin de Terni, moine au IIIème siècle, qui est le patron de cette célèbre fête (commerciale, bien entendu), mourut en martyr. Le lien est fait, par le plus grand des hasards.

Ce n’est pas de lui que je vous parlerai ici. Mais je saisis l’occasion pour introduire mon sujet.

L’empereur Claude II le Gothique le fit tuer et les légionnaires chargés de la besogne se défoulèrent largement sur lui avant de lui décoller le chef. Décidément, ce mode d’exécution est indémodable. La guillotine n’ayant finalement que porter les décapitations à l’échelle industrielle.

 

On voit, par cette histoire de l’exécution de ce moine, combien le pouvoir est proche de la barbarie. L’exercice de celui-ci ne semble pas pousser l’impétrant à l’indulgence. Je me demande d’ailleurs s’il ne faut pas avoir des prédispositions pour la barbarie pour exercer le pouvoir. Oui, je sais, tous les hommes de pouvoir ne sont pas des barbares, et réciproquement. N’empêche, que l’histoire humaine fourmille d’exemples de ce genre d’abus[1].

Ne pensez pas que notre époque soit à l’abri de ces exécutions politiques. Comment croyez-vous que Poutine soit parvenu au pouvoir ? Imaginez-vous qu’il n’ait pas de sang sur les mains ? Pour accéder aux marches de son trône, il a marché sur plus de trois cents cadavres ; il emportera le poids de ces assassinats en enfer, s’il existe. Ce que je souhaite.

Je dis que ce type est un barbare. Ce qui m’inquiète, c’est qu’il n’est pas seul. Hitler n’était pas seul. Comme ce dernier, le fauve qui dirige la Russie ne manque pas de sbires dans sa cour. Ce ne sont donc pas des exceptions.

 

Une chose m’intrigue au plus haut point : comment un homme seul (pas tout à fait, on vient de le voir) peut-il se maintenir au pouvoir avec les mains rougies du sang de ses victimes ? Comment se peut-il qu’un Bachar el assad perpétue autant de crimes et d’horreurs ? Comment est-ce possible, une telle barbarie de nos jours ?

Comment, en Centrafrique, des hommes peuvent-ils impunément tuer à la machette, enfants, femmes, vieillards, hommes, comme on débite des branchages d’un arbre abattu ?

Comment peut-on tailler dans la chair humaine avec une telle indifférence, un tel sadisme, sans doute, une telle désinvolture ? Comment peut-on opérer des lynchages ou des lapidations auxquels assistent, impuissants, des observateurs impassibles ? Est-ce là le courage des nations civilisées, que d’observer dans la plus totale indifférence ces inhumanités ?

 

Ne vous sentez cependant pas trop à l’abri de ce genre d’exactions : je ne suis pas sûr que, en cas d’insurrection, de chaos politique en France, vous ne soyez pas la cible ou, pire encore, l’auteur de tels forfaits…Je vois d’ici votre indignation. Oh ! mais, cher Monsieur, chez nous, nous sommes « ci-vi-li-sés » ! …

Mon point de suspension en dira plus long là-dessus que ce que je pourrais en dire.

Car la question fondamentale est, justement : pourrait-on, nous aussi (nous : les nantis, les peuples « civilisés », les riches, quoi), basculer un jour dans une anarchie telle qu’à notre tour nous pourrions tailler dans la chair allègrement, en toute impunité, tout en étant persuadés de notre bon droit ?

Car en fait, quand j’entends un africain de ce malheureux pays dire dans une interview  « à chaud[2] », sur une radio : « Oui, on vient de tuer cet homme. C’est moi qui l’ai arrêté. C’était un de ceux qui ont tué nos frères, nos femmes, nos enfants… Il n’a que ce qu’il mérite. », je m’interroge. Cet homme est un homme normal, comme vous et moi. On a tué ses proches, il estime être dans son droit en se faisant justice lui-même. Tous ses coreligionnaires pensent de même. Des deux côtés alors, une fois le mécanisme en place, on s’estime dans son droit de tuer. Ce qui autorise les pires atrocités des deux côtés.

Je remarque, en l’occurrence, qu’il semble que les deux factions en question soient divisées par leurs religions…J’ai cru comprendre, mais c’est sûrement plus compliqué, qu’il en est de même en Syrie[3].

Quand la digue est rompue, tout est possible : vous pouvez devenir alors candidat à l’assassinat (compris dans ses deux acceptions), parce que vous portez la barbe, ou parce que vous êtes de tel ou tel type d’humanité, ou parce que vous lisez le Coran, ou la Bible, ou parce que vous avez l’air efféminé…j’en passe et des meilleures…Ne riez pas : je n’exagère rien, il en est, parmi vous, qui, à leur insu, n’en sont pas loin.

Mais comment peut-on commettre des atrocités, même sous l’emprise de la colère, de la haine ? Qu’on torture et exécute son semblable de façon aussi expéditive, sans état d’âme, me glace les sangs. J’ai eu l’occasion de visionner des reportages terribles sur les enfants-soldats, qui m’ont déstabilisé profondément. C’est réellement terrible, insupportable, ces massacres, ces atrocités, c’est…inhumain.

J’ai toujours eu peur de la violence : celle des autres et la mienne.

Car, enfin, regardons au fond de notre âme : et moi je vous dis que nous avons, que vous avez toutes et tous en vous le germe de ce désir furieux de tuer votre prochain. Vous ne me croyez pas, je le vois bien…Je ne chercherai pas à vous persuader. Je pourrais sans doute vous citer des exemples troublants, mais ce qui se passe en Syrie ou en Centrafrique, ce qui s’est passé entre les hutus et tutsis en 94 au Rwanda, ce qui s’est passé dans les camps de concentration et ailleurs (Oradour/Glane…), lors de la seconde guerre mondiale, tout concourt à montrer que la barbarie n’est ni affaire d’époque, ni affaire de degré d’une soi-disant « civilisation » (il y aurait des peuples sujets à la barbarie, et d’autres non ?...si ce n’ était si dramatique, j’en rirais…). Il est des circonstances particulières qui libèrent vos démons…

 

Ce qui, chez nous, en ce moment, limite la barbarie à des actes relativement isolés, c’est sans doute le degré d’organisation d’une société, ce vernis de civilisation (ce mot n’a aucun sens pour moi). Il désigne à coup sûr une société suffisamment riche pour vouloir se préserver (elle et sa richesse, et ce qu’il en découle d’avantages pour un certain nombre de ses individus). Mais, je prétends que, fondamentalement, il n’y a guère de différences : tout être humain est semblable à ses congénères, intrinsèquement, qu’il soit d’Afrique ou de Chine, d’Amérique ou d’Europe…, de notre époque ou des précédentes : il porte en lui ombre et lumière. C’est sans doute pour cela qu’on retrouve ces comportements antinomiques à grande échelle, comme j’ai eu l’occasion déjà de l’écrire dans cette rubrique : acharnement d’une partie des nations à détruire des peuples ou fractions de peuples[4], et acharnement de gens réunis en organisations humanitaires à sauver les mêmes peuples affamés…

[Je vous renvoie au livre de Jean Ziegler, Destruction massive, dont vous trouverez les références dans « Ma bibliothèque »].

 

Curieusement, en ce moment, en France, se pose un terrible dilemme, que tout le monde semble bien en peine de trancher : le cas de cet homme tenu en vie artificiellement depuis des années : faut-il ou non abréger sa vie, qui paraît privée de toute conscience ? Certes, j’ai trop de respect pour la famille et les proches concernés par cette douloureuse affaire pour tenter d’apporter ma pierre à ce débat.

La leçon à en tirer serait peut-être que chacun d’entre nous laisse par écrit ses volontés, tant qu’il le peut, avant que pareille chose ne nous arrive, si cela, hélas ! venait à se produire. Je n’en vois pas d’autre.

Mais je note, par comparaison avec tout ce que je viens de développer, qu’il s’agit, en substance de donner la mort ou pas à un être humain, sans son consentement. Encore une fois, il n’est pas question, ici, de prendre parti dans ce terrible débat.

Or, voyez comme au même moment, en d’autres endroits de la planète (comme par le passé, je le répète) on se soucie peu de la vie des hommes. Quel contraste !

Voici l’homme : ici l’on a le respect de la vie, ce qui paraît évident ; là, la vie ne compte plus, on tue à tour de bras…

Quel sens donner à tout cela ?...

N’est-on pas dans l’absurde même ?...

Prenons garde, mes sœurs et mes frères, l’abîme n’est jamais loin, et nous le côtoyons souvent sans le savoir…

Ne libérons pas ces forces que nous ne serions plus en mesure d’étouffer, une fois déchaînées. Un peu à l’image de cette nature que nous avons déréglée, et qui s’emballe, sans que nous y puissions désormais quoi que ce soit…

Observez les débats politiques actuels, en vue des municipales : que ne se dit-il pas comme saloperies ?... Pour quel enjeu ?...À quoi n’en arrive-t-on pas ? Mais ces femmes et ces hommes devraient au contraire faire montre de retenue, au lieu de déchaîner les passions stupidement.

Spectacle navrant, oui, mais plus encore : inquiétant. Il montre que notre société, peu à peu, dérive vers ces rivages fangeux qui risquent de libérer les démons dont je parle…

Je le répète : ne libérons pas ces forces que nous ne serions plus en mesure d’étouffer, une fois déchaînées !



[1] Sérieusement : vous n’avez jamais été témoins d’abus de pouvoir ?...

[2] De fait, cet homme fut tué en direct : on entendait la foule et les commentaires du journaliste qui assistait à la scène…

[3] Or, personne, à ce jour, n’a apporté la preuve formelle de l’existence d’un ou de dieu(x) éventuel(s) !

[4] …souvent minoritaires, mais pas seulement : voyez comment se comportent les grands trusts mondiaux – semenciers qui bloquent les silos alors que des milliers de gens meurent de faim en Afrique, etc…

À travers Champs N°46

Mardi 11 février 2014

 

Avancer tout droit, c’est tourner en rond

 

Ayant souvent la tête dans les nuages, je me devais de les suivre. Ce que je tentais de faire par la pensée ce matin.

« Mais au fait, s'interroge la Libre Belgique, combien pèse un nuage ? Des tonnes. Vous avez bien lu : des tonnes. Plus le nuage est étendu, plus il contient de particules d'eau et de glace. Avec une densité d'eau d'environ 0,5 g/m3 un nuage de 100 km3 pèse jusqu'à 500 000 000 kilos, explique le quotidien belge. Autrement dit des dizaines de milliers de poids-lourds ou d'enclumes (ou de frites : NDLR) » [Courrier international 03 septembre 2013]

Cet encart n’était qu’une anecdote pour aiguiser l’appétit de votre intellect[1]. Car ce n’est pas cela qui m’intéresse ce matin.

J’ai suivi les nuages qui vagabondent au-dessus de nos têtes (par l’esprit, rassurez-vous). Heureusement qu’ils vagabondent, d’ailleurs, vous l’avez compris : s’il leur prenait la fantaisie de choir d’un coup, et non en milliards de gouttelettes fines, je ne serais plus là pour en parler, ni vous pour me lire. Songez-y de temps en temps : rien que les grêlons, parfois, ça fait mal…Alors, ne serait-ce qu’un gros morceau de nuage…ce que craignaient nos ancêtres : que le ciel ne leur tombe sur la tête !

Mais je m’éloigne de mon sujet.

 

Ainsi donc, j’ai observé la course des nuages. Elle  semble rectiligne : en avez-vous vu faire des zigzags ? Pas de doute : ils foncent tout droit comme sur une autoroute. Jusqu’où, au fait ? Mais voyons…ils font le tour de la terre, qui est…ronde. À supposer qu’ils n’aient pas disparu en cours de route, bien sûr.

Ainsi, ce mouvement apparemment rectiligne est courbe, circulaire, pour être précis. Ou, tout du moins, en partie, donc ils décrivent un arc de cercle. Même mouvement que les ailes du moulin ou de l’éolienne, pour être dans le vent…

Alors, je me suis dit que notre vieille Terre, elle aussi fonçait dans l’espace, selon une trajectoire courbe, vaguement circulaire, paraît-il, autour du soleil.

Considéré de très près, tout mouvement courbe peut sembler rectiligne.

Ce qui m’amène à imaginer un objet dans l’espace. Tenez : Voyager 2, par exemple. Les hommes ont lancé comme avec une catapulte ce paquet de ferraille vers le lointain inconnu. J’espère qu’il n’entrera pas en collision avec un autre engin habité par des extraterrestres qui croiserait lui aussi dans l’espace interstellaire, ce serait ennuyeux.

Et je m’interroge : sa trajectoire est-elle rectiligne ou courbe ? Car, sachez-le, là où il évolue au moment où j’écris ces lignes, il a quitté la zone d’attraction solaire. Et là, il n’y a rien. Rien sur des distances énormes en tous sens. Il n’y a donc aucun repère alentour. Bien malin qui peut dire si sa trajectoire est rectiligne ou courbe. Car, sans repères, impossible de déduire des positions successives qui permettraient d’établir une localisation dans l’espace, une vitesse, donc, la notion de temps, telle que nous l’entendons sur Terre perd son sens. Tout est relatif, évidemment, mais ça, vous le saviez déjà, quelqu’un de très célèbre l’a énoncé au siècle dernier…

Vu de la Terre - quoique, à cette distance, on ne le voit plus, on perd sa trace - on peut encore déterminer sa position supposée, en fonction de nos connaissances actuelles de la physique et du paysage galactique dans lequel nous baignons. Mais moi je pense que tout objet plongé dans un environnement totalement démuni de repères, censé évoluer, se trouve au centre d’une sphère imaginaire de vide considérable, hors influence de quoi que ce soit : à ce stade, avancer ne signifie rien, reculer pas plus (pas de haut, de bas, de gauche, de droite – tiens, ça c’est un avantage…) ; être même devient une interrogation. Seule la force de notre esprit nous dit que Voyager 2 existe encore, quelque part dans l’immensité du vide et des ténèbres.

Sans repère, espace et temps semblent des notions inadaptées à notre pensée.

Pourtant, des choses voyagent à travers ce vide colossal : la lumière, en particulier. J’y reviens (voir À travers champs N°5) !

Il apparaît clairement (parlant d’elle, c’est la moindre des choses) qu’elle nous parvient après un très long voyage, quelquefois. Les savants, qui mesurent tout, vous diront sa vitesse (≈300 000 km/s) et sa trajectoire (rectiligne). En fait, corpuscule ou onde, se déplacerait-elle en sinusoïde, que cela ne changerait pas le résultat : elle franchit des distances colossales à cette vitesse fantastique. Il lui faut, pour celle venue des objets lumineux les plus lointains, environ 13 milliards d’année pour nous parvenir. J’espère que je ne dis pas de bêtise. Voilà qui nous donne une petite idée d’où nous sommes, et de ce que nous sommes. En effet, nous sommes au centre d’une sphère d’observation de 13 milliards d’années-lumière. En tous sens, donc.

À ce stade, qu’est le temps ? Qu’est l’espace ? Qu’est la vitesse ? Toutes nos notions spatio-temporelles humaines perdent leur sens. Pour moi, en tout cas. Et ça permet de relativiser notre importance sur Terre, dans le système solaire, dans notre galaxie même. Pour ma part, je considère que l’âge de notre planète déjà, donne une idée de notre importance, ou plutôt de notre insignifiance, à titre personnel comme à titre global. N’en a-t-elle pas vu défiler, des humains avant moi, dont, pour la plupart, on n’a gardé aucune trace ?...

Vanité, tout n’est que vanité.

Voilà où m’ont mené mes nuages, ce matin…

 



[1] Je vous ai déjà parlé du poids des nuages dans une séquence précédente

À travers Champs N°45

Mercredi 28  décembre 2014

 

La tour de Babel

 

Genèse 11 :

5 : Alors Dieu descendit pour voir la ville et la tour qu’avaient bâties les fils des hommes.

6 Après cela, Dieu dit : « Voici, ils sont un seul peuple et il y a une seule langue pour eux tous, et c’est là ce qu’ils commencent à faire. Eh bien, maintenant rien ne sera irréalisable pour eux, de ce qu’ils peuvent se proposer de faire. 7 Allons ! Descendons et là confondons leur langage pour qu’ils n’écoutent pas le langage l’un de l’autre. »

 

[Sciences & Avenir Oct-Nov 2013 Hors série : voir le scan ci-dessus]

 

Il semble que ses créatures rattrapent Dieu. Où cela s’arrêtera-t-il ?...À moins que cette frénésie de découvertes scientifiques n’ait jamais de fin  (ça, je le pense, sauf à mettre un terme à notre humanité…) ?...

Une chose est sûre : l’homme est devenu l’égal de son Créateur. Si celui-ci existe. Ceci dit, qui dorénavant, s’empêchera de penser : « Alors, notre Dieu, (Allah, ou …donnez-lui le nom que vous voulez : le Créateur…) n’était qu’un expérimentateur de labo derrière des cornues et des éprouvettes ?... » ?

Qui, dorénavant, s’empêchera de penser : « Je suis l’égal de Dieu : je crée la Vie… » ?

Qu’il y ait ou non un Créateur, peu importe, au fond. La première question qui me préoccupe plutôt, c’est la suivante : « Pourquoi faire ? » Oui, j’ai lu l’article, mais ça ne me convainc pas. Je connais trop l’humain…Qui peut croire un instant que cela ne sera pas exploité à des fins mercantiles ? Peut-être pas par l’inventeur (quoique…), mais je ne me fais pas de bile, les loups vont se ruer sur la poule aux œufs d’or.

Autre question : « Quelles monstruosités vont nous créer ces apprentis-sorciers ? » Car nul ne sait ce qui sortira du chapeau : nouveaux microbes, bactéries tueuses ...pour commencer ; ensuite, on créera de plus en plus complexe…Mon Dieu ! J’en ai des frissons ! Quand on voit quelles armes notre humanité est capable de créer…pour tuer. Là, à ce propos, il y a un non-sens. Notez que ce n’est pas le premier : voyez plutôt : les uns s’échinent à fabriquer des armes de plus en plus efficaces pour tuer le plus de monde possible d’un coup, d’autres s’acharnent à faire naître nos enfants, à soigner les malades, à lutter contre la mort, en somme ; certains font tout pour affamer et opprimer les plus démunis, d’autres font tout pour leur venir en aide (MSF, Action contre la Faim…). Quelle absurdité !

En fait, je comprends Dieu : Il avait raison. Le concernant, je me demande seulement pourquoi, à ce moment-là de sa réflexion, il n’a pas détruit totalement l’humanité[1] : c’eût été plus efficace. De toute façon, tôt ou tard, c’est ce qu’il va arriver. Plus tôt, ça aurait évité d’abîmer notre Terre et toute sa biosphère, c’est tout…

 

Quant aux tours, comme vous le savez, la course à la plus originale (entre autres critères, qui ne manquent pas dans ce concours fou) a fait naître un projet très intelligent : Infinity.

Infinity se dressera  près de l’aéroport de Séoul, à 453 mètres de haut (elle n’arrive pas en tête[2]), avec cette particularité surprenante : elle sera invisible (à volonté, bien sûr).  Je trouve ça très intelligent. Surtout pour les aéronefs, qui ne la verront pas. Mais il paraît que c’est prévu. Il y a possibilité de la faire réapparaître à volonté. Pour ce faire, il sera agencé tout un système d’écrans et de caméras. Ces dernières filment le paysage de derrière et le projettent sur l’écran de devant. C’est pas beau, ça ? Mais, écologie oblige, un système de diffusion de sons à basse fréquence a été pensé également pour dissuader les oiseaux de s'écraser sur la tour. Pour les avions, le constructeur précise (on est quand même à proximité d’un aéroport) : « La construction du bâtiment tiendra compte des couloirs aériens existants. Des avertisseurs lumineux…signaleront également sa présence. » Ouf ! On est rassurés !

Au fait, que coûtera cette petite fantaisie ?...Tiens, cela n’est précisé nulle part !

J’attire votre attention, cependant, sur une précision de taille : cet édifice sera rendu invisible par modestie, afin que ses commanditaires ne paraissent pas présomptueux, car, vous savez, des méchantes langues disent que, généralement, l’on veut faire ces tours très hautes pour étaler  (façon de parler) sa puissance ou sa richesse : ben, justement pas là !

Au fait : « À quoi cela sert-il d’édifier de telles tours ? En cas de séisme, ou de vents extrêmement violents (ce qu’on nous prédit par ailleurs), leur chute serait-elle anodine ?... »

J’en ai fini avec les tours et les nouveaux Dieux de labos.

 

Tant que j’y suis, je ne résiste pas à vous livrer cette autre info scientifique[3], tout aussi prometteuse que la précédente : « Pourra-t-on un jour reconstruire, grâce aux cellules souches, les organes lésés de notre corps ? Les essais cliniques démarrent à peine, mais certains rêvent déjà d’éternelle jeunesse… »

Tout est dit.

Poser la question c’est la résoudre, à notre époque. Question de temps. Comme le constatait Dieu en son temps (voir plus haut).

Les fous ! L’éternelle jeunesse ! J’ai bien compris : réparer les dégâts dus au vieillissement.

Mais alors ne rêvez pas : primo, ce sera réservé aux riches ; secundo, on va vite augmenter la population mondiale, avec ce système. Forcément, si les vieux ne meurent pas pour faire de la place aux jeunes, comment fera-t-on ? Remarquez, il suffira d’augmenter la misère (ça ne devrait pas être trop dur, c’est bien parti), les guerres (là aussi c’est bien parti), certaines maladies (on sait faire : avec la pollution, ça marche déjà bien) pour compenser.

Ne va-t-on pas vers un monde bipolaire : une élite au pouvoir (minorité d’intouchables), une masse de moutons taillables et corvéables à merci ?...C’est déjà le cas.

Fermez le ban !

 



[1] Il y a pensé, bien sûr : le Déluge semble le confirmer, mais il a donné une petite chance à Sa créature : après avoir été ballottée pendant plus d’un mois sur les flots en furie sans avoir coulé, les naufragés sont parvenus sur la terre ferme, où ils ont à nouveau proliféré… ; étrange affaire…

[2] La tour Burj Khalifa, de Dubaï s’élève à 828 mètres ! Plus fort que la tour de Babel !

[3] C’est toujours dans le même numéro de S & A : la page d’avant

 

À travers Champs N°44

Lundi 23 décembre 2013

 

Entropie

 

Si j’ai bien compris, entropie et chaos ont un sens assez voisin. Un exemple.

Je viens de verser le contenu de mon linge propre et sec sur la table de ma cuisine, dans le but de le repasser. Et là, je m’interroge. Ce tas de linge, qui se trouve dans le désordre le plus complet, bougera-t-il, si je n’y mets bon ordre ? Voilà le mot clé : l’ordre !

En effet, le désordre, ou le chaos, d’une certaine manière, c’est de l’entropie. Une inertie, dans le cas de mon linge, durable si je n’y applique aucun effort. Mais il y a mieux. Je constate que pour que ce tas de linge disparaisse de ma table de cuisine, où il n’est visiblement pas à sa place, il me va falloir développer différentes opérations qui, toutes, demandent de l’énergie. Évidemment, au tout début, il y a ce désir d’ordre qui me caractérise un peu. Sans être un parangon de rangement, je ne supporte pas de vivre dans le désordre. Donc, pour mettre fin à ce soi-disant désordre, je vais y appliquer mon énergie. Mais pas seulement.

Je dois tout d’abord approcher la table à repasser, la déplier, sortir du placard le fer à repasser, décrocher la rallonge électrique, la dérouler, raccorder tout cela à la prise électrique, remettre de l’eau déminéralisée que je prends dans une bouteille, que je vide dans un verre à bec verseur, pour emplir le réservoir… Après le repassage, il me faudra plier et ranger ce linge dans les tiroirs Ouf ! Je me sens déjà fatigué ! Bien sûr. Mon corps sert ma volonté et développe des actions qui mettent en jeu muscles, tendons, nerfs, etc…bref, je donne de l’énergie pour faire. Au passage, je dois remplacer cette dépense d’énergie par les aliments[1], que je n’obtiens pas sans développer de l’énergie : celle nécessaire à leur achat, leur transport, leur préparation…Mais cela ne suffirait pas. Si mon fer était froid, je ne repasserai sans doute pas mon linge de façon aussi efficace. Chacun sait qu’il y faut de la chaleur. Chaleur est énergie ! Mais oui ! L’électricité se transforme en chaleur, mais c’est toujours de l’énergie[2].

Ainsi, pour toute action que je déploie pour mettre de l’ordre dans le désordre, je dois chercher de l’énergie. L’énergie combat l’entropie.

Bon. C’est un point. Mais je veux revenir sur l’autre face cachée des choses.

J’ai dit au tout début de ma réflexion : je n’aime pas le désordre. C’est le point de départ de tout le processus. Je lisais ce titre d’un article de Sciences et Avenir, dont vous savez depuis longtemps que j’en suis un lecteur assidu : « De l’ordre dans le cosmos ».

Il s’agit d’une étude sur les premiers découvreurs du ciel, si l’on peut dire. Il semble que les Assyriens aient été les premiers, non pas à « découvrir » le ciel, car, selon moi, de tous temps les humains ont levé les yeux vers la voûte étoilée en se posant des questions, mais à tenter d’y mettre de l’ordre en notant leurs observations et en nommant les objets célestes. Ce qui rejoint ma démarche personnelle. Depuis toujours, j’ai cherché à me repérer dans le ciel. Non pas pour être savant, ce qui serait absurde, mais simplement pour m’y retrouver, car je me sens perdu en terre inconnue. J’ai besoin, pour être rassuré, de retrouver des repères. Ainsi, débarquant un jour en terre africaine, je me sentis terriblement angoissé de n’y retrouver aucune espèce végétale connue de moi. Je me hâtai alors d’apprendre à reconnaître les arbres et de les  nommer. Nommer aide à fixer les repères. Je n’ai rien fait d’autre avec le ciel nocturne. J’ai appris à nommer peu à peu les constellations, les étoiles, les planètes. Au fur et à mesure que j’étais capable de les retrouver au-dessus de ma tête, je me rassurais. Ainsi naquit mon modeste savoir. Le savoir rassure. Quand je me promène dans la forêt, j’aime à retrouver mes espèces, et les nomme mentalement. Ainsi, je me sens familier des paysages partout où je puis me retrouver un peu. Or, pour ce faire, il faut de l’ordre. Je reviens au titre de l’article cité plus haut : en effet, me dis-je en lisant ce titre, l’humain a besoin d’ordre. C’est sans doute ce qui est à l’origine de son évolution. Mais aussi de la pollution, puisque pour mettre de l’ordre, il faut de l’énergie, et que, dès lors qu’on consomme de l’énergie, on le sait maintenant, on pollue.

Je suis heureux de penser que d’autres, dans les temps les plus reculés ont, comme moi, eu le désir de mettre un peu d’ordre dans le chaos. Oui, je sais, il n’y a pas que le désir d’ordre, mais aussi la curiosité. Je ne l’occulte pas.

Mais je me demande, revenant au chaos du monde – je pense ici à notre univers – quel sens donner au mot chaos. Est-ce entropie pure ? Seulement ?...Ou n’y a-t-il pas malgré tout derrière tout cela quelque velléité d’ordre ? Je n’ai pas forcément pensé à Dieu. Tout est possible. Mais ce chaos apparent n’obéit-il pas à des règles ? Dès lors, si le chaos obéissait à des règles, ce ne serait plus le chaos ? Mais rien ne nous dit que l’univers, c’est le chaos, puisque nos scientifiques y découvrent des règles…Ou bien ne découvre-t-on des règles que parce que l’on désire qu’elles existent ?...Je sais très bien les deux écoles qui s’ouvrent à cette bifurcation du raisonnement, mais je n’opte pas plus pour l’une que pour l’autre. Peut-être les deux entités se combattent-elles depuis l’origine du monde ?...

J’observe, un peu comme un spectateur étranger à la scène…Je me sens très proche d’une bizarre sensation d’euphorie, que me procure cet état de pensée, cette perception des choses universelles, et c’est vraiment très étrange. Il n’y a pourtant pas de chaos dans mon esprit ?...

L’être humain n’est-il pas, en effet, tout à l’opposé de l’entropie ? N’est-ce pas le modèle optimal de l’organisation ? Nous ne sommes, à la vérité que de remarquables chefs d’œuvre d’organisation : notre organisme offre le spectacle d’un ensemble gigantesque de cellules en interaction, remarquablement organisées, le cerveau à lui seul en est l’archétype.

Donc, je ne puis pas être en chaos dans mon esprit. Mais, à la vérité, cet équilibre remarquable est si fragile…

Tiens ! M.Kalachnikov est mort aujourd’hui…



[1] Je pense au guépard, qui, comme tout le vivant, doit manger pour vivre : il dépense une grande énergie pour capturer sa proie, qu’il rattrape généralement à la course ; s’il la rate, il a moins de chance d’attraper la suivante, puisqu’il a moins d’énergie en réserve, et a donc moins de chances de survie…or la mort n’est que le triomphe de l’entropie…

[2] L’évolution de l’humanité, en se complexifiant, est devenue de plus en plus énergivore, d’où les problèmes que l’on sait ; mais, à vivre sans confort, somme toute, en primitifs, sans un tas d’objets contraignants et encombrants, l’humanité aurait-elle besoin d’ordre ? L’ordre ne serait-il nécessaire que dans les sociétés denses…

 

À travers Champs N°43

Samedi 7 décembre 2013

 

Incompréhensible !

 

Ecouter la radio réserve des surprises.

Ainsi j’entends que certaines stations de sport d’hiver françaises se dotent d’équipements totalement surprenants. Les hôtels les plus luxueux de ces stations d’altitude investissent des milliards dans des piscines hypersophistiquées, avec courants, vagues, etc…Ils cherchent à recréer l’ambiance de la mer à la montagne pour plus de dépaysement, à grands coups de sommes faramineuses. Déjà la plupart du temps la neige est artificielle (je n’ai toujours pas compris pourquoi on fabrique de la neige qui coûte cher : il y en a, on skie, il n’y en a pas, on ne skie pas, pour moi, c’est simple et naturel). Ce que je comprends surtout, c’est que le fossé se creuse entre les riches et les pauvres. Ces fortes sommes d’argent ne seraient-elles pas mieux placées pour aider à la réduction de la misère ?...Est-ce bien nécessaire d’apporter toutes ces choses onéreuses pour la simple distraction d’une poignée de fortunés quand le peuple des travailleurs ploie sous la charge et souffre ?

Je considérais l’autre jour le football. J’ai aimé y jouer, étant jeune. À cette époque, pas de professionnalisme. Donc pas d’argent. J’entends les sommes prodigieuses que touche un joueur pour distraire les foules, j’entends parler de « mercato » (sorte de marché humain, où les joueurs se vendent et s’achètent comme du bétail), j’entends parler de paris sur les performances  de ces esclaves richissimes…et je ne comprends pas.

Est-ce bien juste qu’un petit nombre touche de telles sommes pour amuser la galerie ?...Ne mène-t-on pas le troupeau par le bout du nez avec ces divertissements de masse (panem et circenses) ?

J’entends parler d’un certain chef d’une grande entreprise (Peugeot, pour ne pas la nommer) qui part en retraite avec une somme colossale, tout à fait disproportionnée à celles que touchent les ouvriers de cette usine qui lui ont permis de s’engraisser à ce point : est-ce juste ? Il paraît que sous la pression de l’indignation que cela a fait naître, ce monsieur aurait renoncé à cette obole. C’est tout juste si on ne le félicite pas pour cela…Mais dans quel monde vivons-nous ?...Ce n’est même pas scandaleux ou honteux, c’est criminel !

Comment la révolte ne gronderait-elle pas dans l’esprit des simples travailleurs honnêtes ?...Enfin, je dis « honnêtes » : quelle ne fut pas ma surprise de constater il y a quelques années que les garages de la plupart des ouvriers d’une grande usine de Charente-Maritime regorgeaient de tout le matériel imaginable nécessaire au bricolage. Rien n’y manquait, je vous assure. L’on ne s’en cachait point, on en riait. « Mais enfin, dis-je, quelque peu ahuri, mais c’est malhonnête, c’est du vol ; tout ce matériel, vous l’avez dérobé à votre employeur ! »

Il me fut répondu par un représentant syndical jovial : « Parce que vous croyez naïvement que le patron ne nous le fait pas payer ? C’est répercuté sur nos salaires, vous pouvez en être sûr. »

Peut-être…N’empêche que j’ai de la peine à comprendre et à accepter cette nouvelle donne. Je veux bien que les valeurs doivent changer. Mais sur ces nouvelles bases, croyez-vous vraiment que notre société sera viable longtemps ? J’en doute. En fait, je n’ai pas été formaté pour ce système de choses. Je me sens dépassé (c’est le fait de l’âge, assurément) par cette façon de vivre (et de penser) de mes contemporains. J’ai déjà beaucoup de peine à m’habituer à la consommation, au gaspillage, à la circulation des poids lourds, à la création d’une LGV qui tronçonne nos campagnes de la plus belle façon…

Peut-être est-ce pour cela que je n’ai parfois plus l’envie de me battre ? Pourtant, il ne faut pas baisser les bras.

Quand je repense au temps de mon enfance, qui n’a pas toujours été rose, je ressens pourtant comme un sentiment de plénitude, de paix, qui semble faire défaut à ce monde qui galope et consomme, sans vraiment prendre le temps de considérer la nature, et qui oublie même son humanité…

À travers Champs N°42

Dimanche 15 septembre 2013

 

De l’avenir de notre « humanité »

 

Que celles et ceux qui ne veulent pas y croire ouvrent leurs yeux et leurs oreilles !

Les derniers doutes sont levés  !

Déclaration du Giec[1] :

« Les activités humaines sont en train d’affecter profondément l’équilibre énergétique de la planète en changeant la concentration atmosphérique des gaz à effet de serre et en modifiant l’occupation des sols. »

Bref, on est passé des probabilités aux certitudes.

La température globale des terres et des océans a augmenté de 0,8° depuis 100 ans, mais, sur les 25 dernières années, elle n’a jamais été aussi forte (0,5° depuis 1979).

 

Notre planète verra une augmentation des températures située entre 3,6° et 5,3° vers le milieu du siècle…

 

Conséquences de ce réchauffement …

* L’eau des océans est plus chaude, les sols se réchauffent, les températures au sol s’élèvent (canicules, sécheresses : incendies…)

* On assiste, impuissants, à la fonte des banquises et des glaciers : hausse du niveau des mers et océans : aucun des grands milieux naturels de la planète n’est épargné par des modifications profondes : îles et côtes submergées (populations chassées de leurs habitats ; modification de la répartition des espèces végétales et animales,…), etc …

* Perturbations du cycle de l’eau : on en perçoit désormais les effets : pluies à répétition, moins nombreuses mais plus violentes, cyclones, sècheresses…

…et de la pollution atmosphérique …

* La production massive de gaz toxiques dans l’air (notamment les fameux dioxyde de carbone -CO2- et dioxyde d’azote – NO2-, l’ozone, le soufre, etc…) entraîne une augmentation significative des maladies respiratoires (asthme, sensibilité accrue des bronches aux infections microbiennes chez l’enfant, etc…) et des irritations de la gorge et des yeux.

 

Les pics de pollution atmosphérique par ces gaz sont associés à une surmortalité liée à des problèmes respiratoires et cardio-vasculaires…

 

 

Conclusions de l’Indien Rajendra Pachauri, Président de cette institution, le Giec :

« Adopter les conclusions du Giec, c’est accepter de réduire très fortement la combustion du gaz, du pétrole et du charbon qui sont majoritairement utilisés aujourd’hui pour produire des biens, chauffer les bâtiments, et faire voyager marchandises et personnes. »

 

Hélas ! Si la plupart des chefs d’États et de gouvernements se déclarent conscients du problème, leurs paroles sont peu suivies d’effets. Les efforts demeurent insuffisants.

 

Ajoutons à cela le risque nucléaire qui va croissant un peu partout sur la planète, par l’installation de nouvelles centrales énergétiques alors qu’aucune solution valable pour le stockage et l’élimination de leurs déchets n’a été trouvée…

 

Ajoutons-y aussi un zeste d’accroissement de la misère et de la pauvreté de la population mondiale…

 

Pour ma part, concernant notre humanité, je me demande fortement quel bel avenir est devant elle, ou plus exactement, si elle a encore un avenir…

 

[Ce billet m’a été inspiré par la lecture du dernier Sciences & Avenir – Septembre 2013- N°799]



[1] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

 

À travers Champs N°41

Dimanche 18 août 2013

 

Chimères

 

Voici que j’apprends qu’un grand chirurgien italien (cf Sciences & Avenir N°798 d’août 2013) envisage très sérieusement de tenter une greffe inédite : celle d’une tête humaine !

Je vais essayer ici de démêler les sentiments que fait naître en moi cette annonce.

Tout d’abord, précisons les choses : il s’agit de rabouter la tête d’une personne qui vient de décéder avec le corps d’une autre qui vient de perdre la sienne.

Certes, on nous a habitués aux entes et aux chimères. Depuis les greffes sur les arbres fruitiers, que ne greffe-t-on pas avec succès de nos jours, grâce aux progrès fantastiques des technologies les plus récentes dans tous les domaines ? Des mains, des pieds, des foies, des orteils, des oreilles …On rabote par ci, on rajoute par là, on bricole de façon remarquable sur le corps humain. On pourra bientôt, si ce n’est pas déjà fait à l’heure où j’écris ces lignes, vous implanter un foie de porc en remplacement du vôtre, pourquoi pas aussi des gènes de canard ou de singe, que sais-je encore ? Dans ce domaine, il suffit d’un peu d’imagination, et, peut-être aussi, d’un peu d’appât du gain ?

 

Bon, au total, pourquoi pas ? Même si j’ai parfois de la peine à suivre, sur le plan éthique, mais, passons.

Aujourd’hui, donc, il est sérieusement question de trancher deux têtes pour en greffer une sur le corps d’un autre individu.

 

Qui sera qui, alors, si ça marche ?

C’est ma tête qui te fait marcher, en ce cas, qui préside à tes mouvements, à l’orchestration de la quête de ta nourriture, de l’évacuation de tes déchets, de tes désirs (sexuels et autres…). Alors, qui es-tu, toi qui me prêtes tes jambes et tes bras, tes viscères et tes os, tes muscles et tes nerfs, ta chair ? Et moi, qui suis-je dans le corps d’un autre ? Dis-moi : est-ce mon âme ou la tienne, ou sommes-nous deux dans la prison de ce corps et de ce crâne ?

 

Voici que je te prête mon cerveau, si tu me prêtes ton sexe. Au fait, j’étais un homme, et toi tu étais femme, je crois ? Cela ne te gêne-t-il pas ? Moi, un peu, quand même. Mais, dis-moi, je pourrais devenir maman, aussi ? Voilà une grande révolution, qui risque d’altérer un tant soit peu ma personnalité. Quoi ? Le Professeur Italien y a pensé ? Il a prévu quelques antidépresseurs et quelques heures de rééducation psychologique ? Ah bon ! Me voilà rassuré. Rassurée, devrais-je dire, non ? Je ne sais plus au juste. Qu’en penses-tu, mon corps ? Non, ton corps ? Ah mais, c’est vrai, où avais-je la tête ? C’est vrai, tu ne penses pas, toi. Toi, c’est moi. Bizarre tout de même, cette situation.

 

Je repense à ce pauvre Louis XVI, qui s’est fait proprement décollé le chef. Si l’on avait pu conserver ce digne chef-là, il n’aurait pas manqué de fans, de nos jours, à vouloir lui donner leur corps. Eût-ce été Louis XVI ? Pas vraiment. Il ne serait plus resté au pauvre bougre volontaire pour lui prêter son torse et ses membres que sa tête pour se féliciter d’avoir ainsi connu les délices de la royauté. Oui, mais que ferait-on de sa tête à lui ? Bonne question. Il faudrait lui trouver le corps d’un autre, à qui l’on décollerait la tête à son tour…On n’en finirait pas. Pour peu que tout le monde soit d’accord, passe encore. Mais s’il y a un récalcitrant dans le lot, comment fait-on ? Après tout, on pourrait tout aussi bien lui coller une tête de veau, avec du persil dans les narines. Ou une tête de loup, pour enlever les toiles d’araignées. Oui, je sais, l’intelligence d’un veau, ce ne serait pas terrible. Rassurons-nous : on pourrait greffer dans cette tête de veau le cerveau prélevé sur un autre humain. La greffe du cerveau est sûrement plus simple à réaliser que celle d’une tête. Et tout rentre dans l’ordre. D’ailleurs, dans quelques années, vous pourrez choisir sur catalogue la tête que vous voudrez, quand la vôtre ne vous plaira plus, ou celle de votre voisin, de votre belle-mère ou de votre chère épouse. D’ailleurs, il est tout à fait envisageable, dès lors, de faire greffer la tête de votre maîtresse sur le corps de votre épouse, ou vice-versa…Ou vous faire greffer la tête de votre chien pour mieux plaire à votre chère et tendre moitié, qui semble vous préférer le chien. Avec votre cerveau, quand même. Et puis, tant que vous y êtes – si, toutefois vous en avez les moyens – vous pourrez aussi changer votre corps pour un autre plus séduisant. Vous voyez le tableau ? Techniquement, rien d’impossible.

Voilà qui promet des jours réjouissants !

Je crains d’y perdre ma tête, dans ce maelström ! Vertigineux ! Ah ! Que c’est beau la science et ses progrès !

Faites de beaux rêves : la guillotine va reprendre du service !

 

À travers Champs N°40

Mardi 23 juillet 2013

 

Curiosité

 

Voici deux titres d’articles de ma revue scientifique préférée :

« Demi-victoire sur la conjecture de Goldbach » et « Il y a eu de l’oxygène sur Mars ! »

Quelques mots d’explication.

Ce problème mathématique - la conjecture de Goldbach -  fut posé en 1742 par un mathématicien allemand, Goldbach, à son collègue suisse Euler, à l’occasion d’une correspondance. Voici en quoi elle consiste : tout nombre entier strictement plus grand que 1 est la somme d’au plus trois nombres premiers.

Je vous laisse le soin de prendre vos crayons et de vous y atteler…

Ainsi, la démonstration vient d’en être effectuée pour les nombres impairs. Reste les nombres pairs…Vous avez vos chances.

Pour parvenir à ce résultat, « Harald Helfgott a utilisé la toute nouvelle machine parallèle NEC mesoPSL, installée à l’Observatoire de Paris, pour vérifier la conjecture jusqu’à un nombre très grand : 8,875 x 1030, soit un nombre à 31 chiffres ».

Quant à la seconde information, en voici le détail.

« Il y a 4 milliards d’années, Mars baignait dans une atmosphère riche en oxygène, alors que la Terre n’en possédait pas encore. C’est la conclusion de l’analyse de météorites martiennes et de données enregistrées par le défunt rover martien Spirit dans le cratère Gusev. »

Bon, c’est passionnant, n’est-ce pas ? Pour moi, en tout cas, j’y trouve une certaine excitation intellectuelle. Je le concède volontiers. Mais si je réfléchis, avec un peu de recul, je me demande quelle énergie a été mise en œuvre pour parvenir à ces informations.

Prenons la première.

Tant que je gribouille des calculs sur une feuille blanche avec mon crayon, je ne mobilise que ma matière grise. À partir du moment où je fais intervenir un supercalculateur, une machine, je me dis qu’il y a un coût. Le coût de la machine. De sa conception (les heures de travail des ingénieurs doivent être rémunérées), de sa fabrication, de son entretien, de son utilisation. Je ne saurais chiffrer ce coût. Mais il est réel.

Pour ce qui est de la seconde, la dépense saute aux yeux, même si, là encore, je suis incapable de la chiffrer. Il y a, de la même façon, le coût de la conception de la machine qui roule sur le sol de Mars (le rover), celui de la fusée qui l’a transportée là-bas (là aussi, il serait difficile de l’évaluer : conception, fabrication, carburant, et tout ce que cela nécessite d’à-côtés pour envoyer une fusée vers Mars…) ; le coût des machines qui reçoivent les données envoyées par le rover, celui du personnel qui travaille sur ces machines, celui des scientifiques qui analysent les données…

Bien entendu, je n’avancerai pas de chiffres, là encore, mais vous pouvez me croire sur parole : c’est considérable, n’est-ce pas ?

Alors, concomitamment, je songe à ces millions d’individus, sur cette planète, mes sœurs et mes frères, qui ne mangent pas à leur faim, qui n’ont pas accès à l’eau potable, qui vivent dans la misère et la pauvreté, à tous ces enfants qui meurent chaque jour faute de soins ou de nourriture. Et je me surprends à me demander si cela est juste. Est-ce logique ? N’y a-t-il pas de l’absurdité dans ces constats ?

Pourquoi les pays riches continuent-ils de dépenser autant d’argent dans des recherches si pointues pendant qu’on laisse la plus grande partie de la population mondiale mourir de faim et de maladie ?

Est-il nécessaire d’accéder à de telles informations ? Ces résultats justifient-ils de tels investissements ?

Je sais : c’est un vieux débat, et je n’ai pas la prétention de le trancher ici.

Mais je hasarderais bien une réponse : la curiosité.

Car je ne vois guère d’autres motivations à ces recherches. Souvent, la recherche scientifique est le fait de la curiosité des chercheurs. Pas seulement, hélas ! Les intérêts matériels se profilent derrière toute recherche, dorénavant. Normal, dans une société planétaire devenue entièrement capitaliste. Donc, peu de chercheurs désintéressés. Ou, du moins, d’investisseurs dénués d’intérêts, car je continue de penser que l’excitation intellectuelle des chercheurs est le plus souvent pure, ou, pour être plus précis, que le seul intérêt qu’ils y trouvent généralement n’est que la satisfaction qu’on éprouve à résoudre un problème. Car quoi de plus passionnant qu’un problème ? La résolution d’un problème, quel qu’il soit, a pour certains d’entre nous une fascination étrange : j’en suis. Mais plus encore que ce modeste triomphe intime et fugace ressenti à la résolution d’une énigme, ce sont les stratégies à mettre en œuvre pour parvenir à la solution qui m’intéressent, et, dans une moindre mesure, l’élaboration de la question. Pour cela, je bénissais mes élèves curieux, et, loin de les renvoyer à leurs leçons, je mettais toujours un empressement prioritaire à les guider sur la voie de l’établissement de stratégies personnelles qui les mèneraient vers les réponses.

Ceci dit, la priorité ne devrait-elle pas rester l’amour de son prochain, le partage des richesses, le soulagement de la misère humaine ?

En quoi ces deux trouvailles vont-elles soulager la misère du monde ?

Voyez les difficultés qu’a la recherche à soigner le paludisme…Devinez pourquoi…

 

Mais je reconnais toutefois combien cette curiosité humaine a fait évoluer notre humanité, depuis l’aube des temps.

Encore une contradiction….sans explication.

Vous noterez que je n’ai pas évoqué les sommes investies par les hommes dans les guerres, pour tuer le plus de leurs semblables. Non seulement, elles seraient évidemment mieux placées dans le redressement des injustices, mais elles y contribuent. Cela pose aussi la question du choix des investissements. Je n’oublie pas les sommes que l’humanitaire consacre à redresser un peu les méfaits de ces guerres. Que de dépenses absurdes ! Que de comportements stériles et opposés !

Mais en ce cas, nulle curiosité. Cherchez vous-mêmes les causes des conflits, ça ne m’intéresse plus.

 

À moins que derrière la quête de l’espace il n’y ait de plus sombres mobiles : la conquête de l’espace (mot guerrier s’il en est) : une certaine caste, les plus riches, auraient-ils envisagé de coloniser les planètes voisines, pour fuir une humanité qui court à sa perte ?...Cela s’est dit, je l’ai entendu. Mais je n’y crois pas, bien sûr…

Néanmoins, je continue de révérer la curiosité, pas celle qui porte à espionner ses voisins, bien sûr. L’autre.

Alors, il suffirait de faire cohabiter ces deux motivations fondamentales humaines : curiosité et amour de son prochain. Pas si simple !...

Lundi 1er juillet 2013

Veuillez m'excuser : je n'ai pas trouvé de photo pour illustrer mon propos d'aujourd'hui...

À travers Champs N°39

Lundi 1er juillet 2013

 

Du silence

 

La dernière fois, je vous ai parlé des oiseaux, de leurs chants. Une autre fois, je vous ai parlé du bruit. Aujourd’hui, j’aimerais évoquer le silence.

 

Le silence, ou…les silences ?...

Car il arrive qu’on parle des silences (« ses silences sont pesants… »).

On pourrait définir, dans un premier temps, le silence comme une absence de bruit, de son. Cela ne me paraît pas si mal.

Cependant, je réfléchissais, en équeutant mes haricots, dans le silence de ma cuisine, seul avec ma chienne qui reposait. Je n’avais pas mis la radio : c’est assez exceptionnel pour que je l’aie remarqué. Du coup, j’ai songé que le silence avait du bon. Or, ce silence immédiatement proche était meublé des bruits lointains de la vie de village, me parvenant par la porte et la fenêtre ouvertes : bruits de marteau (d’un charpentier travaillant sur un toit, imaginais-je), de moteurs de tondeuse ou de taille-haie, de voitures, des voix de mes voisins, cris des oiseaux…Mais j’avais cependant une véritable impression de silence. J’en conclus alors que ce silence-là n’était pas absolu, mais relatif. Pourtant, je lui attribuais vraiment le substantif silence. Car tous ces bruits étaient lointains, conférant à ce silence-ci la qualité de la paix. Ce silence relatif était apaisant. Pour moi, je le note, la paix est une des composantes du silence.

Je passe des heures et des heures seul. Le soir, aucun bruit ne trouble ma solitude. Si ce n’est que le ronronnement de ma machine (l’ordinateur, bien sûr). De loin en loin la nationale voisine m’envoie des échos des moteurs de ses véhicules. C’est tout. Parfois un chien aboie, auquel, si cet appel n’est pas trop ténu, répond ma chienne : là, le silence est vraiment rompu, puisqu’elle est à mes pieds !

Ce silence n’en est pas un, véritablement, car je n’en ai pas conscience. Cependant, il est bien réel, palpable, quand j’y songe. Seulement voilà, la plupart du temps, je suis occupé à écrire. Je pense, donc. Mon monde intérieur, lui, n’est pas silencieux : il est agité de toutes les idées qui naissent et se pourchassent en mon crâne. Il n’y a d’ailleurs plus que ce vacarme que j’entende, tant ce bruit est assourdissant.

Voilà bien qui est étrange : je puis ne pas être dans le silence complet, et me penser dans le silence, comme je puis être dans le silence, sans en prendre conscience !

 

Autre chose de merveilleusement simple et magique, à mes yeux.

Je suis, je le crois, un peu musicien. Amateur, certes, mais enfin, on s’en fiche. Pour ce que j’ai à dire, cela suffit.

Ce que j’aime beaucoup, en musique, ce sont les silences. Cela vous étonnera moyennement, probablement. Mais quand on y pense, toute musique en contient énormément. Songez que celle-ci n’est souvent qu’une alternance de sons et de silences, sinon, le plus souvent, c’est du bruit. Écoutez une sonate de Scarlatti : dites-moi si les silences ne jouent pas un rôle affectif fort ? Bien sûr que si ! Pas que dans Scarlatti, bien sûr, ce n’est qu’un exemple parmi une infinité de musiques. Au point que, souvent, le caractère dramatique, ou émouvant, d’un morceau, provient souvent de la qualité de ses silences. Observez, à ce propos, comment, en musique classique, les interprètes, en solo comme en formation, prolongent le silence qui clôt toujours le morceau.

J’ai toujours été fasciné par deux choses, prioritairement, en musique : le début et la fin d’un morceau.

 

Le début, parce que je suis captivé par le silence qui précède la première note, et aussi par la question : quel agencement de sons le compositeur a-t-il inventé pour rompre ce silence ?

La fin, pour la raison exactement inverse : m’intrigue profondément la manière dont le compositeur achève sa pièce : les ultimes notes qui précèdent le silence final.

Je remarque, pour en revenir à la musique des oiseaux, que toujours leur chant attend : il fait silence pour écouter l’éventuelle réponse à son émission.

Finalement, toute notre planète n’est qu’une perpétuelle symphonie de sons et de silences. Si l’on fait abstraction des bruits de l’humanité, c’est sans nul doute la plus belle, la plus riche, la plus impressionnante des symphonies, que nul compositeur humain n’égalera jamais.

Par parenthèse, je pourrais en dire autant du tableau vivant de la nature : il n’est, à mes yeux, tableau plus merveilleux que celui du Créateur : toujours changeant, il offre des paysages d’une variété infinie, d’une richesse d’éclairage, de nuances de couleurs absolument inimitables, somptueux, sinistres parfois, gais ou déprimants, bref, toute une palette que jamais nul peintre ne saura égaler.

Je pourrais aussi, au point où j’en suis, tirer la même conclusion concernant les senteurs : le monde des odeurs est tout aussi merveilleux. Ai-je besoin de développer ?

 

Pour en revenir au silence, il est des silences de toute nature : il en est de merveilleux, qui, dans le domaine amoureux, par exemple, sont un doux aveu, plus émouvant que toute parole. De terribles, aussi, bien sûr, qui condamnent irrémédiablement. De douloureux, des faux, des criants, bref, ne méprisons pas le silence : il est un acteur essentiel de notre vie affective.

Songez aussi qu’au milieu du silence, celui de la forêt, par exemple, vous allez capter un bruit infime. Selon que ce silence sera ténu ou profond, vous percevrez plus ou moins aisément ce bruit. Vous l’analyserez attentivement, d’autant plus qu’il sera le seul à avoir émergé du silence. C’est alors que vous réalisez de quelle qualité ce silence est fait : vous le conscientisez d’autant plus qu’un bruit l’a troublé. Vous réalisez alors l’étendue gigantesque de ce néant, par l’apparition subite d’un son, qui le renforce d’autant plus qu’il est isolé.

 

Autre chose : je pense aux citadins des grandes villes, qui n’ont jamais le silence. Et je me demande comment je ferais, s’il fallait que je vive ainsi, moi qui ai tant besoin du silence, et que le bruit dérange tant. Souvent, la musique actuelle me fait mal aux tympans, les bruits des moteurs et de toutes les activités humaines me troublent. Or, un citadin pur jus ne supportera pas le silence. Ainsi, ayant loué un logis au cœur de la montagne, en Lozère, des Parisiens sont repartis effrayés dès le lendemain matin : ils n’avaient pas supporté le silence absolu de la forêt qui les entourait !

Une dernière chose : le silence est la règle dans le cosmos : pas d’atmosphère, donc pas de son ! La supernova qui explose dans un cataclysme géant le fait en silence. Le son n’existe que sur terre, ou sur les astres ayant une atmosphère. Imaginez que le fracas des moteurs de la fusée qui décolle s’éteint totalement dans l’espace !

 

En fait, s’il est dit que Dieu inventa la Lumière pour trouer les ténèbres (deux oppositions bien marquées, un couple indissoluble…), on a oublié de dire qu’Il inventa le son, pour donner au silence sa réalité,…comme pour le bien et le mal, et tant d’autres couples en opposition complémentaire…

 

Mais, me direz-vous, silence ! Assez ! Cela suffit, de nous casser les oreilles avec ton silence, bavard impénitent !

C’est vrai. Vous avez raison. Sauf que vous venez de me lire…dans votre silence…

À une autre fois !...

À travers Champs N°38

Vendredi 28 juin 2013

 

Des oiseaux

 

Ce soir, j’ai envie de vous parler des oiseaux.

Merveilleux oiseaux !

Caractéristique principale : ils volent. Pas tous, certes. Mais enfin, c’est leur caractéristique principale, malgré tout. C’est de ceux-ci dont je veux parler. Rassurez-vous, je ne vais pas vous infliger une leçon d’ornithologie.

Je suis toujours émerveillé de voir un oiseau voler, quel qu’il soit. Les oiseaux ne s’y prennent pas tous de la même manière, mais ils évoluent dans l’air, et c’est beau de les voir se mouvoir dans ce fluide, malgré leur pesanteur. Je me souviens être resté des heures tapi au creux de sable d’une dune en Oléron, parmi les oyats, à observer le vol des mouettes. Magnifique ! Je revois encore l’oiseau quasi immobile sur les filets du vent marin, tournant sa tête vers moi, me fixant de son petit œil brillant, à un mètre. Et là, je me demande ce qu’il se passe entre cette mouette et moi. Se passe-t-il quelque chose ? Saurais-je le percevoir ? Je cherche à percer ce mystère. La mouette me regarde, je regarde la mouette, notre regard s’échange. Sans faire d’anthropomorphisme, il me semble évident qu’elle a pris conscience de mon existence, au moins. Après…

Fait-elle la différence entre un homme, un chien, un chat, ou tout autre être vivant ?...Je le pense. Tout comme nous, elle doit être en mesure d’effectuer des classements (automatiques, pas forcément volontaires, bien sûr) entre les êtres vivants, aux fins de sa survie, et des reconnaissances. En mesure d’y attribuer des qualificatifs (pas des mots, évidemment…) : dangereux, ou pas, comestible ou pas, etc…Quel concept (si je puis dire…) la mouette a-t-elle de l’humain ? Fait-elle une différence entre les humains ? Reconnaîtrait-elle un humain en particulier ?...Autant de mystères. N’empêche que ce regard échangé avec une mouette ne m’a pas paru anodin.

 

L’hirondelle, mon oiseau porte-bonheur.

Toute mon enfance bercée par la présence de ces délicieuses compagnes. Je les ai si souvent observées que j’en suis venu à croire qu’il existe des liens entre elles et les humains. J’en ai été la preuve. Je pense vous l’avoir raconté déjà. Je reste persuadé qu’entre l’hirondelle et l’homme il est un lien privilégié. Ne pensez pas que du haut de son fil électrique elle ne vous a pas vus. Bien sûr que si. Mais de là à dire qu’elle a analysé votre comportement pour décider si vous étiez « ami(e) » ou pas, je n’irais pas jusque-là. Quoique…

Combien de fois me suis-je promené seul en campagne, non loin d’un hameau, escorté des passereaux ! Ils volettent à mes côtés, parmi les haies et les buissons du chemin, tantôt me précédant, tantôt me suivant, avec des petits bruits, des fragments de chants, des appels. Ils m’observent attentivement durant toute ma traversée. Comme je ne puis interpréter leurs signaux sonores, je me contente de les écouter, de les observer, de leur parler. J’ai parfois l’impression qu’une ébauche de communication s’établit : ami ?...ami !...

 

Je pourrais multiplier les exemples pour affirmer que les oiseaux nos voisins nous observent attentivement. Ce merle me fixe de son petit œil de jais. Cette huppe qui venait picoter la fenêtre de mon bureau, me dévisageant avec curiosité…Ce moineau perché sous mon toit, à deux mètres, qui crie si fort qu’il finit par attirer mon attention : « Mais enfin, qu’as-tu, à m’appeler de la sorte ?... ». Et là, je réalise qu’en effet, il m’appelle…pour me réclamer les graines dont, chaque matin, je garnis abondamment la mangeoire, et que, ce jour-là, j’ai oubliées…Ces tourterelles qui vivent au haut du réverbère à l’année me connaissent parfaitement : toujours, de leur perchoir, elles me considèrent. Je suis certain qu’elles connaissent mes habitudes au moins aussi bien que ma chienne. Elles aussi ont appris à venir manger le grain à un mètre de moi. Curieusement, si portes et fenêtres sont closes, et que je les observe à travers les vitres, au moindre mouvement, tous ces volatiles s’échappent. Mais si la porte est ouverte, le bruit de mon chant et de ma guitare, mes mouvements, ne les dérangent nullement. Ils continuent de picorer…tout en me surveillant du coin de l’œil.

Je puis ainsi admirer toute l’année moineaux, mésanges, rouges-gorges, chardonnerets, tourterelles, merles, hoche-queues…

 

Je viens d’évoquer les relations entre les oiseaux et l’humain. Mais il est tout aussi fascinant d’observer les relations des oiseaux entre eux : à l’intérieur d’une même espèce, mais aussi entre les individus d’espèces différentes. Pour cela, la mangeoire est un premier poste d’observation. Il semble qu’il y ait une hiérarchie au sein des moineaux, par exemple. Moineaux et mésanges se tolèrent assez bien. Les chardonnerets ne viennent que si les autres espèces sont absentes. Les tourterelles chassent les moineaux. Les merles aussi. La taille, peut-être ?

Cette piste est peut-être la bonne en ce cas-là, mais j’ai souvent vu un moineau mettre en fuite une corneille, une pie chasser une buse…

 

Chez mes amis, un ballet étrange a pu être observé. Des hoche-queues ont établi leur nid au-dessus de la porte de la cuisine (on ne peut pas être plus près de l’homme !). Après la ponte, ils ont assuré le ballet rituel du nourrissage, en toute normalité. Ce qui est étrange, c’est qu’une hirondelle est venue régulièrement au nid : aucune agressivité, c’est certain. Pour faire quoi, au juste ? Nourrir les petits avec les parents ? Ceux-là, en tout cas, n’ont à aucun moment semblé inquiets, bien au contraire, ils semblaient trouver parfaitement normal cette bizarreté. Pour ma part, au vu du déclin évident des hirondelles dans notre village cette année, j’ai émis l’hypothèse que cet oiseau esseulé devait assouvir l’instinct de conservation de l’espèce, et que, n’ayant pas trouvé de partenaire, ou bien, peut-être son nid ayant été détruit, il rendait visite à ces petits d’une autre espèce. Nous n’avons pas pu déterminer s’il effectuait le nourrissage. Ce n’est pas certain du tout.

 

Je n’oublie pas les oiseaux prédateurs d’autres oiseaux, mais cela m’intéresse moyennement, aujourd’hui.

 

Mais je parlais de la diversité des vols. Songez au faucon crécerelle (dit émouchet ou Saint-Esprit), qui fait du sur-place. Au vol rapide des palombes ou des pigeons. À celui lourd des corbeaux. Aux battements d’ailes exagérément rapides des passereaux. Au vol lent du héron. À celui des mouettes affrontant la tempête. A celui du martin-pêcheur…Voyez comme les oiseaux sont capables de faire face à des vents violents, à avancer contre le vent. Quelle énergie cela doit leur demander ! Quand je pense à tous ces oiseaux, particulièrement aux rapaces - ces aigles, ces buses, ces milans - qui tournent des heures très haut dans le ciel, je finis par me demander : « Et s’ils y prenaient plaisir ?... »

Qu’est-ce qui pourrait bien les pousser à tourner ainsi indéfiniment au sommet des thermiques ? À affronter les filets rageurs du vent ?

Et s’ils jouaient ? S’ils éprouvaient une véritable ivresse à voler ?

 

Oui, vous vous dites peut-être : « Ah ! Voilà bien le poète qui rêve !... ». Pourtant je gage que bien d’autres de mes congénères ont eu la même pensée que moi, ou la partagent en ce moment.

Ma conclusion serait peut-être : et si les oiseaux étaient moins « bêtes » qu’on le croit ?...S’ils étaient en mesure de jouir, simplement, du bonheur de voler ?

Pour ma part, comme tant d’autres en tous lieux et en tous temps, je voue une vraie admiration et un réel respect pour les oiseaux, et je les envie, comme Icare, de voler.

Je vous renvoie à tous les films sur les oiseaux (Le peuple migrateur, de Jacques Perrin, entre autres).

S’élever dans l’air, maîtriser sans peine ses déplacements en tous sens dans l’espace, un rêve fascinant.

Eh bien, une nuit, j’ai fait ce rêve étrange. Je le dis de suite : je ne connaissais pas le film d’Harry Potter. Je l’ai vu peu de temps après ce rêve surprenant. J’ai rêvé que je pouvais me déplacer dans l’air, librement, sur un bout de bois, effectuer sans aucun risque ni contrainte aucune plongeons, virages, remontées, piqués et loopings, avec un bonheur inouï. Je passe les détails. Mais je garde encore vivace le souvenir de ces impressions éprouvées par mes sens quand mon corps était libéré de toute pesanteur.

 

Voyez : je n’ai seulement pas parlé des chants et des cris des oiseaux. Quoi de plus beau que le chant du rossignol la nuit ? Une pure merveille ! Et celui du merle ? Et puis tous ces langages que les oiseaux ont développés, pour communiquer : c’est proprement époustouflant[1].

Ces langages comportent aussi l’expression de sentiments divers, la détresse, notamment. Ce qui montre que les oiseaux ont d’une certaine façon, des points communs avec nous.

Oui, je pourrais vous parler pendant des heures des chants des oiseaux, un bonheur pur, où là encore, j’ai l’impression que les oiseaux expriment leur joie de vivre, parfois.

Je m’arrête. Mais avant de vous quitter, je veux évoquer la pression de plus en plus insoutenable que notre monde civilisé fait subir à nos amis ailés. Je pense aux pollutions diverses ; au développement technologique des activités humaines ; aux modes de culture moderne qui tendent à raréfier les abris naturels, les sites de nidification, les sources de nourriture ; aux évolutions de nos habitats… Bref, tout concourt à faire disparaître la gent ailée : ne faisons pas mourir les oiseaux !

 

 



[1] À ce sujet, je vous conseille d’écouter « les chanteurs d’oiseaux », deux copains, capables d’imiter un nombre incroyable de chants d’oiseaux, d’appels, de cris de détresse etc…Inimaginable ! [chanteurs-oiseaux.com]

 

À travers Champs N°37

Mardi 11 juin 2013

 

Des patronymes et…d’autres choses de moindre importance…

 

Juste un petit mot.

J’ai pu découvrir, ce soir, l’enseigne ancienne d’un charcutier, près de chez moi : Roty.

J’ai trouvé amusante cette coïncidence. Je me suis souvenu d’une autre « curiosité » du même genre.

Il existe dans ma région une fabrique de meubles : les meubles Debiais.

J’ouvre la rubrique de ces curiosités : si vous en avez d’autres, authentiques, je les collectionnerai ici. Sans méchanceté, bien sûr.

J’ai appris incidemment, il y a quelques années, que l’on attribuait aux enfants trouvés, autrefois, pour nom de famille des prénoms. Cela m’avait étonné.

Une autre histoire m’intéresse : celle des noms des lieux-dits. Lorsque je les découvre sur les pancartes de France, je jubile. J’aimerais en composer le dictionnaire…et rêver sur leur origine.

 

Bon. Vous allez dire : « C’est tout ce qu’il a trouvé, ce soir ?... ». C’est peu, en vérité. Cependant j’aurais aimé vous parler de tant d’autres choses…Mais c’eût été ennuyeux : parler du temps qu’il fait ?...de la crise ?...des raisons de mon pessimisme ?...de mes émerveillements, en observant les ballets des oiseaux ou les fleurs, la beauté d’un arbre ?...de mon émotion à l’écoute d’un certain concerto de Vivaldi ?...

 

Je ne tiens plus le compte des morts en Syrie.

J’ai offert ce matin un poème à une vieille dame fauchée...Je le lui ai dit, et puis je le lui ai offert. Il s’était passé quelque chose entre elle et moi : sa solitude, sa douleur m’ont touché…C’est inintéressant, bien sûr. C’est la vie. Telle que je l’aime. Une rencontre : par les yeux, par la parole, quelque chose a passé. Mon cœur s’est serré. Voyez-vous, c’est aussi simple que cela, la vie : l’écoute, l’échange, le don de trois fois rien…et moi, je suis bouleversé…

Ma vie, c’est l’amour. Comment dire cela qui est si simple ?...Je n’y parviens pas. Peu importe, n’est-ce pas ? Pour moi, j’ai découvert ce qui est essentiel en ce voyage sur terre. Je ne suis ni le premier, ni le seul à avoir touché cela du doigt, fort heureusement. Hélas ! Serions-nous si peu nombreux ? Ce que je vois et entends autour de moi me fait pleurer : comment ne pas avoir le cœur déchiré au spectacle de ce monde ?...

Mais je n’y puis rien !                                                                                                                

Il n’y a presque plus d’hirondelles, cette année, dans mon village, et c’est affligeant !

 

Réfléchissez, et vous comprendrez aisément les liens dans mes confidences décousues…

À une autre fois !…

 

À travers Champs N°36

Mardi 4 juin 2013

 

De la connaissance

 

La connaissance est, à mes yeux, par définition, lacunaire. Nul ne peut prétendre à une connaissance universelle de tout ce qui est ou a été. D’ailleurs, plus le temps passe, et plus cette connaissance enfle son volume. Particulièrement depuis quelques décennies, ledit volume semble augmenter de façon hyperbolique.

Ce que l’on sait me fait songer à une immense toile trouée, soutenue par des pics, un peu à l’image de la mer de nuages au-dessus de montagnes vue par au-dessus, d’un sommet culminant, par exemple. Les nuages forment un moelleux tapis blanc. Par endroits émergent des pics enneigés.

Telle serait ma connaissance, semblable à une multitude de pics dominant l’océan de mon ignorance. Constamment, de nouveaux pics apparaissent. Ces pics sont reliés entre eux, comme des poteaux électriques par les fils. Ainsi puis-je me représenter le réseau de mes connaissances.

Le vôtre y ressemble beaucoup, sauf que nous n’avons pas tous les mêmes pics. Ce qui fait la différence entre mes connaissances et les vôtres.

Je pose donc comme axiome qu’aucun être humain ne peut atteindre à la connaissance totale.

Je suis donc ignorant. Non pas totalement, mais partiellement. Vous aussi. Nous le sommes tous. Ainsi, je serais bien sot et présomptueux d’affirmer que je sais « tout ». Celles et ceux qui croient cela sont fous.

À notre époque, on peut dire que le réseau tissé par internet pourrait y prétendre, mais il demeurera forcément, corollaire de l’axiome posé ci-dessus, toujours en partie lacunaire. Cependant, la somme des connaissances humaines est assez remarquable, à mes yeux. Cette gigantesque banque de données qu’est « la toile » permet d’y puiser à volonté. C’est fantastique. Un peu comme une prolongation de notre connaissance personnelle.

 

Mais il n’est pas de connaissance sans mémoire. En effet, de quelle connaissance pourrait-on parler si l’on avait tout oublié ? Un célèbre penseur a dit : « La culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié. » Mais si on a tout oublié, il ne reste rien. La culture serait la trace d’une connaissance perdue ?...En ce cas, ce serait une mémoire malgré tout.

Imaginez un enfant qui se brûle, et qui oublierait cette cruelle expérience : il ne saurait donc plus que la flamme de l’allumette cause une vive douleur,…et il recommencerait à se brûler, autant de fois que la connaissance ne serait pas acquise.

Ce que je dis n’est qu’une parabole, car en fait, il existe une mémoire sensorielle, et c’est elle qui assure notre survie, nous protégeant en mode automatique constant. Comme dans le cas de l’allumette. N’empêche que c’est une connaissance.

En présence d’un objet ou d’un animal inconnus, vous ignorez tout de lui. D’un être humain aussi, bien sûr.

Comment se construit cette connaissance du monde qui nous entoure ?

Il semble – le processus a été scientifiquement étudié – que, face à une situation d’apprentissage nouvelle (qu’elle soit purement intellectuelle ou pas), il y ait une phase de mémorisation. Selon les difficultés propres que chaque individu rencontre à mémoriser, cette phase peut être suivie d’oubli. C’est souvent le cas, pas nécessairement, mais fréquemment. Il doit alors y avoir une redécouverte de l’objet (intellectuel ou autre), identique à la première confrontation, puis à nouveau mémorisation. Selon les individus et le niveau de complexité à assimiler, ce cycle peut se répéter plusieurs fois. La plupart du temps, il faudra que la mémoire soit « rafraîchie » de temps à autre pour consolider ce nouvel acquis.

Je ne sais pas s’il y a une limite théorique à la quantité d’informations que peut stockée un cerveau humain. Il serait plus juste de se demander jusqu’à quel volume de connaissances peut prétendre le cerveau d’un être humain, puisqu’il existe forcément une limite à celle-ci, la connaissance pouvant être considérée comme théoriquement infinie.

Alors, on pourrait se poser la question de savoir si je possède plus de connaissances que mon voisin (c’est une image, je n’ai rien contre mon voisin ou le vôtre, bien entendu) : pour moi, cette question est absurde. Nos connaissances sont pour partie communes, pour partie différentes. Car il est un certain nombre de choses que nous savons tous deux (parler la même langue, par exemple), et pas mal d’autres que je détiens, et pas lui, et vice-versa. Quant à quantifier tout cela, je le répète, ça n’a pas de sens.

Je tire pour conclusion de ces quelques réflexions qu’il serait stupide de prétendre être plus « savant » que les autres.

Bien sûr, des tests de nos connaissances existent : à mers yeux, tous sont trompeurs. Ils reposent sur une batterie de questions dans tous les domaines de la connaissance humaine : géographie, mathématique, histoire, etc, etc…

Mais tant d’autres choses ne sont pas évaluées dans les quizz ! Un forestier aguerri possède certainement une foule de connaissances sur la forêt que le commun des mortels ignore. On peut poursuivre la démonstration dans tous les domaines.

Je me garderais donc bien de juger de l’étendue des connaissances d’autrui à l’aune de la mienne, qui est bien étriquée, en vérité.

Revenons un instant sur la qualité de l’information.

Demandez à votre ordinateur un renseignement : il saura vous le donner. Mais il ne saura pas apprécier ce renseignement. Il a pour lui la même valeur que tout autre. Pas pour nous, humains. Car nous y ajoutons, de par notre intelligence, une appréciation de l’importance de ce module de savoir, par rapport au reste de nos savoirs. Ainsi, joueur d’échecs très médiocre, j’étais parvenu à battre systématiquement l’adversaire virtuel de mon jeu d’échecs électronique. Nul mérite. J’avais observé ses réactions dans les différentes situations de jeu. Sur certaines options (par exemple, ce qu’on appelle un « gambit », opération qui consiste à sacrifier une pièce maîtresse pour le gain de la partie), son choix était obstinément le même. Il avait été programmé pour réagir d’une certaine façon devant une situation donnée. Ici, le manque de réflexion – il en est privé – le désavantageait totalement. L’expérience ne lui était d’aucun recours, contrairement à l’humain.

J’aurais donc tendance à penser que sans réflexion, la connaissance est de peu d’utilité (« science sans conscience n’est que ruine de l’âme… »). La mémoire met à notre disposition un stock de données. Sans l’intelligence, qui élabore la réflexion propice au choix judicieux, elle n’est rien.

Reste, en dernier ressort, la décision. Je ne parle pas de la connaissance automatique ou quasi automatique de sauvegarde de notre organisme, mais des connaissances abstraites. Sans ce travail de la réflexion (tri, essentiellement, puis mémorisation), pas de progrès dans la connaissance. Car nous ne sommes pas en face d’un processus mécanique.

Le choix. La décision oriente nos apprentissages à chaque instant. La volonté joue ici son rôle, elle aussi.

Et puis, que faire de ces connaissances ? Les étaler à la louche, comme la confiture sur une tartine ?

En général, nous possédons un stock de savoirs dormants. Certains ne nous serviront jamais à rien. J’entends, au sens pratique des choses de la vie. Parce que l’on peut désirer posséder la plus vaste collection de savoirs, pour son plus grand plaisir personnel. C’est louable. Enfin, chacun fait ce qu’il veut. Je n’ai pas vraiment d’opinion là-dessus. Comme il se peut qu’un jour une connaissance acquise dans un lointain passé ressurgisse à la demande pour nous rendre un fichu service.

Car c’est tout de même le but implicite de la connaissance de nous rendre service.

Mais que votre mémoire vienne à défaillir, ou votre raison, et vos connaissances risquent fort de s’étioler…

Il apparaît évident que le meilleur moyen de prévenir des accidents de la mémoire ou de notre intellect, donc de préserver nos connaissances, c’est de travailler à cette préservation : ainsi seront stimulés les différents partenaires de notre être qui concourent à sa sauvegarde, par la sauvegarde de ces connaissances.

 

J’espère n’avoir pas trop dit de bêtises.

Bonne nuit (car celle-ci est bien avancée).

 

Je suis rudement heureux d’exister : par ma pensée, je me prouve chaque jour que je suis, par mes connaissances, je me prouve à quel point je suis inscrit dans l’infinie lignée de l’humanité, à quel point je suis vivant, combien c’est beau la vie. Hélas ! Tant de mes semblables sont en souffrance extrêmement sur cette Terre, et ne peuvent en dire autant.

À tous ceux qui souffrent, j’aimerais dire : soyez heureux ! Mais je réalise, de par mes connaissances, que je suis chanceux d’avoir le loisir de penser. Combien d’hommes, de femmes et d’enfants n’ont qu’une connaissance réduite à leur stricte survie…Alors comment pourrais-je demeurer vraiment heureux d’exister ?...


À travers Champs N°35

Mercredi 29 mai 2013

 

De la réincarnation

 

Pour les Anciens (Platon, Plotin …) l’âme survit au corps et renaît dans d’autres corps.

Ce système supposait des Dieux pour régir ces réincarnations. L’idée est que l’âme est plus noble que le corps, et qu’elle doit s’élever. Sous-entendu dans le bien. Jusqu’à vivre éternellement dans la lumière des dieux. Il existait donc pour nos ancêtres grecs un Enfer (ou des Enfers), où l’âme pouvait être torturée par les démons, en guise de punition. Ce système de punition-récompense semble un peu puéril, à première vue.

Ainsi, selon eux, l’âme perdure en se réincarnant dans des corps successifs, après leur mort. Mais il n’est pas dit d’où provient l’âme. Il semble qu’elle aurait une essence divine.

Il est écrit dans la Bible [Gén. 1 :26-27] : « Puis Dieu dit : « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance »… Et Dieu se mit à créer l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa… »

Or, Dieu n’est pas un être matériel, il est d’une autre essence. La part de l’homme qui Lui ressemble, c’est son âme. Quoi d’autre ?

 

J’ai lu quelque part, il y a fort longtemps, l’hypothèse suivante : des entités (des « dieux ») avaient, à l’origine, le pouvoir d’entrer et sortir à volonté dans les corps de leur choix, afin d’en éprouver les sensations.

La Bible, de son côté [Génèse 6:2-4], dit que « …les fils du vrai Dieu remarquèrent alors les filles des hommes, qu’elles étaient belles ; et ils se mirent à prendre pour eux des femmes…Les Nephilim se trouvaient sur la terre, en ces jours-là[1] (…) quand les fils du vrai Dieu continuèrent d’avoir des rapports avec les filles des hommes et qu’elles leur donnèrent des fils : ils furent les puissants du temps jadis, les hommes de renom »

Les Nephilim sont des géants [Nombres 13:32-33] : « (…) et tout le peuple que nous avons vu (…) ce sont des hommes d’une taille extraordinaire. Nous y avons vu les Nephilim, les fils d’Anak, qui sont d’entre les Nephilim, si bien que nous devenions à nos propres yeux comme des sauterelles et tels nous devenions aussi à leurs yeux »

Mais qui sont ces « dieux », ces entités ?

Des êtres immatériels, à coup sûr, mais doués de sentiments et de pensées, des âmes. Comme nous.

Par ailleurs, ces dieux qui s’accouplent avec les femmes humaines, de quelle essence sont-ils ?...On peut comprendre qu’ils ne sont pas matériels, et pourtant des unions charnelles auraient eu lieu, donnant naissance aux fameux Nephilim…

Avaient-ils la possibilité de se matérialiser à volonté, ce qui expliquerait qu’ils aient pu avoir des rapports sexuels avec les femmes humaines ? Mais alors, que sont-ils devenus, s’ils étaient immortels ?...

Curieusement, la Bible fait suivre le verset 6:4 par le suivant (6:5-7) : « En conséquence, Dieu vit que la malice de l’homme était abondante sur la terre et que toute inclination des pensées de son cœur n’était toujours que mauvaise. Et Il eut des regrets d’avoir fait les hommes sur la terre et Il fut peiné dans son cœur. Aussi Dieu dit-Il : « Je vais effacer de la surface du sol les hommes que j’ai créés… »

D’où le Déluge.

Il semble qu’il y ait un rapport entre ces Nephilim et la méchanceté qui règne sur la terre alors. D’autres écrits juifs et chrétiens expliquent qu’en effet ces géants sont les enfants de ces accouplements entre les dieux et les femmes des hommes.

Je suis surpris que nulle part sur terre il n’ait été retrouvé trace des squelettes de ces géants.

 

Il semble finalement qu’il y ait dichotomie entre le corps et l’âme, entre le matériel et le spirituel. Si l’âme existe depuis la nuit des temps, et qu’elle se réincarne éternellement, il devrait y avoir le même nombre d’âmes, conservé indéfiniment. Or, on assiste à un développement exponentiel de la population humaine : il faut donc que de nouvelles âmes apparaissent ?...

 

On attribue souvent à l’âme la propriété d’immortalité. Certes, si elle survit à la mort matérielle, on peut le croire.

On le voit, nous sommes dans le domaine des hypothèses. Aucune certitude concernant Dieu, les dieux, la survivance de l’âme, son devenir, son origine. Seule certitude : l’âme existe bel et bien, et sa nature nous est inconnue.

Il appartient à chacun de croire en la métempsychose ou en la réincarnation, ou en la disparition de l’âme après la mort du corps dans lequel elle habite.

 

Je suis fasciné par cette question de l’âme. De son essence immatérielle. Il existerait donc une essence particulière, une autre substance que la substance matérielle.

Or, notre science humaine, qui avance à pas de géants dans la compréhension du monde matériel, vivant ou inanimé, patine pour ce qui est d’avancer dans la compréhension du mystère de l’âme.

Peut-être parce que les outils, les méthodes utilisés depuis toujours pour mieux explorer et comprendre le monde matériel ne sont pas adaptés pour cette étude-là. Il faudrait aborder la question dans un autre état d’esprit, plus ouvert, plus imaginatif. La Bible et les textes et mythes anciens sont déjà une fenêtre sur un monde que la raison ne peut que rejeter. On ne peut aborder cette question que sous l’angle de l’irrationnel, puisque le rationnel ne traite par définition que des choses matérielles.

C’est en cela que l’étude de la Bible est intéressante. Elle offre une autre approche de ces questions-là. Il est étonnant de constater que dans le domaine de l’imaginaire, qui tente une approche de ces mystères, on ne voie apparaître que des dieux, Dieu, ou des hommes aux qualités supramatérielles, d’essence divine. On n’a rien inventé d’autre que ce concept-là. Ou l’humain manque vraiment d’imagination, ou la réalité dépasse l’entendement, ce que je crois volontiers.

Imaginons un instant qu’une ou d’autres réalités existent, en interpénétration avec le monde de nos perceptions matérielles, comment pourrions-nous la ou les percevoir, autrement que par nos cinq sens, qui, soit dit en passant, ne nous révèlent pas toute la réalité de celui-ci, nous le savons désormais ? En effet, nombre d’animaux perçoivent de la réalité environnante autre chose que ce que nous percevons : leurs organes des sens sont développés différemment (ouïe, odorat, vue…) donnant une autre représentation de notre milieu ; d’autres sont détenteurs de sens que nous ne possédons pas (écholocalisation, infrarouge…).

Le monde que je découvre autour de moi, que je crois connaître, dans lequel j’évolue, ma perception en est unique, et j’ai le tort de croire que tous les êtres vivant sur cette planète le perçoivent absolument de la même façon que moi. C'est absurde.

On dit souvent que les animaux perçoivent des choses qui nous échappent totalement : je le crois. Certaines vibrations sont perçues par les animaux mais pas par nous (songez aux poissons rouges dans leurs bocaux, qu’utilisent les japonais pour se tenir alertés de l’imminence d’un séisme, par exemple).

Je veux juste vous montrer notre ignorance. Ou, plus précisément, que nous ne captons pas tout.

On parle d’aura d’une personne. Il semble, qu’en général, elle ne soit pas perçue par le commun des mortels. Existe-t-elle ? Je le pense volontiers : je sens que les animaux perçoivent de moi des choses qui m’échappent : odeurs, aura… ? Difficile à dire.

Sous prétexte de rationalisme, on se prive d’une foule d’études passionnantes qui aboutiraient, semble-t-il, à des découvertes intéressantes. Si nous faisions un peu plus confiance aux choses que nous « sentons » (dans le sens de pressentir), nul doute que des horizons nouveaux se dévoileraient.

Ne ressent-on pas la présence de quelqu’un près de nous sans l’avoir vu ou entendu ou su qu’il ou elle était là ?...Combien d’informations non codifiées passent de vous à moi en dehors de toute parole, par la simple analyse de la morphologie, l’attitude, le visage, les yeux, la bouche…Le regard !...Que ne passe-t-il pas par le regard ?...Bien sûr, les scientifiques vous expliqueront que c’est grâce aux mille et une minimodifications de la peau sous l’effet des tressaillements infinitésimaux de ses muscles, par l’imperceptible dilatation d’un iris oculaire, que l’on interprète instantanément, que l’on dessine par déductions, par suppositions, la cartographie mentale générale et immédiate de notre interlocuteur. Et c’est peut-être en partie vrai. N’empêche. Le temps est venu de cesser de nier qu’il existe autre chose que le monde matériel dans lequel nous évoluons. Je gage, par exemple, que le temps est une notion certainement plus étrange qu’on le croit habituellement.

Somme toute, je réclame le droit à l’imagination, la réflexion dans des domaines inexplorés de la science, l’investigation des champs que celle-ci se refuse d’explorer depuis des siècles. Pourquoi opposer, par exemple, science et parapsychologie ? Peut-on nier ad vitam aeternam la réalité de certains phénomènes inexpliqués ?

Je propose qu’on cesse de bloquer ainsi les esprits, qu’on libère notre imaginaire, qu’on accorde du crédit aux relations de phénomènes jusqu’ici rejetés comme charlatanisme pour les examiner sous un autre angle que celui du rationnel. Qu’on cesse de dénigrer systématiquement les Textes sacrés, si l’on est athée, par exemple, pour se laisser pénétrer, sans résistance, de tous les possibles.

S’ouvre alors un monde lumineux, dans lequel on réalise la réalité d’autres champs d’existences qui cohabitent parmi nous, invisibles jusqu’alors, parce qu’on a toujours réfuté leurs interférences avec le nôtre.

Ainsi ma perception des âmes me permet-elle d’apprécier immédiatement leur beauté, leur lumière radieuse, ou au contraire leur noirceur, leur obscurité, leur méchanceté. Ces dernières me désarment totalement, me rendent malade immédiatement. Je me sens devant celles-ci vulnérable, désarmé. Capable cependant de réagir et de les combattre violemment, si nécessaire. En fait, je suis sûr que bien des personnes, parmi vous, ont une vision très personnelle de notre monde, en tout cas différente de la mienne ou de celle d’autrui : chacun est singulier. À ce titre, par exemple, chacun souffre à des niveaux différents en réaction à des stimuli identiques. Nous percevons et ressentons différemment, à l’infini, et, donc, construisons autant de mondes différents que nous sommes d’individus.

Quant à ce que deviendra mon âme après ma mort, au fait, je m’en moque un peu. Ce que je trouve merveilleux, c’est de vivre l’instant présent, en explorant tous les possibles, car ainsi, je jouis de ma qualité exceptionnelle d’humain, et des aspects miraculeux du don de la vie sur cette planète bulle de lumière dans les ténèbres…

Et puis, quoi de plus merveilleux que ce feu qui brûle en moi toujours, et qui est amour ? Amour de tout ce qui est, de tout ce qui vit, de tout ce qui est beau et simple (et ô combien complexe…) : le chant d’un rossignol, le vert des feuillages agités par le vent sur le gris du ciel, le déplacement félin et sensuel d’un chat vers sa proie, les vagues de la mer, le mouvement du ruisseau qui coule sur les cailloux et baigne les plantes de ses rives, les petits bruits du bébé qui jase sous le tulle…

Seule consternation dans ce bilan d’extase, presque, pourrais-je dire, la conscience de la désolation totale et inéluctable qu’est en train de semer partout autour d’elle mon espèce, somme des individus dont je suis, et je me sens responsable de cette destruction en cours, sans que j’y puisse grand-chose…

Terre, vaisseau-mère, il n’est pas loin le temps où tu fonceras seule et grise dans le froid de l’espace, ne portant plus aucune trace de vie à ton bord, telle un vaisseau-fantôme, en quelque sorte…



[1] Nous sommes un peu avant le Déluge