Il n’y a plus de feu ce soir mon amour
Il n’y a plus de feu ce soir mon amour
que quelques braises que j’attise en vain
car il n’y a plus de bois mon amour
plus de bois à brûler.
La chaise basse est seule
face au foyer noirci, face à ces quelques braises
qui meurent ;
très doucement aussi meurt Ysolde
aux archers de Wagner à la télé
ce soir très tard.
Il n’y a plus de feu ce soir mon amour
que ce grand vide en moi cette grande tristesse
les enfants que l’on aime, et ce très grand dégoût
des choses – il faut vivre
sans écrire, sans créer,
sans penser, conformément à sa propre volonté - ;
mon père disait : « L’amère joie du sacrifice »…
Cette grande lassitude au fond de moi…
Vois-tu on ne sait jamais tout le mal qu’on fait
mais si on ne faisait rien, que serait-on ?…
Comme je me sens détaché des choses et
cependant tant de bouffées de chaleur sommeillent en moi
comme ces braises sous la cendre.
Il n’y a plus de feu ce soir mon amour
parce qu’il n’y a plus de bois ;
le soufflet traîne sur le carrelage froid
j’ai abandonné la chaise basse.
Rougeoie-t-il cette nuit vraiment sous la cendre
quelques braises à cet âtre sans feu ?…
Francis BELLIARD
(Poème antédiluvien...)